Présentée jusque-là à Rome, cette oeuvre du peintre baroque italien sera bientôt visible au musée Fabre de Montpellier. La toile hommage au Caravage vient enrichir les collections des peintures du XVIIe siècle.
Cette semaine, un accrochage inédit a été réalisé au musée Fabre de Montpellier avant son ouverture au public.
L'oeuvre spectaculaire de Filippo Vitale, Judith et Holopherne, un don de Didier Malka, avocat au barreau de Paris, collectionneur, amateur de peinture italienne, a trouvé sa place au sein de l'exposition temporaire La Beauté en partage, 15 ans d'acquisitions au musée Fabre, visible jusqu'au 6 mars 2022.
Ce tableau donne une idée forte du goût pour les scènes violentes inspirées de la Bible dans la peinture italienne du XVIIe siècle. Cette acquisition récente du musée Fabre contribue à enrichir sa prestigieuse collection de peinture italienne, au cœur de l’identité de l’établissement depuis sa fondation en 1825, et pleinement mise en lumière par la publication de son catalogue exhaustif en 2020.
"Judith et Holopherne" peint vers 1598
Filippo Vitale est âgé d'une quinzaine d'année lorsque Caravage (1571-1610) effectue ses deux séjours napolitains, en 1606-1607, puis à nouveau en 1609-1610. La présence de l'artiste et les importantes toiles qu'il laisse dans la cité ont une influence décisive sur les peintres actifs dans la ville, qui se convertissent à sa manière.
C'est notamment le cas de Vitale, élève de Carlo Sellito (1581-1614) qui démontre son allégeance précoce au caravagisme dans son Sacrifice d'Isaac (vers 1615, Naples, musée de Capodimonte) ou son Souper à Emmaüs (Pau, musée des Beaux-Arts).
Dans sa Libération de saint Pierre (avant 1618, Nantes, musée d'arts), scène peinte à mi-corps au clair-obscur radical, l'influence du tableau de même sujet de Battistelo Carraciolo (1578-1635), suiveur le plus sévère et le plus radical de Caravage à Naples, est également indéniable (1615, Naples, église du Pio Monte della Misericordia), bien que Vitale apporte une pointe de douceur et de bienveillance à son naturalisme.
Vitale compose une image spectaculaire, qui n'hésite pas à mêler une violence crue à un riche coloris séduisant. La Judith et Holopherne s'inscrit dans le sillage des deux versions exécutées par Caravage de ce sujet violent. Le peintre a sans aucun doute connu la seconde version peinte par Caravage à Naples, connue par une copie (Naples, Palazzo Zevalos) et une autre version à l'attribution particulièrement disputée. Vitale représente le même moment que celui, très original, que Caravage avait choisi : l’instant où Holopherne prenant conscience de l’imminence de sa mort, pousse un hurlement de douleur et de terreur, avant d’expirer.
L'organisation générale de l'image est la même : les personnages à mi-corps, le général philistin à gauche, l'héroïne juive au centre et sa servante à droite, avec une grande draperie rouge en toile de fonds pour de servir de décor au drame. L'artiste se plait à confronter la carrure démesurée d'Holopherne, notamment ses énormes mains, aux gestes tempérés de Judith, dont la physionomie apaisée répond, par contraste, au visage ridé de la vieille servante qui s'apprête à recueillir dans un sac le trophée de sa maîtresse : la tête d'Holopherne.
Vitale a construit une peinture d'une forte originalité, où se mêlent violence et élégance.