Depuis 36 heures, la fumée du gigantesque incendie en Catalogne perturbe la vie des habitants et la circulation.
La Jonquera (Espagne) : ville morte et enfumée
Les touristes ont déserté la ville et les habitants restent souvent confinés chez eux.
Entre Le Perthus dans les Pyrénées-Orientales et Figueras en Espagne, il y a 26 kilomètres. Durant ce trajet, la paysage n'est que désolation, cendres et fumée. Les villes et villages dans ce secteur de Catalogne ont souffert lundi et mardi, de nuages de cendres et de fumée. Mais mardi soir, le vent tombant, l'atmosphère était plus respirable.
A Figueras, les habitants découvrent leur ville sous un jour inconnu.
"Je ne me souviens pas d'avoir déjà vu un tel nuage de fumée sur Figueres, c'est la première fois", note Maria Angels Rodriguez, agent immobilier de 50 ans.
Penchés sur des journaux ouverts aux pages consacrées aux incendies, Cebria Barris, 79 ans, et Isidre Asparo, 55 ans, se souviennent des incendies de 1986, qui avaient déjà recouvert Figueres d'une couche de fumée.
"J'étais trop jeune en 1986 pour m'en souvenir, donc pour moi c'est la première fois que je vois un tel nuage de fumée, mais ça dure depuis dimanche", dit pour sa part Isaac Hernandez.
L'homme de 33 ans, qui nettoie le comptoir du café Xiroi, l'avoue: "Je n'ai pas peur parce que nous sommes en ville, mais je suis triste pour ce qui se passe dans les montagnes".
L'incendie, qui a laissé derrière lui d'immenses étendues de végétation calcinée, ne progresse presque plus depuis lundi, après avoir brûlé environ 14.000 hectares.
Figueras (Espagne) - les habitants se protègent de la fumée - 24 juillet 2012
Entre La Jonquera et Figueras, en Espagne, l'autoroute enfumée est déserte
24 juillet 2012
Le camping d'Albanya près de Figueras évacué en urgence
"On a eu dix minutes pour partir", raconte, encore tendu, Mark Van Persie, un touriste néerlandais installé comme des dizaines d'autres vacanciers sur des tapis de sol d'un gymnase de Figueres, après son évacuation d'un camping menacé par l'incendie en Catalogne.
Ce touriste est arrivé samedi en caravane avec sa famille de Kampen, aux Pays-Bas, avec l'intention de passer trois semaines en Espagne, et s'est installé dans un camping, près de Figueres dans le nord-est de l'Espagne.
Mais dimanche, un incendie d'une violence inouïe démarre dans le village franco-espagnol du Perthus. Très vite, il se propage du côté espagnol, à la ville de La Junquera et à la région catalane de l'Alt Emporda, qui se transforme en un immense brasier.
Au départ, les autorités conseillent aux campeurs de ne pas sortir de la vallée où se trouve le camping. Les flammes sont encore loin, mais la fumée est bien visible.
L'attente angoissée commence, jusqu'à lundi après-midi, lorsque le vent tourne et rend le feu plus menaçant.
"Ca faisait un peu peur, parce que nous savions qu'il n'y avait qu'une route, et jusqu'à ce que le vent change de sens, on voyait la fumée s'approcher", se souvient Mark Van Persie.
Espagne - le camping du village d'Albanya dévasté par les flammes - 24 juillet 2012
Il est 18 heures, lundi, lorsque les campeurs sont finalement évacués.
"Les pompiers sont arrivés et nous ont donné dix minutes pour prendre quelques affaires et partir", raconte le touriste néerlandais.
Résultat, "notre caravane est toujours au camping et nous ne savons pas quand on pourra y retourner, ni si la caravane sera toujours là ou si elle a brûlé", s'inquiète cet ingénieur de 48 ans.
Avant même l'arrivée des pompiers, la nervosité s'était emparée du camping et certains ont voulu fuir, raconte Sylvain, un touriste français de 35 ans.
"Il y en a qui ont essayé de prendre leurs affaires et de partir, mais ils sont revenus, parce que les routes étaient fermées", se souvient-il.
"C'était un peu stressant, surtout à la fin, parce qu'on voyait les cendres et ça commençait à sentir la fumée", témoigne aussi Sandra Fouchier, une Française de 35 ans, venue avec son mari et ses trois enfants d'Auriol, près de Marseille, dans le sud-est de la France.
"C'est une vallée très fermée et si le feu était arrivé jusque là, nous n'aurions pas eu d'échappatoire", raconte Anna Compte, une Catalane de 39 ans, aux côtés de son mari et de ses trois enfants de huit, six et deux ans.
Sylvain se souvient d'avoir "croisé des gens qui voulaient rentrer à tout prix en France, parce qu'ils travaillaient lundi, et ils voulaient passer par la côte.
J'espère que ce sont pas eux qui ont été piégés par le feu", dit-il.
Dimanche, l'incendie a semé le chaos dans toute la zone frontalière. L'autoroute reliant la France à l'Espagne, par où transitent en cette saison des milliers de vacanciers, a dû être fermée.
C'est alors que des automobilistes se sont engouffrés sur la route côtière, longeant la Méditerranée, où ils se sont retrouvés face à un autre incendie dans le secteur de Port-Bou, une petite ville en bord de mer, près de la frontière.
A cet endroit, la route s'est transformée en piège pour des automobilistes, paniqués, qui ont abandonné leur voiture à l'approche des flammes, se lançant sur la paroi descendant vers la mer.
C'est là que deux Français, un père et sa fille de 15 ans, ont été tués en voulant sauter dans la mer.
Face à cette tragédie, Sandra Fouchier, qui comme des dizaines d'autres a passé la nuit sur un tapis de sol en guise de matelas, relativise: "On ne peut pas dire que ça nous a gâché les vacances et après tout, ça fera des souvenirs", dit-elle, en regardant jouer ses enfants.
Espagne - le camping du village d'Albanya dévasté par les flammes - 24 juillet 2012