La morille, ce champignon de luxe d'ordinaire importé, est désormais cultivée dans l'Hérault. Daniel David, myciculteur à Béziers, s'est lancé il y a deux ans et demi et ramasse cet hiver sa première récolte, qui fait déjà l'unanimité.
Pour Daniel David, c'est l'heure de la toute première récolte. À l'abri de ses serres, cet agriculteur cultive un produit bien particulier : des morilles, l'un des rares champignons à se prêter à une culture artificielle.
Cet hiver est, pour ce myciculteur, la concrétisation de deux ans et demi de travail. S'il a décidé de se lancer, alors que la culture des morilles n'est pas encore très répandue en France, c'est avant tout "pour la passion du champignon", mais aussi car ce professionnel cherchait "une culture qui sorte de l'ordinaire".
Une culture technique et exigeante
Cultiver des morilles n'est en effet pas de tout repos. "C'est assez technique, il y a beaucoup de paramètres à gérer, comme l'humidité, le pH du sol... explique le champignonniste. Ici, on gère tout grâce à notre arrosage par pulvérisations. On a recréé un sous-bois." Aucun engrais n'est ajouté, pour récolter des champignons "comme si on les trouvait dans les bois".
Une goutte d'eau en trop, si elle tombe sur une petite morille, peut l'abîmer et ruiner une récolte.
Daniel DavidMyciculteur chez Champi d'Oc
La morille est un champignon délicat, qui demande une attention de tous les instants. Formé par l'entreprise française France Morilles, Daniel David connaît son sujet sur le bout des doigts. "Pour savoir si une morille est prête, il faut regarder son chapeau. Si les alvéoles sont assez ouvertes, assez éclatées, c'est qu'elle est à maturité."
Généralement semé en novembre, ce champignon se récolte entre février et mars. Courbé au milieu de ses rangées de morilles, Daniel David en ramasse quotidiennement en ce début mars, afin de les livrer à ses clients.
Patrick Olry est l'un d'entre eux. Ce chef cuisinier, installé à une dizaine de kilomètres à peine, propose des morilles à la carte de son restaurant, l'Ambassade. Pour ce Biterrois, la première récolte du myciculteur est de qualité. "On reconnaît une bonne morille à sa texture, c'est une matière très velours au toucher, détaille le chef cuisinier. Il faut aussi qu'elle donne envie et là, si vous les regardez, ça donne envie ! Il n'y a pas photo."
C'est du producteur au consommateur. En plus, on connaît le producteur, donc c'est parfait.
Patrick OlryChef cuisinier et gérant du restaurant l'Ambassade
Au-delà de la qualité du produit, avoir une filière française et une production en circuit court permet de limiter les importations, et donc l'impact sur l'environnement et sur le produit lui-même. Aujourd'hui, la majorité des morilles viennent d'Amérique du Sud, du Canada, ou encore d'Inde. "Je ne dénigre pas ces produits, désamorce Patrick Olry, mais les manipuler, les transporter sur des palettes, les déconditionner, ce n'est pas bon. Avoir une filière en France, c'est très bien, parce qu'on va rester local !"
Un engouement pour la production locale
Les produits en circuits courts ont la cote, et Daniel David remarque déjà une hausse de la demande pour ses morilles sous serre. "Je sens un vrai engouement, au niveau de la restauration locale, mais aussi des particuliers, se satisfait le champignonniste, fier du travail accompli. Je suis appelé de plus en plus par des familles qui me demandent quelques centaines de grammes de morilles, c'est ça tous les jours !"
Face à la demande, le myciculteur biterrois envisage de quadrupler sa production d'ici à l'année prochaine. À 160 euros le kilo, la morille est aujourd'hui le deuxième champignon le plus cher, juste derrière la truffe.