Comment prendre en charge toute forme d'addictions pendant le confinement pour cause de crise sanitaire liée au coronavirus.? Dans les Pyrénées-Orientales, une permanence téléphonique existe pour aider, soutenir et surtout écouter. Le 04 68 61 61 33 est ouvert depuis le 1er avril dernier.
 

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Psychologue, éducateurs, infirmiers, médecins se relaient depuis le 1er avril pour assurer une permanence téléphonique. Au bout du fil, ils répondent aux questions, aux angoisses de tous ceux qui doivent faire face à des addictions: alcool, tabac, jeux vidéo, cannabis.
Sylvie Gipulo est directrice du CAARUD (Centre d’accompagnement à la réduction des risques des usagers de drogues), l’une des 4 structures associées à cette plateforme. L’objectif est d’être disponible pour tous ceux qui se sentiraient un peu perdu.

Ecouter, rassurer et orienter vers une prise en charge spécifique éventuellement


Elle dresse le bilan d’une première semaine d’appels: « Le démarrage est timide. Les personnes qui nous contactent, ont en moyenne 35 ans. Il s’agit d’usagers comme de membres de l’entourage. Notre rôle en priorité ?Ecouter, rassurer et orienter vers une prise en charge spécifique éventuellement. » Les patients qui ont engagé une démarche de soin sont toujours suivis via des téléconsultations ou rendez vous téléphonique. La plateforme reste une main tendue vers tous ceux qui pourraient être en difficulté du fait du confinement. Il s’agit souvent d’un premier contact.
 

La peur du vide

Lors de ces premiers appels, des situations très diverses. « Pour certaines personnes, le confinement c’est l’ennui. La peur, le stress et ce sentiment de vide peut être propice à des rechutes pour des personnes qui avaient arrêté de fumer ou de boire. Notre rôle est dans ce cas de rappeler que la rechute n’est pas un échec mais l’étape d’un apprentissage. C’est particulièrement vrai pour le tabac », précise Sylvie Gipulo.

Pour certaines personnes, le confinement c’est l’ennui

Mais l’expérience du confinement et de ses contraintes peut être différente d’un individu, d’une famille à l’autre. « Pour certains c’est aussi l’occasion de prendre soin de soi. De rompre avec des habitudes. Nous avons été contactés par des personnes que nous avons suivi en parcours de soin et qui avaient abandonné. Elles reviennent demander de l’aide aujourd’hui. »

Des situations paradoxales

Le confinement serait-il générateur de surconsommation d’alcool ou de tabac ? Pas si sûr explique le docteur Marc Rondony médecin addictologue à l’ANPAA, centre de soins et de prévention en addictologie à Perpignan. Il est en contact avec des patients qui dans ce contexte tournent le dos à la cigarette par exemple: «  Des patients que je suivais pour traiter leur tabagisme, ont arrêté de fumer ! Cette période extra-ordinaire, modifie les habitudes de vie. Certains y voient l’occasion de changer leur comportement. Cela reste difficile à quantifier pour l’heure. Mais à mes yeux cela n’a rien d’anecdotique ! »

L’alcool reste très facilement à portée de main dans les supermarchés. Et pourtant  on ne constate pas de hausse significative des achats d’alcool

Ce spécialiste en addictologie, n’a pas non plus le sentiment d’être face à une surconsommation généralisée d’alcool. Il s’appuie sur une étude du cabinet Nielsen. «  L’alcool reste très facilement à portée de main dans les supermarchés. Et pourtant  on ne constate pas de hausse significative des achats d’alcool. »  L’étude note en effet un recul de 3,4% des ventes d’alcool. « Les Français ont peut-être commencé par vider leurs réserves. Il faudra voir sur le long terme mais pour l’instant la baisse de la consommation d’alcool est considérable avec la fermeture des bars et des restaurants », précise Marc Rondony.

Il y a chez les consommateurs avant tout la peur du manque

Mais il reste inquiet: « Une surconsommation d’alcool quand on vit déjà des tensions conjugales ou famillales peut dériver vers de la violence. Il y a aussi des risques réels pour des comas ethyliques vécus par des personnes isolées. » Un médecin inquiet également pour les  consommateurs réguliers de cannabis confrontés, eux,  au manque de leur produit en plein confinement: «  Il y a chez les consommateurs avant tout la peur du manque. Elle peut se traduire par de l’anxiété, des difficultés de sommeil. Les effets du manque n’ont rien à voir avec ceux de l’alcool. Mais ils ont bien réels. Se passer brutalement d’une béquille qui permet de gérer le stress ou l’angoisse, c’est difficile. »
 

L'écoute pour apaiser l'angoisse

Dans ce contexte, les professionels des addictions dans les Pyrénées-orientales tenaient à mettre en place un numéro d’appel de permanence (04 68 61 61 33). Tous sont convaincus que l’écoute et la parole dans un premier temps permettent d’abaisser le niveau d’angoisse. « Les appels sont anonymes. Nous ne sommes pas là pour donner des leçons de morale. Notre rôle est vraiment d’indivudaliser notre réponse. Le traitement d’une addiction , c’est vraiment du cas par cas. Nous pouvons orienter ceux qui nous appellent vers une prise en charge spécifique, médicale mais seulement avec leur accord », assure Sylvie Gipulo.

plateforme addiction 66

Il est encore trop tôt pour mesurer les effets du confinement sur nos comportements. Mais l’idée d’une plateforme anonyme destinée à tout type de problème d’addiction pourrait bien être pérénisée au-delà de la crise sanitaire du Covid-19.

L'addiction aux jeux vidéo et aux écrans
La plateforme est aussi là pour répondre aux inquiétudes des parents en terme d'addiction de leurs enfants  aux jeux vidéo par exemple.
Le docteur Rondony se veut rassurant:  « Cette période très particulière n’a pas que des effets délétères. Les enfants sont sans doute plus longtemps, plus souvent sur leurs écrans ces temps ci ou en train de jouer à des jeux vidéo. Les familles sont plus permissives et c’est compréhensible. Mais justement, certains ado vont se rendre compte qu’ils ne trouvent là,au bout du compte, rien d’épanouissant."
Et dans certains cas selon lui:
"Ces adolescents peuvent se retrouver dans des situations d’écoeurement, de lassitude. Je crois que beaucoup se rendent compte en ce moment de l’importance de voir les copains pour de vrai ! » précise ce médecin addictologue..
Mais pour cela il faudra patienter encore un peu.
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