Les universités ne pourraient rouvrir qu'en février, selon le plan de déconfinement annoncé mardi par Emmanuel Macron. Inquiets d'un décrochage scolaire massif, notamment des étudiants de première année, les présidents d'université demandent une réouverture progressive dès janvier.
Les universités ne rouvriront pas avant le mois de février. C'est ce qu'a annoncé le président de la République lors de son allocution du 24 novembre. Une date aussi vague que lointaine pour la communauté universitaire.
Associé à d'autres présidents d'université, Philippe Augé, président de l'Université de Montpellier, demande une réouverture des établissements au début du mois de janvier à la ministre de l'Enseignement supérieur Frédérique Vidal.
?@Univ_Paris s'engage aux côtés de @univamu @psl_univ @Sorbonne_Univ_ @UnivLyon1 @uca_research @univbordeaux @Univ_Paris @unistra @UGrenobleAlpes @UnivParisSaclay pour une réouverture des universités aux étudiants en janvier avec jauge à 50%. 3/3#NosEtudiantsOntBesoinDeNous
— Université de Paris (@Univ_Paris) November 27, 2020
"Nous sommes conscients du problème sanitaire, mais nous sommes confrontés à des risques psychiques et de décrochage", explique Philippe Augé.
Concrètement, il s'agirait "d'une réouverture progressive, et non massive", avec des groupes à effectifs réduits et un protocole sanitaire strict.
En janvier, nous devons éviter cette situation absurde où nos étudiants pourront se rendre partout à Montpellier, sauf à l'université !
Le spectre du décrochage
Hormis quelques travaux pratiques, tous les cours ont lieu à distance depuis le 30 octobre. Pour beaucoup d'étudiants et de professeurs, cette séparation n'est que la prolongation de celle du printemps. "Faut-il rappeler que, depuis mars dernier, les étudiants n’ont pu venir à l’université que quelques semaines ?" s'interroge dans un communiqué l'Alliance des Université de Recherche et de Formation (Auref). Au total, cela fait près de huit mois sans cours en présentiel. Les efforts des uns et des autres pour maintenir la "continuité pédagogique" ne suffisent pas à empêcher une forme de décrochage. Les présidents d'université s'inquiètent particulièrement des résultats lors des examens à venir, au vu de l'absentéisme.
"On l'observe à partir des connexions en Zoom, on a entre 50 et 60% des effectifs. Où sont les autres étudiants ?"
Alexandre Dézé organise régulièrement des échanges informels avec ses étudiants. "Ils n'ont qu'une envie, c'est de pouvoir revenir à l'université".
Le cas des étudiants de première année est particulièrement préoccupant. "Le passage du lycée à la fac est difficile, mais là c'est extrêmement compliqué, avec ce stress supplémentaire. Ils sont jeunes, ils ne sont pas armés pour ça."
Des étudiants en première année livrés à eux-mêmes
La même cohorte d'élèves a vécu la première année de la réforme du baccalauréat, le confinement, et l'entrée "distancielle" dans l'enseignement supérieur. "On en a un peu marre d'être des cobayes", soupire Yanis, 18 ans, étudiant en PASS (Parcours Spécifique Santé) à l'Université de Montpellier. Dès le mois de septembre, un cluster identifié à la faculté de médecine provoque sa fermeture. Le jeune homme n'aura eu qu'un mois pour découvrir ce qu'est la vie étudiante. Aller à la bibliothèque, travailler en groupe, et sortir pour décompresser... "C'est fini tout ça", résume-t-il.
J'apprenais beaucoup mieux quand je pouvais aller à l'université. Là, il faut comprendre les cours en étant seul pendant 7 ou 8 heures devant un écran.
Aujourd'hui, Yanis raconte avoir des céphalées de tension, en partie causées par son rythme de travail très soutenu. "Parfois, il y a tellement de choses à faire que je ne sais pas par où commencer. Ça donne envie de balancer l'ordinateur", plaisante-t-il à moitié. C'est surtout la suite qui inquiète le jeune étudiant. Les partiels, début janvier, semblent être maintenus. "Je rafraîchis mes mails pour avoir des nouvelles, mais pour l'instant, on ne sait pas".
Depuis la fermeture des universités, Marine a du mal à trouver du sens à l'enseignement à distance. Etudiante en première année d'arts plastiques à l'université Paul Valéry, elle s'inquiète elle aussi pour ses notes, et sent sa motivation décliner. "Au lycée, on était suivi, mais là, c'est difficile de s'y mettre seule, au milieu de toutes les distractions qui existent !"
Pour Yanis et Marine, pouvoir revenir à l'université serait le bout du tunnel. "Si ça continuait à distance l'année prochaine, je ne pourrais pas !", annonce d'ores et déjà le jeune homme. "Se rendre sur place, c'est se mettre dans une ambiance de travail, ça changerait tout", espère l'étudiante en arts.
La ministre de l'Enseignement supérieur devrait échanger avec les présidents d'université au cours de la semaine prochaine.