Alors que les grands travaux se poursuivent du côté de Notre-Dame de Paris, une des pièces maîtresses est toujours en réparation : c’est le grand orgue avec ses 8.000 tuyaux et ses 115 jeux. Un instrument exceptionnel qui date du 18ème siècle. Une partie de la restauration du plus grand orgue de France a été confié à la Manufacture Languedocienne des Grands Orgues à Lodève.
Dans une vieille bâtisse, les facteurs d’orgue de la manufacture de Lodève s’attèlent à rénover un trésor.
Epargné par les flammes, il a été pollué par les particules de monoxyde de plomb qui s’y sont infiltrés et a souffert de variations thermiques après l’incendie qui s’est produit le 15 avril 2019.
Sa décontamination, son nettoyage et sa révision complète ont commencé depuis l’automne chez 3 facteurs d’orgue associés dans l’Hérault, en Corrèze et dans le Vaucluse.
L'orgue de Notre-Dame de Paris sera comme neuf et réaccordé en 2024, pour l'inauguration de la cathédrale totalement restaurée.
Les 19 "sommiers" restaurés dans l'Hérault
A Lodève, les 7 facteurs d’orgue ont reçu, fin 2021, la délicate mission de faire renaître le cœur de l’instrument. Ils sont en charge de réparer les 19 «sommiers». Ce sont les pièces centrales, de grandes pièces plates de bois en chênes sur lesquelles sont posés les tuyaux. Ces sommiers distribuent l’air sous pression aux tuyaux en fonction des touches actionnées et des registres choisis par l’organiste.
Charles Sarelot est à la tête de l’atelier depuis 24 ans et en a vu passer des orgues. Si ce sont les mêmes méthodes et les mêmes matériaux utilisés, cette rénovation est un peu spéciale. C’est le plus grand orgue de France.
C’est une belle expérience. Pour nous c’est imposant
Charles Sarelot, responsable de l'atelier de Lodève.
Un travail de précision
L’une des tâches des facteurs d’orgue de Lodève consiste à remplacer les peaux qui assurent l’étanchéité des éléments du sommier. De l’étanchéité parfaite dépend la fiabilité de l’instrument et la stabilité de l’accord.
«Nous travaillons avec de la peau de mouton très fine, de l’ordre d’un millimètre d’épaisseur pour que l’air ne sorte qu’au niveau de la note» explique Olivier Henry, facteur d’orgue.
Le travail est réalisé avec de la colle de poisson. Un savoir-faire qui n’a pas évolué au fil des siècles. Ensuite, il faut ajuster les soupapes qui donneront la note, nettoyer les bois qui datent de 1867, les repositionner et chasser les fuites d’air. Un travail long et minutieux qui se joue au millimètre près, pour que la note soit parfaite.
Pour chaque sommier, il faut compter 250 heures de travail. Cela mobilise 2 personnes à temps plein. La rénovation des 19 sommiers doit se terminer fin septembre.
«Notre-Dame, c’est l'affaire de la France entière»
Le général Jean-Louis Georgelin a été désigné par le Président Emmanuel Macron pour diriger l'Etablissement public chargé de la conservation et de la restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris.
Il était en visite cette semaine à la Manufacture languedocienne des grandes orgues lodévoise.
«C’est bien de voir les sommiers d’un des orgues les plus extraordinaires du monde qui ressuscitent à Lodève. Et de montrer que la rénovation de Notre-Dame de Paris, ce n’est pas qu’une affaire de Paris mais une affaire de la France. On sera aux anges quand on entendra dans la cathédrale le son absolument merveilleux de cet orgue».
Jean-Louis Georgelin.
Mais avant cela, l’instrument sera réassemblé en 2023, avant d’être réaccordé durant 6 mois, de nuit, pour éviter le parasitage des bruits du chantier. Ce n’est qu’en 2024, lors de la réouverture annoncée de la cathédrale, que la voix de l’emblématique église parisienne résonnera de nouveau au cœur de la capitale.