Face à des professionnels du littoral méditerranéen, des élèves du lycée de la mer Paul-Bousquet de Sète (Hérault) ont émis des inquiétudes sur l’avenir de certaines filières conchylicoles. Y a-t-il encore un horizon pour ces professions ?
Ils se prénomment Emilie, Hugo, Lilou. Elèves en filière Bac pro Cultures marines sur le seul lycée de la mer de notre région à former aux métiers de la conchyliculture. Pas forcément issus de familles œuvrant dans ce milieu professionnel. Ils ont pourtant choisi d’en faire leur métier. Avec passion, mais aussi avec certaines inquiétudes.
Une baisse de production d'huîtres
En moins de vingt ans, la production d’huîtres sur le Bassin de Thau, plus grand espace lagunaire d’Occitanie, a chuté de 58%, passant d’une production de près de 20.000 tonnes à 7.000 tonnes. Alors que la surface de parcs exploités a au contraire augmenté.D’où le doute d’Emilie, élève de Première Cultures Marines :
Morgane Rabine était dans la restauration avant de se jeter à l’eau voici cinq ans avec son mari. Tous les deux sont passés dans ce lycée de la mer Paul-Bousquet à Sète. Lui pour devenir pêcheur, elle conchylicultrice : « Pour travailler aujourd’hui dans la conchyliculture, il faut avoir une bonne santé mentale même si on est habitué à des pertes et à une certaine mortalité. Le problème est qu’aujourd’hui on retrouve des virus d’origines humaines dans le milieu maritime. Et on ne sait pas vraiment les traiter dans un milieu vivant. »« Comment peut-on vivre aujourd’hui de la conchyliculture entre les virus, les grosses canicules et la pollution ?»
« Et les micro-plastiques ? « s’inquiètent Lilou et Emilie
Si les scientifiques savent qu’il va falloir se pencher sur leurs éventuelles présences en milieu lagunaire, leur principale préoccupation reste l’impact de pesticides sur le milieu et ses productions : « Heureusement c’est un milieu qui se restaure et semble devenir de plus en plus résistant. Avec des herbiers, des plantes marines qui oxygènent et dont les surfaces augmentent. »
Un atout peut-être face au réchauffement de l’eau à plus de 30 degrés constaté pour le deuxième été consécutif…et qui entraîne des « malaïgues » mortelles pour les coquillages (ndlr : Malaïgue, terme occitan signifiant « mauvaise eau », ce phénomène d'anoxie se manifeste par la chute de la teneur en oxygène de l’eau, favorisée par les fortes chaleurs et l’absence de vent).
Un étang de Thau fragile mais riche
Pourtant, l’étang de Thau n’est pas aussi malade qu’on pourrait le croire :« L’état de santé s’améliore pour les lagunes méditerranéennes par rapport aux nitrates et aux phosphates, explique Valérie Derolez, Ingénieur Ifremer spécialisée dans l'écologie lagunaire. Dans les années 2000, il y avait 15% des lagunes en bon état, aujourd’hui il y en a 30%. Même si l’on n’arrive pas encore à tout comprendre. Ainsi l’Etang de Thau est un écosystème fragile soumis aux bassins versants apportant pollutions et richesse nutritionnelle. Le Bassin de Thau est l’un des deux premiers bassins en taux de croissance des coquillages. Il y a un avenir encore pour cette lagune. »
Préserver environnement et 4.000 emplois
Dans les années 1970, les apports des bassins versants notamment en phosphore atteignaient les 140 tonnes par an. Aujourd'hui, ils ont été divisés par cinq!De même les travaux et amélioration sur l'assainissement des eaux usées ont conduit à la réduction des rejets urbains, à la fois nourrissant pour les coquillages mais aussi sources de pollution ou de contamination. Le projet Capathau (mené par l'unité de recherche UMR Marbec, l'Agence de l'Eau, le syndicat Mixte du Bassin de Thau, le Comité régional de la Conchyliculture de Méditerranée, le Cépralmar et la DDTM) étudie les apports de matières au milieu et aux coquillages, leurs flux dans l'écosystème et l'adaptation de celui-ci.
Mise en place du ramassage et du recyclage des déchets ostréicoles, adaptations des usines de traitement des eaux usées aux sur-fréquentations estivales, attention portée aux eaux de ruissellement des versants viticoles…autant d’actions qui ont pour but de trouver le juste équilibre entre le bon état écologique de cette lagune de Thau et sa production conchylicole. Car celle-ci génère encore aujourd'hui près de 4.000 emplois directs et indirects.
Retrouvez les échanges entre élèves du Lycée de la Mer Paul-Bousquet de Sète (Hérault) et les professionnels de la mer dans l’émission Dimanche en Politique – L’Agora (France 3 Occitanie) du dimanche 22 septembre 2019.
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La conchyliculture de l’Etang de Thau en chiffres
Près de 800 producteurs sur près de 600 exploitations.2.800 tables
2.000 emplois directs
2.000 emplois indirects
La production représente 10% de la production d’huîtres nationales et 90% de la production méditerranéenne.
Chiffre d’affaires estimé : 30 à 35 millions d’euros