Catalogne : plusieurs scénarios possibles pour des élections à l'issue incertaine

Le suspense reste pour l'instant entier, alors que les sondages annoncent des résultats serrés pour les élections régionales qui ont lieu ce jeudi 21 décembre en Catalogne. Qui des indépendantistes ou des unionistes l'emportera ? Dans les deux cas, le scénario du blocage n'est pas non plus exclu.

Les Catalans votent ce jeudi 21 décembre. Ces élections régionales, convoquées par le gouvernement espagnol après l’annonce de l’indépendance par les séparatistes puis la destitution de ces derniers, ont des airs de nouveau référendum, pour ou contre la fin de l’union avec Madrid.

Au total, sept listes se présentent. Trois d’entre elles sont en faveur d’une sécession : Ensemble pour la Catalogne, la liste du président destitué Carles Puigdemont ; celle de son vice-président Oriol Junqueras, actuellement en prison pour rébellion et sédition ; celle du parti d’extrême gauche CUP (Candidature d’unité populaire).

Les sondages annoncent un match très serré entre indépendantistes et unionistes. Les premiers veulent montrer que leur combat continue après des semaines de tensions. Les seconds veulent eux retrouver la stabilité perdue.

La bataille pour la première place opposerait le parti ERC d’Oriol Junqueras et Ciudadanos, la principale formation d’opposition aux indépendantistes. La liste de Puigdemont serait quant à elle à la troisième place, selon les prévisions du quotidien El Pais.

"A quelques voix près"


"Cela peut se jouer à quelques voix près", a reconnu mardi 19 décembre la dirigeante de Ciudadanos en Catalogne, Inès Arrimadas, à la chaîne La Sexta

"C'est pour ça que je demande que personne ne reste à la maison... pour en finir avec le cauchemar du processus indépendantiste et ouvrir une nouvelle étape de réconciliation et de 'seny'", le bon sens catalan.

En 2015 lors des dernières élections régionales, les indépendantistes avaient ont 47,8% des suffrages. Les formations opposées à la rupture avaient recueilli plus de voix, mais les séparatistes avaient obtenu la majorité des sièges au Parlement, 72 sur 135.


Les explications de Julia Taurinyà :


Plusieurs scénarios possibles


La défaite des indépendantistes

Une victoire du Parti libéral et anti-indépendantiste Ciudadanos serait un événement "historique", selon un élu du parti ERC (Gauche républicaine de Catalogne, indépendantiste). Le nationalisme domine en effet en Catalogne depuis 40 ans et la région n'a eu qu'un président non nationaliste, Jose Montilla, un socialiste, par le jeu d'alliances.

"Nos gens seraient démoralisés, cela encouragerait l'unionisme", estime l'élu d'ERC.

En cas de victoire, Ines Arrimadas, 36 ans, la chef de Ciudadanos en Catalogne, a promis de "dialoguer" pour surmonter la division de la société et de mener aussi des "politiques sociales".

La jeune libérale est perçue comme un gage de stabilité et de prospérité retrouvée par les grands patrons.


La victoire de Carles Puigdemont

Exilé à Bruxelles, le président catalan destitué qui promettait de ne faire qu'un mandat, prétend continuer à la tête d'une liste "transversale" pour récupérer "la dignité" du peuple catalan "humilié" par la mise sous tutelle de Madrid.

Sa victoire serait un camouflet pour Mariano Rajoy qui l'a destitué. Il chercherait ensuite à être élu président de l'exécutif par le nouveau parlement régional.

Mais il est poursuivi pour "rébellion" et tentative de "sédition" et visé par un mandat d'arrêt. Ses partisans utiliseraient son arrestation au retour de Bruxelles comme la preuve de la politique repressive de Madrid. "Dans un pays civilisé on n'envoie pas en prison un président" de région, explique-t-on dans son entourage.

La Catalogne serait-elle alors dirigée par un président en prison ? Ses proches estiment qu'il ne peut pas être "privé de ses droits politiques".

L'entourage du "président", espère qu'une telle victoire permettra de forcer Mariano Rajoy à négocier.


La victoire de l'indépendantiste Oriol Junqueras

Son parti, la Gauche républicaine de Catalogne (ERC), est en tête dans les sondages. S'il l'emporte et que le parlement le fait président, il pourrait cependant être maintenu en détention provisoire, et la gestion des affaires courantes reviendrait à Marta Rovira, la secrétaire générale.

S'il obtient l'investiture il mènerait une politique sociale "pour élargir la base" du mouvement indépendantiste, qui n'a compté en 2015 que sur le soutien de 47,8% des Catalans, confie l'élu ERC.


Un blocage et de nouvelles élections

Tous ces scénarios partent cependant du principe que l'un des trois favoris obtient l'investiture grâce au soutien d'autres partis.

Mais les risques d'une paralysie politique semblable à celle qui avait bloqué l'Espagne en 2016, faute d'accord au sein des blocs indépendantiste ou "espagnolistes", sont élevés.

"La formation d'un gouvernement sera très complexe, même au sein du bloc indépendantiste", estime le politologue Pablo Simon auprès de l'AFP.

Les indépendantistes ont notamment besoin de l'appui du petit parti CUP (Candidature d'unité populaire), qui exige une rupture immédiate avec Madrid, ce qui est désormais
écarté par les deux autres.

En face, Ines Arrimadas, même soutenue par les socialistes et le Parti populaire de M. Rajoy, pourrait ne pas avoir assez de voix pour obtenir une investiture.


La surprise socialiste

"Les possibilités de blocage et de nouvelles élections sont très élevées", estime donc le politologue Pepe Fernandez-Albertos... sauf, poursuit-il, si les autres partis favorables à l'Espagne préfèrent éviter cette situation de blocage et laisser gouverner le candidat socialiste Miquel Iceta, en minorité.

Celui-ci a plus "de capacité de dialogue" avec d'autres partis, note le politologue.

Il propose notamment de défendre l'amnistie des indépendantistes poursuivis. Ce cas de figure s'est déjà produit dans une autre région secouée par l'indépendantisme, le Pays basque, quand le socialiste Patxi Lopez l'a dirigé, sans majorité, entre 2009 et 2012.


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