Les obsèques de Guy Lamouroux ont été célébrées ce 11 janvier 2023 à Balma près de Toulouse. A 19 ans, il était entré en résistance en infiltrant la police de Vichy pour donner des informations au maquis. Homme de l'ombre qui n'aimait pas les honneurs, il s'est éteint alors qu'il allait fêter ses 102 ans au mois de mai.
Ils ne sont plus nombreux à pouvoir témoigner de la guerre de 39-45. L'an dernier, nous avions rencontré Guy Lamouroux non loin de Toulouse à Balma. Un homme charmant et plein d'esprit qui fêtait ses 100 ans et dont les souvenirs de guerre étaient intacts.
Résistant à 19 ans, infiltré dans la police de Vichy
Juin 1940, la France vient de capituler. Guy Lamouroux est alors étudiant à la fac de sciences de Toulouse. Il n'a que 19 ans lorsque celui qui allait devenir son beau-père lui propose de rentrer dans la résistance.
Des épisodes dramatiques qu'il n'a pas oubliés mais qu'il racontait toujours avec un brin de facétie. "J'étais à la fois maquisard du maquis Roger et au commandement régional des GMR, les groupes mobiles de réserve, une organisation paramilitaire de Vichy qui traquait les résistants."
Il devient donc une taupe au sein de la police, un lien précieux pour renseigner les résistants de futures rafles. "J'avais truqué le téléphone du commandant et quand il venait donner des ordres, je lui coupais la parole. Je prévenais alors notre agent de liaison installé dans un bistrot sur le boulevard des Minimes à Toulouse."
Tout ceci raconté toujours avec le sourire, le souvenir intact du mauvais tour qu'il jouait à la police de Vichy, en mettant en péril sa vie et celle des résistants. "Je mettais les indications du lieux où ils devaient se rendre pour effectuer une rafle. Ils ont tout le temps trouvé des cendres chaudes mais pas les résistants. Sauf une fois."
Guy Lamouroux nous avait reçus dans sa maison, au moment de fêter les 100 ans en famille. Reportage Benoît Roux / Eric Foissac France 3 Occitanie
Tous ses souvenirs, Guy Lamouroux les avait consignés dans sa mémoire et dans des albums photos. Sa pudeur ne l'a jamais autorisé à raconter ce pan d'histoire à ses enfants ou petits-enfants. S'il a pu nous en parler, c'est aussi grâce à un coup de chance.
Peu de temps avant la libération de Toulouse le 20 août 1944, Guy et ses compagnons arrêtent un des inspecteurs des intendants de police de Vichy. "Il avait un carnet sur lequel on a trouvé que mon copain qui s'appelait Orfelin et moi-même devions être arrêtés la semaine suivante ! Toute ma vie j'ai eu de la chance." C'est bien connu, qu'elle ne sourit qu'aux audacieux.
"J'ai vendu les premières machines à laver le linge"
Avec autant d'enthousiasme, il raconte aussi l'après-guerre. Guy intègre alors l’Armée de l’Air où il obtiendra le grade de commandant. Il participe à une autre aventure, certes moins périlleuse : reprendre la boutique de son père. "Nous avons vendu les premières ampoules électriques sur la place Matabiau. Puis le magasin s'est adapté. Nous avons eu les premières machines à laver. C'était comme un tonneau en tôle émaillée. Je me souviens que ça faisait un bruit terrible. Pour laver, ça lavait très bien mais il ne fallait pas oublier le linge, sinon il ressortait tout déchiré !"
D'origine ariégeoise, il nous avait raconté son engagement avec beaucoup d'humilité mais aussi une force de caractère. "Je n'ai jamais cherché les honneurs, ni les médailles. Je n'avais que 19 ans à l'époque et à cet âge-là, on n'a pas peur. On fait ce qu'on doit faire et tant pis si c'est dangereux."
L'homme de l'ombre s'en est allé sous d'autres cieux. En toute discrétion, après une vie modeste et bien remplie.