Assassinat de la grotte sanglante à Sète : la libération des suspects pour délai de détention excessif demandée

Avec le confinement, le procès de l'auteur présumé du meurtre de la grotte sanglante à Sète et de sa complice supposée a été repoussé à janvier 2021. Le délai de détention provisoire d'Audrey Louvet est dépassé. La Cour d'Appel de Montpellier dira le 11 juin si les suspects sont remis en liberté.

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La Cour d'Appel de Montpellier examinait ce jeudi matin l'éventuelle remise en liberté des deux suspects de l'assassinat dit "de la grotte sanglante de Sète", l'une des grandes énigmes criminelles de ces dernières années dans l'Hérault. En cause : la question du dépassement du délai de leur détention provisoire.

Procès reporté pour cause de confinement

La détention d'Audrey Louvet, complice présumée, est en effet arrivée à échéance légale le 14 mai dernier et celle de Rémi Chesne, accusé d'avoir commis l'assassinat mais qui nie les faits, prendra fin en octobre prochain. En effet, leur procès devant la Cour d'Assises de l'Hérault devait se tenir à la mi-mars mais, confinement oblige, il a été reporté.

Vers une remise en liberté des 2 co-accusés ?

Le maintien en prison d'Audrey Louvet avait toutefois été prolongé en vertu de "l'ordonnance Covid" du 23 mars 2020 qui devait permettre la prolongation automatique et sans débat des détentions provisoires pendant le confinement. Mais la Cour de Cassation a invalidé le texte au motif qu'il était contraire à la Convention Européenne des Droits de l'Homme.

Quant à Rémi Chesne, si le délai de sa détention provisoire n'est pas échu, son avocat montpelliérain, maître Luc Abratkiewicz, estime que les deux cas sont liés et qu'en conséquence, son client doit, lui aussi, être remis en liberté.

Décision le 11 juin 2020

Une bataille d'arguments judiciaires a alimenté les débats concernant ce dernier, car Rémi Chesne ayant fait appel de l'ordonnance de mise en accusation (ce que n'a pas fait Audrey Louvet), cela a automatiquement retardé de 6 mois le délai de sa détention provisoire. Il y aurait donc là matière à prolonger son maintien en prison en vertu des nouvelles dispositions liées à la crise sanitaire. Le juge appréciera.

Les co-accusés connaîtront la décision de la Cour d'Appel de Montpellier le jeudi 11 juin prochain.

Un choc pour la famille de la victime

Maître Jean-Marc Darrigade, présent à l'audience de ce matin, juge "inévitable" la remise en liberté d'Audrey Louvet. L'avocat, qui représente le frère de la victime, partie civile dans ce dossier, a dû préparer la famille à cette éventualité :

Pour la famille, c'est incompréhensible, même si la loi doit s'appliquer. J'ai préparé psychologiquement M. Isoird, frère de la victime, à ce choc. Car Audrey Louvet a quand même reconnu sa participation à des faits d'une extrême gravité.

Un choc d'autant plus difficile à amortir que la date du procès est lointaine, puisqu'il a été repoussé à janvier 2021.
 

Un corps Carbonisé dans une grotte

L'affaire de la grotte sanglante de Sète avait provoqué une grande émotion et suscite, depuis, l'intérêt des médias.

Le 17 juillet 2014, le corps en partie calciné de Patrick Isoird était retrouvé dans une galerie souterraine du bas du mont Saint-Clair, à Sète. Le Sétois avait été abattu de 2 balles.

Rémi Chesne, un coiffeur de 49 ans et Audrey Louvet, qui aurait servi d’appât, devaient être jugés devant la cour d’Assises de l’Hérault du 19 au 27 mars 2020, soit la première semaine du confinement lié à la crise sanitaire du coronavirus.


La vengeance comme mobile ?

L'enquête menée par le SRPJ de Montpellier a conclu que Patrick Isoird avait été attiré dans cette galerie creusée à même la roche et située près du rond-point du Vignerai à Sète par Audrey Louvet, une jeune femme qui lui a fait miroiter un rendez-vous galant, à la demande d'un coiffeur à domicile de Sète, Rémi Chesne, 49 ans.
 


Ce dernier aurait ainsi voulu se venger, plusieurs années après avoir découvert l'existence d'une brève liaison entre sa propre épouse et Patrick Isoird. Une épouse décédée en 2009. Elle se serait suicidée, ce dont doute aujourd'hui sa famille.


L'un nie, l'autre avoue

Si Rémi Chesne, mis en examen pour assassinat, nie catégoriquement toute implication dans ce crime, Audrey Louvet, poursuivie pour "complicité d'assassinat", affirme avoir conduit la victime sur place à la demande de Rémi Chesne, mais sans connaître le sort funeste qui l'attendait. Pour son avocat, maître Gérard Christol, sa cliente est sincère :

Pour moi, les choses sont lumineuses : elle n’a jamais menti mais, au début, terrorisée, elle a fait des révélations à minima. Puis je l’ai convaincue de tout dire.


Les écoutes téléphoniques réalisées durant l'enquête prouveraient l’existence de liens entre elle, Rémi Chesne et Patrick Isoird.


Audrey Louvet savait-elle le sort qui attendait la victime ?

La ligne de défense de l'avocat d'Audrey Louvet se base sur l'ignorance du sort funeste qui attendait Patrick Isoird :

Elle se doutait que tout ça n’était pas clair, mais de là à penser à un assassinat ! Elle n’avait aucune conscience de ce qui allait se passer. Or, pour qu’il y ait complicité, il faut qu’il y ait conscience de la volonté d’assassinat.

Rebondissement en 2018

En 2018, un mégot qui avait été retrouvé près des lieux du drame en 2014 oriente les enquêteurs vers une autre piste : celle d'un individu originaire de Lyon et impliqué dans trois procédures criminelles de stupéfiants et de séquestration. 

Mais son ADN et celui retrouvé sur le mégot ne sont que partiellement identiques et il s'est finalement avéré que le Lyonnais n’avait jamais mis les pieds dans la grotte.

La fausse piste du mégot ?

L'identité du fumeur du mégot reste donc une énigme, sachant toutefois que le lieu, isolé derrière le chantier de construction d'un immeuble laissé en suspens depuis plusieurs années, était réputé être un endroit de rencontre très fréquenté avant le crime.
 

Les aveux d'Audrey Louvet à l'issue de la reconstitution

A l’issue d’une reconstitution en 2017, Audrey Louvet a reconnu avoir attiré Patrick Isoird sur une profondeur d'une cinquantaine de mètres dans la grotte, repérée selon elle au préalable le matin du 23 juin 2014 avec Rémi Chesne.

Ce dernier aurait alors surgi armé, lampe torche à la main, le visage masqué. Avec le fusil, l’ex-coiffeur aurait intimé l’ordre à la jeune femme de ligoter la victime avec du ruban adhésif. Elle lui aurait ensuite mis une cagoule ou un sac sur la tête avant de le dépouiller de ses biens, notamment un pavois en or que le Sétois portait en pendentif, puis l’aurait fait entrer dans une cavité, là où le corps a été retrouvé.

Depuis, elle maintient être partie à ce moment-là et n’avoir entendu aucun coup de feu. Selon son avocat, maître Gérard Christol : "la géolocalisation montre que Rémi Chesne était aux abords de la grotte à l’heure du meurtre".

Autre rebondissement, au mois de juin de cette même année 2017 : le père de Nadège Chesne dépose plainte pour meurtre, suspectant son ex-gendre Rémi Chesne d'avoir mis en scène le suicide de sa fille. 

Rémi Chesne est défendu par Luc Abratkiewicz et Franck Berton. Maîtres Gérard Christol et Eva Fournier sont les avocats d’Audrey Louvet. La famille de Patrick Isoird est représentée par Jean-Marc Darrigade.




 

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