Les agriculteurs de la région se préparent à bloquer à partir de dimanche soir le dépôts de carburants de Lespinasse au nord de Toulouse. Ils veulent dénoncer une concurrence déloyale des produits importés comme l'huile de palme.
Sous le mot clé #SauvezLesAgri, le premier syndicat agricole, la FNSEA, appelle ses adhérents sur les réseaux sociaux à occuper 14 sites stratégiques, pour trois jours reconductibles.
Parmi ces sites, figure le dépôt de carburant de Lespinasse au nord de l'agglomération toulousaine.
Le slogan du syndicat: "N'importons pas l'agriculture", car cela crée des "distorsions de concurrence".
"On nous demande beaucoup d'efforts pour améliorer nos produits, sur la qualité, sur l'environnement, ce qui occasionne des coûts supplémentaires. Et dans le même temps, nous subissons de plus en plus d'importations de produits qui faussent la concurrence, et ne correspondent pas aux standards sanitaires et environnementaux qu'on nous impose", explique à l'AFP Jérôme Despey, secrétaire général du syndicat FNSEA.
L'huile de palme, la goutte de trop
L'huile de palme est loin d'être le seul produit visé, mais c'est "la goutte qui a fait déborder le vase de la colère", ajoute M. Despey.Ce sont en effet 300.000 tonnes de cette huile, issues de la déforestation en Malaisie ou Indonésie et présentant un très mauvais bilan carbone, qui feront tourner la bioraffinerie de Total à La Mède, près de Marseille, à partir de cet été. Alors que l'agriculture française peut fournir des huiles de tournesol ou de colza, coûtant toutefois plus cher.
Le mouvement est observé avec intérêt par les ONG environnementales, d'ordinaire opposées à la FNSEA sur les dossiers phytosanitaires.
"La FNSEA a longtemps eu le monopole des biocarburants en France avec le colza et le tournesol, et ce monopole est en train d'exploser avec La Mède", souligne Sylvain Angerand, de l'ONG Les Amis de la Terre.
Les paysans en colère espèrent aussi obtenir le soutien des consommateurs, en dénonçant les effets sur le contenu des assiettes d'accords commerciaux internationaux comme le CETA signé par l'Union européenne avec le Canada, ou l'accord UE-Mercosur en négociation avec quatre pays d'Amérique latine.
"La traçabilité de nos produits s'améliore et il n'y a aucune traçabilité sur
ces produits importés", s'indigne M. Despey, rappelant les récents scandales sanitaires sur la viande au Brésil.
"La FNSEA n'est pas fermée au commerce international, au contraire, mais elle ne peut plus assumer les distorsions de concurrence induites par certaines importations, sinon cela va être la disparition de l'agriculture française", résume-t-il.
Ne laisser entrer personne
Le syndicat demande que soit réintroduit dans la loi Alimentation, examinée à partir du 26 juin au Sénat, un amendement sur l'interdiction d'importer toute denrée produite en utilisant des substances phytosanitaires interdites dans l'Union européenne.
Il souhaite aussi que le gouvernement "renonce à son contingent d'importation d'huile de palme", et réclame un allègement du coût du travail salarié de saisonniers, qui est "27% plus élevé que la moyenne européenne".
La stratégie est donc claire. Faire préssion sur le gouvernement en bloquant des points stratégiques. A Lespinasse, comme ailleurs, aucun "personne ne passera " ont certifié les leaders syndicaux.
Une pénurie de carburant n'est toutefois pas à craindre dans l'immédiat. Car la France compte au total sept raffineries en activité ainsi que 200 dépôts de carburant, dont environ 90 dépôts principaux. Et l'Etat dispose de stocks stratégiques pour trois mois.