Témoignage. Le tueur en série "le Serpent", cette incroyable rencontre en Inde en 1976 racontée par un étudiant de Tarbes à l'origine de son arrestation

Publié le Mis à jour le Écrit par Sardain Claire

Charles Sobhraj, dit "le Serpent", connu grâce à la série Netflix, vient d'être libéré après 18 ans passés dans les geôles népalaises, où il purgeait une peine pour un double assassinat. Un ancien étudiant de Tarbes (Hautes-Pyrénées) à l'origine de son arrestation raconte.

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Il avait à peine 20 ans en 1976. Une cinquantaine d’étudiants de Tarbes (Hautes-Pyrénées), en voyage de fin d’année ont croisé la route de Charles Sobhraj, le tueur en série surnommé "le Serpent". Il a même permis avec ses camarades de le faire arrêter. Il raconte.

Les années 70

Pour comprendre ce qu'ont vécu ces étudiants, il faut se remettre dans le contexte des années 70. Mai 68 est passé par là et beaucoup de jeunes qui en ont les moyens rêvent d'aller faire un tour en Inde ou au Népal, les eldorados de l'époque. 

Pour Jean Chazal et une cinquantaine de ses camarades, c'est un voyage de fin d'études à l'École nationale d'ingénieurs de Tarbes (Hautes-Pyrénées), qui les conduit jusqu'en Inde. C'est là qu'il va rencontrer avec ses camarades de promotion Charles Sobhraj. Nous sommes en 1976 et le tueur en série a déjà fait plusieurs victimes.

"Il était sympathique", nous confie Jean. "Très agréable, jamais agressif. On ne pouvait pas imaginer qui se cachait derrière cet homme."

Drogués lors d'une soirée

Lors de leur dernière soirée à New Delhi, les jeunes font la fête à l'hôtel Vikram. Un immense repas organisé par Charles Sobhraj lui-même : "la soirée se passait très bien", explique Jean. "Mais soudain, j'ai vu plusieurs de nos camarades perdre connaissance. Comme moi, ils avaient testé des pilules proposées par Sobhraj. On a fait des allers-retours en taxi pour les transporter d'urgence à l'hôpital. Jusqu'au moment où moi aussi, je me suis effondré."

Soigné pendant 24 heures, Jean a fini par sortir de l'hôpital sans autorisation. Une analyse du produit ingéré lui a fait froid dans le dos par la suite :"Il contenait de quoi endormir un éléphant, avoue-t-il. "J'aurais pu en mourir. À l'époque, nous étions totalement inconscients".

"Le serpent" arrêté

Jean ne l'apprendra que le lendemain. Mais pendant qu'il se remet lentement à l'hôpital, comme 26 autres étudiants de sa promotion, ses camarades de voyage, qui n'ont pas été drogués, font très vite le lien avec l'affaire Sobhraj. Ils maîtrisent "le Serpent" en attendant les forces de l'ordre. Sobhraj était dans le viseur d'Interpol. Il est interpellé ce 10 juillet 1976, grâce au sang-froid de ces étudiants tarbais. 

Le tueur en série va purger 12 ans de prison en Inde. En 1997, il est libéré, mais il commet l'erreur de retourner au Népal où il est recherché pour un double meurtre. Retour donc à la case prison, dans un centre de détention de haute sécurité à Katmandou jusqu'au 21 décembre 2022. Il est libéré pour raisons médicales et transféré en France. 

Des souvenirs douloureux

L'annonce de cette libération a remué bien des souvenirs chez les anciens étudiants tarbais aujourd'hui retraités. L'un d'eux, Jacques Aragon a des mots durs au micro de France Bleu Pays Basque : "s'il y était resté, ça ne m'aurait pas dérangé ! "

Pour Jean, le souvenir de ce moment reste vif : "J'ai eu des séquelles physiques pendant presque 8 mois", raconte-t-il. "Et psychologiquement, la blessure est encore présente. J'ai toujours eu beaucoup de mal à faire confiance aux gens, dans mes voyages à l'étranger, je restais hyper vigilant, même si j'ai voyagé partout dans le monde entier pour mon travail".

Aujourd'hui âgé de 68 ans, Jean Chazal avoue avoir gardé cette histoire pour lui, jusqu'à la sortie de la série sur Netflix : "je ne voulais pas donner de mauvaises idées à mes enfants."

Quant à Charles Sobhraj, à 78 ans, il est soupçonné d'avoir tué plus de vingt jeunes routards occidentaux dans plusieurs pays d'Asie, dans la plupart des cas en empoisonnant leur nourriture ou leur boisson. Il n'a pas été condamné pour tous les homicides.

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