Le dirigeant séparatiste catalan Carles Puigdemont exilé en Belgique était mis en demeure dimanche, de revenir en Espagne pour se faire réélire président de Catalogne. La Cour constitutionnelle a décidé samedi qu'il ne pouvait pas être élu, ni gouverner depuis l'étranger. Retour, prison ou exil ?
Carles Puigdemont a demandé la permission de la justice pour participer au débat prévu ce mardi au parlement catalan pour le vote et l'investiture du nouveau président, a annoncé un parlementaire de son parti, Josep Rull, à une radio catalane.
La Cour constitutionnelle, réunie d'urgence, a rendu samedi soir un avis à l'unanimité. C'est non.
"Toutes les hypothèses sont ouvertes", indiquait-on de source parlementaire lundi, deux jours après la décision de la Cour constitutionnelle.
"Nous n'avons pas encore décidé pleinement ce que nous allons faire" déclarait pour sa part à la radio Jaume Alonso-Cuevillas, l'avocat en Espagne de Carles Puigdemont, sans exclure qu'il se présente devant le parlement au risque d'être arrêté.
"Un homme en fuite, un homme qui a prétendu liquider de manière unilatérale la souveraineté et l'unité nationale ne peut être président de rien", a déclaré lundi Mariano Rajoy à la radio Cope.
Carles Puigdemont a lui adressé ce lundi une lettre au président du parlement catalan, Roger Torrent i Ramió, élu le 17 janvier dernier et également membre du parti ERC, en lui demandant de le "protéger" et de faire respecter ses droits politiques.
Pas de candidature à distance et encore moins de gouvernance en exil
Carles Puigdemont, qui fait l'objet d'un mandat d'arrêt pour son rôle dans la tentative de sécession de la région qu'il présidait, ne peut pas se faire élire à distance, ont tranché les juges. Il doit revenir en Espagne, se constituer prisonnier et ensuite demander la permission du juge d'instruction pour participer à la session d'investiture, ont décidé les juges.
L'ancien président destitué était parti pour Bruxelles pour échapper aux poursuites judiciaires après que la Catalogne avait proclamé une indépendance restée lettre morte le 23 octobre.
Son entourage affirmait jusqu'à vendredi qu'il pourrait se faire élire par téléconférence ou par procuration. Lui-même a déclaré à plusieurs reprises qu'il préférait retourner en Espagne mais à condition d'avoir la garantie qu'il n'y serait pas arrêté.
M. Rull n'a pas précisé pas si l'ancien président était prêt cette fois à se faire arrêter à son retour.
Puigdemont est le seul candidat à l'élection comme président de l'exécutif régional après la victoire des partis séparatistes aux élections de décembre dernier, convoquées par Madrid pour renouveler le parlement catalan.
Faut-il sacrifier Puigdemont ?
Un député d'un autre parti indépendantiste que celui de Puigdemont a suggéré dans une interview publiée dimanche qu'il pourrait faire preuve de patriotisme et accepter d'être remplacé.
"Il est indispensable que nous ayons un gouvernement, s'il faut sacrifier le président Puigdemont, nous devrons le sacrifier", a déclaré au journal La Vanguardia, Joan Tarda, de la Gauche républicaine de Catalogne (ERC).
La Catalogne a été placée sous la tutelle de Madrid après sa déclaration d'indépendance le 27 octobre et le gouvernement central a prévenu qu'elle ne retrouverait pas son autonomie tant qu'elle n'aurait pas de gouvernement régional.
"Nous ne pouvons pas risquer de gâcher la grande victoire électorale du 21 décembre", a poursuivi Joan Tarda. "Carles Puigdemont, qu'il soit ou pas président de Catalogne dans les prochaines années, sera toujours président et entrera dans l'histoire".
Mais le parti de Puigdemont, Ensemble pour la Catalogne (JxCat), a affirmé dimanche qu'il n'envisageait pas de proposer un autre candidat.
"Il n'y a pas de plan B pour la démocratie, a déclaré à la presse le porte-parole du parti, Eduard Pujol. C'est la volonté du peuple que Puigemont soit élu, il a tout le droit d'être investi".
Le président du parlement catalan, Roger Torrent, qui a formellement désigné Carles Puigdemont comme candidat, n'avait pas réagi dimanche à la décision de la Cour constitutionnelle.
Les magistrats l'ont averti ainsi que les autres membres du bureau du parlement catalan, des "responsabilités, y compris pénales" qu'ils devraient assumer s'ils désobéissaient à la Cour.
La précédente présidente du parlement régional, Carme Forcadell, fait l'objet de poursuites pour être passée outre les décisions de la Cour. Elle a reconnu que ces poursuites étaient une des raisons qui l'ont décidé à refuser un nouveau mandat.
La justice bloque l'investiture de Puigdemont comme président de Catalogne
La Cour constitutionnelle d'Espagne a suspendu samedi la réélection prévue ce mardi de Carles Puigdemont comme président de la Catalogne, parce qu'il est recherché par la justice pour son rôle dans la tentative de sécession de la région.
L'ancien président, destitué par le gouvernement espagnol dès la proclamation de l'indépendance de la Catalogne le 27 octobre, s'est enfui en Belgique avant qu'un mandat d'arrêt soit lancé contre lui.
Il est le seul candidat au poste de président régional et le vote d'investiture était prévu ce mardi au parlement catalan où les indépendantistes ont la majorité. Carles Puigdemont envisageait de se faire élire depuis la Belgique par téléconférence ou par procuration.
La Cour lui a barré la route, dans un arrêt rendu après une journée de débats entre les onze juges présents.
"La Cour constitutionnelle a décidé à l'unanimité de suspendre préventivement l'investiture de Puigdemont sauf s'il se présente en personne au parlement, muni d'une autorisation judiciaire préalable", indique le communiqué diffusé par la Cour.
La seule voie encore ouverte à M. Puigdemont pour se faire élire serait donc de retourner en Espagne pour se faire arrêter et de demander ensuite la liberté provisoire pour se rendre au parlement.
La Cour prévient que "le débat et le vote d'investiture (...) ne pourront pas être menés via des moyens télématiques ou par procuration à un autre parlementaire", ordonne la Cour.
Les magistrats avertissent les autres membres du parlement catalan "de leurs responsabilités, y compris pénales, en cas de désobéissance à cette suspension".