Ils sont artistes, chômeurs, travailleurs précaires ou intermittents et se sont donné rendez-vous ce vendredi matin pour une action d'occupation des locaux de la DIRECCTE (direction Régionale des Entreprises, de la Concurrence, de la Consommation, du Travail et de l'Emploi) de Toulouse.
Un premier rassemblement a lieu à 10 heures sur le parvis du TNT (Théâtre National de Toulouse).
Quelques consignes d'organisation sont données avant le départ en métro pour le siège de la Direccte à Compans-Caffarelli, où une quarantaine de membres des Collectif-Chômeurs-Précaires-Intermittents de Midi-Pyrénées, Collectif Oc de lutte contre la précarité et Sud Culture Solidaires se sont invités.
S'inviter dans les lieux de pouvoir
Pousser les portes des lieux de pouvoir dans lesquels ils ne sont pas attendus est désormais la signature des collectifs de lutte pour la protection des droits sociaux.Ce jeudi, ils participaient à leur manière aux vœux du nouvel an de Jean-Luc Moudenc aux agents municipaux et vendredi dernier, investissaient le hall du siège de l'assureur Axa à Balma.
Après la réforme de l'assurance chômage et le projet de réforme des retraites fin 2019, la résistance s'organise du côté des collectifs, déterminés à faire entendre leur voix, en dehors des grandes manifestations syndicales et interprofessionnelles, dans lesquelles ils sont invisibles.
Un mode d'action ciblé contre les symboles de l'Etat et des manifestations que les membres de ces collectifs veulent pacifiques.
Ce vendredi matin, le siège toulousain de la direction du Travail était choisi pour sa connexion privilégiée avec la ministre du travail Muriel Pénicaud.
Des prises de paroles dans le calme
Le groupe investit le hall d'accueil et déploie une banderole "précarité, agir plutôt que subir".Quand le directeur de la Direccte rejoint les manifestants dans le hall, les prises de paroles s'enchaînent : retrait du projet de réforme sur les retraites, salaire minimum pour tous, plus de justice sociale et un monde plus solidaire.
Le directeur est interpellé par les visiteurs sur ses responsabilités en tant que fonctionnaire de l'Etat à appliquer les réformes décidées par le gouvernement.
Il est appelé à se montrer solidaire de ses fonctionnaires grévistes et ne pas faire "remonter" les jours de grève du personnel.
"Qui sème la misère, récolte la colère" entonnent les membres des collectifs. Et d'enchaîner : "Y'a des gens qui se goinfrent et d'autres qui n'ont rien, y'en a marre."
"Réforme du chômage, maintenant des retraites, c'est trop, il faut les arrêter !"
Le ton monte mais les menaces de faire intervenir les forces de l'ordre ne seront finalement pas suivies d'effets.
Malgré l'opposition de la direction, quelques personnes du collectif ont rejoint les fonctionnaires dans les étages. Certains d'entre eux, solidaires des actions, sont venus soutenir les manifestants installés dans le hall.
Les échanges ont eu lieu dans le calme.
Des lois et des conséquences
Pendant l'occupation de la direction du travail, une femme prend la parole et s'adresse directement à son directeur. Elle l'interpelle sur les conséquences des lois décidées en haut lieu et sa responsabilité à les appliquer en région."J'avais besoin de mettre ce directeur face à ses responsabilités. On ne peut pas se dédouaner de nos responsabilités. Le mépris de classe affiché me choque. Nous, on prend des risques pour être entendus".
Lisa est comédienne-metteur en scène et "chômeuse active", dit-elle fièrement.
Elle alterne depuis plusieurs années contrats d'intermittente du spectacle, périodes de chômage et formations. Entre ses engagements de militante et sa famille, son emploi du temps est bien rempli. Pas de RSA (Revenu de solidarité Active) parce que mariée à un homme qui travaille, pas assez de cachets donc pas de droit au chômage, Lisa vit avec zéro euro par mois.
Depuis son engagement dans le collectif en décembre dernier, elle a créé des liens avec des militants, intermittents du spectacle comme elle.
Quand on est intermittent au chômage, on est assez isolés, c'est difficile de fédérer les personnes. Avant on pouvait se rencontrer dans la file d'attente de l'ANPE, aujourd'hui, tout ça a été cassé.
D'autres actions à venir
Tant que la réforme des retraites ne sera pas abandonnée, d'autres actions suivront, assurent les collectifs.Les artistes et intermittents continueront à porter leurs messages de solidarité avec le mouvement social en cours et seront présents lors des rendez-vous à venir.