Occitanie : baisse de 48% des passages aux Urgences hors Covid pendant le confinement, l'inquiétude des médecins

Un rapport de l'Observatoire Régional des Urgences Occitanie pointe une baisse importante des passages aux urgences pour de nombreuses pathologies non Covid pendant le confinement. Un constat qui inquiète les professionnels de santé. Ils incitent les malades à continuer à se soigner.

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Renoncer à se faire soigner par crainte d'attraper le Covid-19, c'est le constat d'une étude menée par l 'Observatoire Régional des Urgences Occitanie.

Cet organisme met en avant une baisse considérable des passages aux urgences en dehors de l'activité liée au coronavirus, pendant la période du confinement : -48% en moyenne en Occitanie sur cette période (du 17 mars au 11 mai) par rapport à l'année 2019.

La baisse de passage concerne surtout les pathologies bénignes. Ce sont les petites traumatologies de manière générale qui ont subi le plus gros taux de baisse.

Hervé Mourou, médecin coordinateur à l'Observatoire Régional des Urgences Occitanie


Sur cette période, 2.492 passages aux urgences ont été enregistrés contre 4.874 aux mêmes dates en 2019.

Activité des urgences modifiée

En conséquence, l'activité des urgences, largement monopolisée par celle liée à l'épidémie de coronavirus, a fortement été modifiée :
  • population plus âgée
  • patients un peu plus graves
  • hospitalisations en hausse

On remarque par exemple que pendant le confinement, les accidents de la circulation ont fortement diminué. Il y avait donc moins de traumatologies qui concernaient des accidents de la route mais en revanche plus de traumatologies liées à des accidents domestiques.

Hervé Mourou, médecin coordinateur à l'Observatoire Régional des Urgences Occitanie

Les moins de 15 ans davantage concernés

Si cette chute des passages durant le confinement a été observée pour l’ensemble des classes d’âge, celle-ci est beaucoup plus marquée en pédiatrie. Elle est moindre en gériatrie.

Les moins de 15 ans sont les plus concernés par cette baisse, elle est de 69% pour cette tranche d'âge. Les 15-74 ans accusent eux une baisse moindre de 44%. Enfin pour les plus de 75 ans, celle-ci est de 36%.
Un phénomène qui pourrait s'expliquer en grande partie par la fermeture des écoles selon le docteur Hervé Mourou. 

Même constat dans les cabinets médicaux

Jean-Christophe Calmes, vice-président du syndicat MG France et lui-même médecin à Frontignan, a également noté une baisse d'activité dans les cabinets médicaux de l'Hérault pendant le confinement. Selon lui, deux facteurs majeurs sont en cause dans cette baisse des consultations : 
  • la peur de se rendre dans des lieux potentiellement contaminés 
  • les consultations désormais uniquement sur rendez-vous

On a tous des patients dont l'état aurait nécessité des soins rapidement. Il y a des choses qui pouvaient attendre, mais d’autres où il fallait une prise en charge rapide. C’est le cas notamment des douleurs thoraciques qui peuvent entraîner ensuite un infarctus. Il faut absolument que ces malades n’hésitent pas à aller dans les cabinets médicaux ou aux Urgences car leur situation peut s’aggraver.

Jean-Christophe Calmes, médecin à Frontignan et vice-président du syndicat MG France

Il ajoute, "il faut dire aux gens que le médecin généraliste est là. Il reste ouvert et il est toujours disponible pour accueillir les malades. Il est important que les patients chroniques continuent à consulter régulièrement les médecins, c’est essentiel". 

Un impact important sur les pathologies cardiaques

Le docteur Fabien Huet, chef de clinique au CHU de Montpellier au sein du service cardiologie et maladies vasculaires s'est d'ailleurs lui penché sur l’impact des mesures de confinement sur les admissions cardiovasculaires en France. Avec une dizaine d'autres professionnels, il a rédigé une étude intitulée, "un train peut en cacher un autre: les urgences cardiovasculaires pourraient être négligées en raison de la pandémie à Covid-19".

On a demandé à 9 centres français de répertorier le nombre de patients qu’ils avaient par jour et leurs différentes pathologies et de regarder pendant deux semaines à partir du 17 mars, l’évolution de ces chiffres. En moyenne, dans chaque unité de soins intensifs, environ 5 patients par jour étaient admis contre 2,6 par jour après le confinement.

Fabien Huet, chef de clinique au CHU de Montpellier, service cardiologie et maladies vasculaires

Un constat inquiétant pour ces professionnels qui ont vu des patients admis avec des complications importantes, parfois historiques, en raison d'une prise en charge trop tardive. Ils écrivent dans cette étude, "nous pensons qu’il est temps d’alerter sur le risque pour les patients présentant une maladie cardiovasculaire aiguë, de souffrir du manque d’attention, entraînant des conséquences graves (augmentation du nombre d’infarctus du myocarde ambulatoires, conduisant à une augmentation du nombre d’arrêts cardiaques, décès inexpliqués, insuffisance cardiaque, etc.)".

Selon eux, il est indispensable de ne pas négliger les autres pathologies au profit du coronavirus. 

"Il ne faut pas avoir peur de se rendre à l'hôpital"

Cet effet collatéral évident du Covid-19 inquiète aujourd'hui les professionnels qui tentent de rassurer les malades. 

Il ne faut pas que les gens aient peur de venir à l’hôpital, de venir consulter, car tout retard peut être préjudiciable. Même si c’est compliqué, on essayera de trouver les solutions. Surtout, attendez qu’on vous contacte si vous avez une activité qui est programmé au CHU, ne prenez pas l’initiative de l’annuler.

Thomas Le Ludec, Directeur général du CHU de Montpellier

La direction du CHU de Montpellier rappelle qu'un circuit dédié et sécurisé de prise en charge des urgences hors Covid a été mis en place à l'hôpital, les patients ne se croisent pas.

Selon ces professionnels, cette baisse considérable des passages aux urgences hors Covid-19 s'explique par différentes raisons. "La peur a dû influencer cette baisse parce qu’on a vu à la sortie du confinement, des patients plus graves, qui auraient pu être pris en charge plus tôt. Il y avait aussi le fait que les hôpitaux étaient en tension, cela a dû également inciter les gens à ne pas s’y rendre", détaille Hervé Mourou.

Aujourd'hui, l'activité dans les urgences hors Covid-19, n'a toujours pas retrouvé son cours normal. Selon l'Observatoire Régional des Urgences Occitanie, elle est toujours inférieure de 10% environ par rapport à l'année 2019.
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