Dès le 14 mars, le refuge de Villeneuve-lès-Maguelone, qui gère à la fois la fourrière et les animaux à adopter, a fermé ses portes au public tout en continuant à fonctionner. Avec l’allongement de la durée du confinement, la direction souhaite reprendre les adoptions.
A Villeneuve-les-Maguelone, près de Montpellier, la dynamique Annie Benezech, présidente de l'association qui gère la Société protectrice des animaux (SPA) et la fourrière de l'agglomération montpelliéraine, est très remontée.
Avec son franc parler habituel, cette grande dame brune le martèle: "il n’y aura pas d’euthanasie d’animaux ici. On ne peut pas nous demander d’euthanasier les animaux, je ne le ferai jamais".
Cela fait 20 ans qu’on n’a pas euthanasié un animal ici, je ne le ferai pas, il n’en est pas question.
Des refuges en tension en France
Au niveau national, depuis quelques jours, la SPA a, en effet, fait part de son inquiétude pour la situation des animaux abandonnés en France. "Les refuges arrivent à saturation. Depuis un mois, il n'y a plus d'adoption possible, les refuges sont fermés au public, en raison du confinement. Et nous continuons bien-sûr à récupérer les animaux de la fourrière."
Après 8 jours en fourrière sans que personne ne se manifeste pour les récupérer ou sans possibilité de retrouver leurs propriétaires, les aimaux sont officiellement déclarés abandonnés. C'est la loi.
La Société protectrice des animaux a donc lancé une pétition pour demander au gouvernement l'autorisation de reprendre les adoptions, en tenant compte des mesures sanitaires, gestes barrières et autre distanciation sociale nécessaires pour lutter contre la pandémie de coronavirus.
"Nous demandons au ministre de l'agriculture dont nous dépendons, un processus d'adoption solidaire", explique la direction nationale de la SPA.
Toutes les règles que le gouvernement nous demandera de respecter, nous les accepterons, nous nous adapterons : il faut que les adoptions reprennent.
"Il faut reprendre les adoptions"
A Villeneuve-lès-Maguelone, dans l'Hérault, si Annie Bénézech et son équipe sont si en colère, c'est parce que, depuis le début du confinement, toutes les décisions ont été prises pour répondre aux demandes du gouvernement.
Mais, qu'en retour, les pouvoirs publics ne leur font pas confiance pour gérer les adoptions, avec toutes les précautions nécessaires.
On a tenu un mois, ça va être difficile de tenir un mois de plus sans adoptions.
"Maintenant, il faut que les pouvoirs publics nous fassent confiance et que l'on puisse reprendre les adoptions rapidement. On ne pourra pas tenir encore plusieurs semaines comme ça et on ne sacrifiera pas les animaux."
"Je suis très remontée parce qu’on ne nous fait pas confiance, on n’a pas envie d’être malade, ni de transmettre le virus, évidemment mais je le répète, il n’est pas question pour nous de faire des euthanasies."Il faut que les pouvoirs publics nous fassent confiance.
Pour la présidente de l'association, des solutions existent pour reprendre les adoptions, en respectant les normes sanitaires strictes, avec l'aide du site internet et des appels en vidéo par exemple.
"On a un site internet, avec photo et description du caractère et du comportement de l’animal", explique t-elle, "il y a des gens intéressés pour adopter des animaux, on le sait. On peut, par exemple, discuter avec les personnes par mail puis en visio, c’est simple à faire".
Et Annie Bénézech de détailler les solutions déjà imaginées :"On peut organiser des rendez-vous devant la SPA ou utiliser le camion de la SPA avec un salarié pour se rendre dans les familles adoptantes vérifier les conditions d’accueil, puis assurer un suivi à distance, en respectant toujours les distances et les gestes barrières."
Une réorganisation du refuge pour faire face
Dans cette période compliquée, le refuge de Villeneuve-lès-Maguelone a adapté son organisation. Il n'y a plus de bénévoles dans les locaux depuis le 14 mars, seule une partie des salariés, 13 sur 22, est en poste et se relaie tous les jours et 24 heures sur 24 pour prendre soin des animaux.
La fourrière a aussi continué à fonctionner normalement, malgré le confinement. "Et il n’y a pas eu de problèmes", explique Annie Bénézech.
Une cinquantaine de chiens est passée par la fourrière en mars, 60% en sont ressortis.
"Si quelqu’un trouve un chien perdu ou si une personne vient chercher son chien qui s’est échappé, on est bien obligé de rester ouvert. Nous avons respecté les normes sanitaires et les gestes barrières. Personne n’entre à part nous. Et nous respectons la distanciation entre les salariés, au refuge comme à la fourrière."
La SPA de la métropole de Montpellier, qui fonctionne avec une subvention publique, les adoptions et les donations des particuliers, a lancé un nouvel appel aux dons sur les réseaux sociaux, pour faire face au manque de fonds liés à l'arrêt des adoptions.
Des familles d'accueil en attendant
Catherine Villenave, la responsable des soins de la SPA de Villeneuve-lès Maguelone, a réussi, aidée par le réseau des bénévoles, à placer dans des familles d'accueil près de 50 chiens, souvent choisis parmi les plus fragiles, notamment ceux qui nécessitent le plus de soins, parce qu'ils sont âgés."En deux-trois jours, dans l'urgence, avant le confinement, Catherine a réussi à trouver une famille d’accueil pour 48 chiens, explique Anna, l'une des bénévoles qui suit désormais la vie du refuge à travers les réseaux sociaux.
"Pour les chats, il n'y en avait pas trop, ce n'est pas la période de reproduction avec l'arrivée de chatons. Pour les chiens, les boxes étaient pleins, cette solution nous a vraiment rassurés."
Avec les familles d'accueil, on sait que les chiens sont choyés, sortis régulièrement. Et les salariés du refuge peuvent consacrer leur temps à soigner ceux qui restent.
A Saint-Jean-de Védas, la sœur d'Anna, fait partie de ces familles d'accueil d'urgence. A la retraite, Rosa adore les animaux, elle a déjà un chien, un chat et un jardin.
Quand sa sœur lui a proposé de prendre un chien, Rosa a accepté tout de suite et s'est rendue au rendez-vous donné par le refuge avec sa carte d’identité et un justificatif de domicile.
"Avec le confinement annoncé, je me suis dit que j'aurais du temps pour m'occuper d’un animal de plus. Et ça me faisait mal au cœur d'imaginer les chiens en cage, avec moins de promenades, sans les bénévoles, toute la journée.
Depuis 3 semaines, Rosa prends soin de Billy Boy, un épagneul de 11 ans, avec des problèmes cardiaques et "gentil comme tout".
La SPA l'appelle régulièrement pour prendre des nouvelles du chien.
Quand tu vois les yeux de Billy Boy, tu ne peux pas le remettre en cage.
Rosa et son mari ont d'ailleurs déjà décidé de garder le vieil épagneul et de l'adopter dès que possible.
Le plus tôt possible, comme dirait Annie Bénézech.