Chaque année, les safraniers du Lot produisent 4 à 5 kgs de safran, ce qui n'est pas rien tant les stigmates rouges de cette plante ne pèsent pas lourd. Le chef Claude-Emmanuel Robin a décidé de décliner toute une gamme de produits autour de cet or rouge du Quercy et de réaliser des concentrés utilisables en cuisine, dont de l'eau au safran.
Sur le point d'être délaissé, le safran a repris des couleurs dans le Lot. L’épice est d’ailleurs la nouvelle marque de fabrique de Claude-Emmanuel Robin. Il y a un an, ce chef a préféré rendre son étoile au guide Michelin pour s’occuper de l’or rouge du Quercy. Son restaurant situé à Cajarc est resté porte close pendant 12 mois, le temps de réfléchir à de nouveaux concepts autour de l'épice. La ville a obtenu le label "site remarquable du goût". Et pour honorer cette distinction, le chef s'est mis aux fourneaux pour cuisiner de nouvelles idées. "L'année dernière, nous avons décidé de transformer le restaurant, de créer un lieu de vie consacré au safran du Quercy, tout simplement parce que nous avions créé un protocole d'extraction qui nous permet d'extraire au mieux le safran du Quercy."
Le restaurant est revenu à une cuisine plus simple genre "bistrot" et le chef a créé une boutique avec un pôle informatif : la maison du safran à Cajarc (Lot).
Démocratiser l’accès de l’épice
Claude-Emmanuel Robin a décidé de pousser plus loin le concept et de démocratiser l’accès à l’épice. Le restaurateur a imaginé et breveté l’extraction de safran. "L'intérêt du procédé c'est de retranscrire le safran dans un liquide sans l’endommager. Au travers d’extractions méticuleuses, on concentre les arômes et les saveurs avec des cuissons qui durent entre 48 et 72 h. On pompe tout du stigmate pour ensuite travailler le résultat en cuisine. Au travers de ces eaux de safran, on obtient plus de régularité dans les préparations pour avoir les mêmes saveurs et pour mieux les doser."
Ainsi le safran s'invite dans la plupart des plats du chef : noix de Saint-Jacques, veau d'Aveyron, mais aussi gelée de sureau ou moutarde safranés, au gré de l'imagination de ce passionné.
Le safran est avant tout une affaire de préciosité et de patience. Il faut environ 200 000 Crocus sativus pour obtenir 1 kg de poudre rouge safranée. Et pour le récolter, il faut séparer un à un les stigmates de la fleur pour ensuite les laisser sécher.
Une soixantaine de producteurs
Didier Doucet fait partie de plusieurs dizaines de producteurs à embellir leurs parcelles de fleurs violettes. "On se rappelle nos grands-mères qui allaient chercher le safran dans le jardin pour mettre dans le riz à l'époque. On a commencé comme ça en 1998-99 à relancer la production. On n'était pas nombreux, mais c'est une passion : quand on a commencé, on ne peut plus s'arrêter. Tous les ans, en octobre, il nous tarde que les premières fleurs arrivent pour ramasser notre safran. Cette année, elles sont un peu en retard."
C'est la température du sol qui déclenche la sortie du safran et comme il a fait très chaud, les fleurs sont arrivées plus tard. Quand il est retardé par la nature, le safran produit un peu moins.
"La fleur flétrit très très vite, poursuit le safranier. Le safran perd alors de sa qualité, il faut impérativement le ramasser tous les jours et le travailler tous les jours." Ensuite, il faut le laisser sécher pendant plusieurs mois pour que l'épice prenne toute sa saveur.
Aujourd'hui, le Quercy compte une soixantaine de producteurs.