Les assistantes sociales de l'éducation nationale rejoignent la grève des fonctionnaires, mardi. "Oubliée" des dernières revalorisations salariales, la profession manque de moyens face à l'accroissement des difficultés rencontrées par les élèves et leurs parents. En poste à Montpellier, Isabelle Chabbert porte le combat d'un métier "invisibilisé".
"Gabriel Attal aura au moins réussi à nous fédérer spontanément", ironise Isabelle Chabbert. Comme l'ensemble de ses collègues, l'assistante sociale scolaire rejoint la mobilisation nationale des fonctionnaires, ce mardi 19 mars 2024.
"Toute la profession mobilisée, ce n'était pas arrivé depuis 10 ans", se félicite cette cinquantenaire, rare assistante sociale scolaire syndiquée dans ce corps de métier féminisé à 98%, placé "historiquement et structurellement au service des autres".
"La goutte d'eau"
Ce qui change la donne en 2024 - au point de pousser les assistantes sociales scolaires à reconduire une seconde grève le 22 mars -, c'est le discours de politique générale du Premier ministre, "la goutte d'eau qui fait déborder le vase" selon un communiqué de presse de l'intersyndicale.
Le 30 janvier, devant l'Assemblée nationale, Gabriel Attal annonce la revalorisation des salaires des fonctionnaires de l'éducation nationale, mais sans citer les assistantes sociales, suscitant alors "l'indignation" de la profession.
"Oubliées", elles le sont aussi de primes prévues par le Segur de la santé, quand "l'essentiel" de leurs missions concerne pourtant la protection de l'enfance, selon Isabelle Chabbert.
Masque blanc sur le visage
Les assistantes sociales de l'éducation nationale interviennent auprès des élèves, des étudiants et du personnel.
Signalement d'enfants en danger auprès de la justice, accompagnement de parents en difficulté financière ou administrative et lutte contre le décrochage scolaire sont autant de missions qu'elles assurent par exemple dans le premier et le second degré.
Sous une banderole "assistantes sociales en colère", elles ont participé à la manifestation prévue à 14h, depius la place Albert 1er à Montpellier. Certaines avaient le visage recouvert d'un masque blanc, signe qu'elles sont "invisibilisées", illustre encore Isabelle Chabbert.
Seule pour 3 000 élèves
En plus d'une revalorisation salariale, les assistantes sociales réclament davantage de moyens alloués à leurs missions. Et ce,"à l'heure où tous les experts parlent de l'accroissement des violences faites aux enfants", "où de plus en plus d'élèves ne mangent pas à leur faim", "où le cyberharcèlement dévaste la population adolescente", énumère la professionnelle du lycée Jean Mermoz de Montpellier.
Dans cet établissement, elle est seule en poste pour 3000 élèves. "Je ne fais que du traitement d'urgence", déplore l'assistante sociale, contrainte, par manque de temps, de laisser de côté les pans de ses missions dédiés à la prévention et à "l'accompagnement face aux maux de l'adolescence".
Aucun poste ouvert dans l'Hérault en dix ans
On ne peut pas aller marteler sur tous les plateaux télé que deux enfants par classe subissent des violences sexuelles, que leur parole doit être libérée, sans donner aux établissements les outils humains pour la recueillir.
Isabelle Chabbert, assistante sociale au lycée Jean Mermoz de Montpellier
Toutes les assistances sociales de l'Hérault travaillent au moins dans deux établissements différents. Certains n'ont pas d'assistante sociale attitrée : ils font partie d'un réseau d'urgence dans lesquels les professionnelles interviennent ponctuellement.
Selon Isabelle Chabbert, pour que les missions basiques de son métier puissent être assurées, dix assistantes sociales supplémentaires devraient théoriquement être nommées dans l'Hérault. Mais aucun poste n'a été ouvert dans le département ces dix dernières années.