Après la mise en examen de 3 élèves du collège Lamartine pour "viols en réunion et agression sexuelle", un dispositif d'accompagnement est mis en place dans l'établissement depuis le 4 novembre. Ce lundi, les réactions des élèves oscillent entre stupeur et banalisation. Voici leurs témoignages.
Trois élèves du collège Lamartine du quartier Saint-Cyprien à Toulouse ont été mis en examen le 19 octobre pour "viols en réunion et agression sexuelle". L'information est tombée pendant les vacances scolaires. Mais les faits remonteraient au mois de mars dernier.
La mère de la victime et des syndicats dénoncent l'inaction de la direction de l'établissement. Un rassemblement était organisé ce lundi près du collège.
Devant la sortie de l'établissement ce lundi midi, les élèves ne sont pas très nombreux. La bonne humeur est réelle en ce jour de reprise des cours. Mais quand je leur parle de cette affaire de viol collectif qui frappe leur établissement et dont la vidéo a circulé sur les réseaux sociaux, leurs visages se referment. Difficile d'aborder le sujet. La question est taboue. Mais après quelques minutes, Chloé, Rami et Jason* en classe de 3ème acceptent finalement de parler.
"Je trouve ça très grave"
"Moi je ne la connaissais pas bien. Je trouve ça très grave, surtout la vidéo qui a circulé sur les réseaux sociaux jusqu'à encore récemment", débute Rami, 14 ans qui se referme aussitôt.Je lui demande alors si des rapports sexuels à plusieurs lui paraissent normaux vu leurs jeunes âges, 14 ans tout au plus. La jeune fille me lance de manière catégorique : "C'était pas un viol, si elle avait envie de faire ça, c'est son corps, elle fait ce qu'elle veut ".Elle était consentante, poursuit sa copine Chloé juste à côté, je le sais car elle assumait, elle le disait à tout le monde. Après elle a changé de version, c'est grave comment elle a réagi.
D'autres élèves au courant
Je demande alors si des menaces ou des intimidations se sont produites sur la victime de ces viols en réunion. Chloé et Rami disent ne pas savoir. A côté d'eux, Jason, leur camarade affiche un sourire gêné et baisse les yeux. L'omerta est palpable. Un peu plus loin, Laïla*, 14 ans, se presse pour la reprise des cours, mais accepte de m'accorder quelques minutes. "En fait, il y avait pas mal d'élèves qui était au courant visiblement dans le collège. Mais moi non, elle ne m'en a jamais parlé, je l'ai découvert par la presse et les réseaux sociaux, explique-t-elle."
Je suis très choquée, c'est pas normal. Je pense qu'au début elle devait être d'accord mais après elle a sans doute refusé.
La question du consentement
La question du consentement justement semble être au coeur de cette affaire sensible. Pour des mamans d'élèves un peu plus loin, rassemblées ce lundi devant le collège pour dénoncer ces faits très graves, la colère et la tristesse sont réelles."Il faut aller plus loin que la question du consentement, c'est aussi une histoire d'éducation et du rapport au corps à ces âges. La question du désir et du respect de chacun aussi", débute cette maman d'un élève de 5ème au collège Lamartine.
Les victimes sont rendues coupables, c'est très grave. Il y a une pression insidieuse entre eux mais je pense que la responsabilité revient aux adultes qui les encadrent, c'est en amont que tout se joue.
Des vidéos qui circulent sur les réseaux sociaux
Si les parents se disent très choqués, Chloé, Rami et Jason, eux, semblent plus détachés. Leurs échanges de sourires gênés me font comprendre qu'ils ne m'ont pas tout dit et que je n'en saurai pas plus. La jeune fille conclut alors : "bon on doit y aller, vous savez, ce genre de vidéo, moi, ça ne m'a pas beaucoup surprise, ça arrive tout le temps sur les réseaux sociaux". Une remarque jetée à la volée, comme une banalité.
Le témoignage de la mère de la victime
La mère de la victime présente au rassemblement ce lundi près du collège a témoigné au micro de nos confrères de France Bleu Occitanie.Elle explique qu'elle avait été convoquée par le directeur et le CPE (Conseiller Principal d'Education) du collège il y a quelques mois mais qu'ils avaient simplement demandé si sa fille avait un téléphone.
Elle raconte :
"J'ai appris, continue la maman, que pendant plusieurs mois, depuis mars tout le personnel de l'établissement était au courant, que tous les élèves étaient au courant, il y avait des vidéos qui circulaient et tout le monde cachait tout, franchement, c'est horrible, c'est horrible."Il y a à peine 15 jours j'ai été contactée par une personne qui travaille au sein de l'établissement Lamartine et qui m'a dit : "j'en ai marre de porter ça sur la conscience, votre fille s'est faite violer".
*Pour respecter l'anonymat des témoignages, les prénoms ont été modifiés.