Témoignage. "Le système médical est au sol" : après dix coups de fil, ce médecin n'a jamais pu hospitaliser sa patiente

Publié le Mis à jour le Écrit par Robin Doreau
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Dans un tweet, le président du syndicat UFML, docteur Jérôme Marty, relate son parcours du combattant pour hospitaliser l'une de ses patientes dans la région Occitanie. Un exemple parmi d'autres, qui selon lui illustre un système de soins qui "craque de partout".

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"Pas de lit disponible", "le standard est en panne", "on est à 180% d'activité".... autant de problématiques auxquelles est confronté le Dr Jérôme Marty, médecin généraliste à Fronton( haute-Garonne), et président du syndicat UFML.

Dans un tweet publié le 31 janvier 2024 sur le réseau social X, le professionnel de santé relate, à coup d'échanges téléphoniques, toutes ses tentatives pour placer une de ses patientes (appelée ici madame "padchanss") en hospitalisation, en vain. 

"Ce genre de situation, ça arrive de plus en plus, détaille le médecin. Les urgences sont débordées, c'est tout notre système de santé qui est au sol. Il n'est plus en train de s'effondrer, il est au sol, et ce sont les patients qui en payent le prix."

Pire qu'avant le covid

Quatre ans après la crise sanitaire du covid-19, où avait été exposée au grand jour la problématique du manque de lits, la situation ne semble pas avoir évolué. "Le manque de lits, et de personnel n'a jamais été aussi important. Même dans le privé, où le Samu envoie des patients en permanence parce qu'il n'y a plus deplace dans le public, et où il y a deux fois moins de personnel. Certains font plus de 70 entrées par jour, tout seul.

"Il a raison de dire que les urgences débordent, c'est la réalité", confirme Vincent Bounes, médecin au SAMU 31 et vice-président de la Région Occitanie en charge de la Santé. "La situation est encore pire qu'avant le covid."

Pour Vincent Bounes, le problème est structurel. Et les "bonnes volontés de l'ARS ou du CHU" n'y changent rien : "Les nouvelles générations de médecins ne s'installent plus, et n'ont pas le même rythme que les anciens qui partent à la retraite. Pour combler, avec le même nombre d'actes médicaux, le départ d'un médecin en retraite, aujourd'hui il faut 2,3 jeunes docteurs, assure Vincent Bounes. Il n'y a plus assez de médecine de ville, donc les gens se tournent vers le SAMU et les urgences. On reçoit 10% d'appels en plus chaque année.

Après près une dizaine de coups de fil, la patiente du Dr Marty n'a pas pu être hospitalisée le jour même, mais a dû attendre le lendemain. "On ne peut pas offrir des soins de qualité aux patients. Alors ils prennent des risques", appuie le médecin. 

Quand les politiques viennent à l'hôpital, ils préviennent à l'avance et on repeint les murs. Il faudrait qu'ils viennent de nuit pour voir la réalité en face.

Dr. Jérôme Marty

Une situation qui rappelle celle de ce jeune homme de 25 ans, décédé dans le Var en septembre dernier, après plusieurs heures d'agonie dans le couloir des urgences. 

Une réponse politique ?

En tant que président de syndicat, Jérôme Marty va rencontrer la ministre de la Santé Catherine Vautrin dans les prochains jours. "Tout le monde est au courant de la situation, dans nos services, à l'assurance maladie... Mais il n'y a qu'au plus haut de l'Etat qu'ils ne comprennent pas." Le Dr Marty de poursuivre : "Quand les politiques viennent en visite à l'hopital, ils préviennent à l'avance, on repeint les murs et on fait comme si tout allait bien. Il faudrait qu'ils viennent de nuit, sans prévenir, pour voir la réalité en face. Quand on voit les annonces d'Attal..."

Vincent Bounes de rebondir : "Le Premier Ministre a raison quand il dit qu'il faut une responsabilité collective. Sur les gardes par exemple, aujourd'hui seuls 30% des médecins assurent le planning de garde, principalement des anciens. Mais entre les annonces et la réalité il y a un décalage. Accueillir plus de médecins étrangers, très bien, mais il faut voir les conditions administratives mirobolantes.... Ce n'est pas simple."

En Occitanie, la Région ouvre des centres de santé pour convaincre les professionnels de s'installer. "On en a 16, on compte en ouvrir 10 de plus en 2024, et 10 autre sencore en 2025. Mais ça ne règlera pas le problème de fond", se désole Vincent Bounes. "Aujourd'hui tous les services d'urgence de la région sont en difficulté, surtout dans le bassin toulousain, où les services sont au bord de la fermeture en permanence."

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