Près de Montpellier : un chêne remarquable de 150 ans sème la discorde à Castelnau-le-Lez

Un arrêté municipal prévoit des travaux d'élagage sur un chêne centenaire rue de Salaison, à Castelnau-le-Lez (34), dans le cadre d'un projet immobilier. Les riverains s'y opposent et alertent sur le danger potentiel pour cet arbre "remarquable", ce que conteste le maire.

Une mobilisation aura lieu, jeudi 5 novembre, pour protéger un chêne vert "remarquable" qui trône depuis 150 ans dans une impasse de Castelnau-le-Lez, près de Montpellier. Un arrêté municipal a annoncé lundi des "travaux d'entretien" sur cet arbre afin de faire passer des engins de chantier dans le cadre d'une construction immobilière en contre-bas. Un élagage "illégal" selon les propriétaires, qui irait à l'encontre des recommandations de l'Office National des Forêts.

Une vingtaine de riverains seront présents, dès 7h, pour s'opposer à ces travaux, appuyés par des élus de Montpellier et de la Métropole qui devraient faire le déplacement.  

Une "simple coupe de cheveux" ou un danger de mort ?

Monumental et en bonne santé, l'arbre centenaire a été décrit selon plusieurs experts comme remarquable. Mesurant 15 mètres de haut, il pourrait vivre encore plusieurs siècles. Mais surtout, le chêne abrite un insecte protégé par la Convention de Berne : le Grand Capricorne. Il est donc, lui aussi, théoriquement protégé. Ce qui n'empêche pas les travaux de voirie, sur ce chemin appartenant à la commune, de continuer. Pour les riverains "cet élagage massif va déséquilibrer l’arbre, endommager sa santé et provoquer sa mort prématurée".
 

Le maire (LR) de Castelnau-le-Lez et vice-président de la Métropole en charge de la voirie, Frédéric Lafforgue, se veut rassurant. "On va couper 4 à 5 centimètres, c'est comme si vous alliez chez le coiffeur", affirme l'élu. "Un ingénieur de l'ONF sera sur place pour vérifier que tout se passe bien et un huissier sera même présent pour comparer l'état de l'arbre avant et après les travaux".

Mais les petits-enfants de la famille Bedos, propriétaire depuis 60 ans de la parcelle sur laquelle s'épanouit cet arbre, n'y croient pas. "Les engins de chantier font 4 mètres, là on a 2 mètres de hauteur. Il faudrait retirer encore 2 mètres au moins de branche : on ne touche pas à des brindilles, mais à des branches essentielles pour maintenir sa bonne santé" estime Christophe Menichetti.

Cet élagage est par ailleurs illégal, selon la petite-fille de la propriétaire, Karine Menichetti. La commune est tenue de mettre en demeure les propriétaires avant d'intervenir, et la famille n'a pas donné son accord.  

Un projet immobilier bloqué depuis 2014

À l'origine de la fronde : un projet immobilier de 29 logements, dans une carrière située derrière cette impasse, dont le permis de construire à été délivré en 2014. Le bâtiment ne pose pas de problème à la famille Bedos. Mais les aménagements de la route pour accéder au chantier, qui passent devant ce chêne, sont problématiques. Ils prévoient l'élargissement et la bétonisation de cette impasse, jusqu'ici restée très brut.
 

La famille Bedos a contesté ce projet immobilier jusqu'au Conseil d'Etat, mais a perdu le procès en 2018, malgré l'avis du rapporteur public en leur faveur. L'affaire, relayée par des associations, médias et personnalités comme le photographe Laurent Ballesta en mai 2020, a plusieurs fois secoué la commune. Début octobre, une centaine de personnes s'est rassemblée rue de Salaison pour protester contre la reprise des travaux. Le maire a depuis promis de tout faire pour sauvegarder cet arbre.
 

L'arbre est sauvé. J'ai tout mis en place pour le protéger. On ne détruit pas l'arbre, il faut arrêter ce cinéma.

Frédéric Lafforgue, maire LR de Castelnau-le-Lez

Un arbre bientôt classé remarquable ? 

Un rapport d'expertise de l'ONF, demandé par la commune et rendu en septembre dernier, recommande de n'effectuer aucune action de "taille, coupe racinaire et/ou tout impact de travaux (terrassement, déblaiement, chocs de véhicules)" et de "rechercher une alternative à la voie d’accès aux futurs logements du projet en cours" pour permettre la conservation de l’arbre. Mais selon le maire, le nécessaire a été fait pour sa protection : "le promoteur a suivi toutes les préconisations de l'ONF et a arrêté ses travaux pendant quatre mois, le temps de la remise du rapport".
 

La mairie a reçu les riverains pour leur parler des aménagements prévus suite aux conclusions de ce rapport. "Mais il n'y a pas eu de concertation", déplore la famille, qui proposait des solutions alternatives qui n'ont pas été retenues. La Métropole propose de raccorder les logements au réseau d'eau de manière aérienne, de ne sera pas goudronner la chaussée autour du chêne, et de placer une plaque en fonte pour préserver les racines du passage des voitures. Des aménagements que la famille estime irréalisables sur plusieurs points, mais que soutien bec et ongle le patron de la voirie. "Il y a 29 appartements, disons qu'il y aura 40 voitures qui vont passer là par jour, ce n'est pas non plus une autoroute!", s'agace le maire. 

Un recours en référé pour bloquer les travaux

Pour Christophe Merichetti, ce n'est pas la seule voie possible : une ruine pourrait être rachetée pour créer une route qui relierait les nouveaux logements directement à l'avenue George Frêche. Trop chronophage pour le promoteur, dont les logements doivent être livrés d'ici un an et demi. "Ce délai a un impact économique. Il y a des entreprises du BTP qui derrière attendent de faire les travaux", ajoute Frédéric Lafforgue.
 
En désaccord, les propriétaires ont déposé un recours en référé cette semaine afin de s'opposer à l'arrêté. Le tribunal administratif de Montpellier devrait l'étudier ce jeudi. Il pourrait décider de suspendre les travaux le temps de prendre sa décision. 

Par ailleurs, l'association A.R.B.R.E.S, à l'origine du label officiel des arbres remarquables, étudie ce spécimen pour le classer officiellement. Il pourrait être le 5ème arbre classé remarquable dans l'Hérault, après le grand platane de Saint-Guilhem-le-Désert, ce qui le protégerait juridiquement de toute intervention.

Une médiation via la mairie de Montpellier est également possible. Mickäel Delafosse s'est engagé en octobre à recevoir les propriétaires du chêne. À ce jour, la famille attend toujours ce rendez-vous. 
 
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