Une maison neuve truffée de malfaçons et l'assurance du constructeur en faillite : à Elne, près de Perpignan, Sébastien Fernandez se tourne vers la justice pour tenter d'obtenir réparation. Mais le propriétaire malchanceux n'est pas prêt de rentrer dans ses frais ni dans son logement.
D'énormes tâches noires sur le placo neuf. Causées par les infiltrations à cause de la toiture qui fuit. Quand on rentre dans la maison "neuve" de Sébastien, l'état de détérioration des pièces inachevées reflète l'incroyable gâchis. Et le découragement de ce propriétaire de 39 ans qui se bat depuis plusieurs années pour obtenir réparation(s). Mais entre une assurance du maçon qui a fait faillite et les restrictions du fonds de garantie des victimes, l'Illibérien (c'est le nom des habitants d'Elne) est loin de pouvoir espérer réaliser son projet de vie.
Un maçon peu scrupuleux
Il y a 4 ans, Sébastien Fernandez a fait construire ce qui devait être la maison de ses rêves, à Elne, pour un coût total de 200 000 euros, terrain compris. Afin d'y parvenir, il contracte un crédit et engage une entreprise de maçonnerie, en l'occurence son voisin, pour le gros oeuvre. Sauf qu'une fois bâtie, la maison se révèle pleine de défauts.
D'abord le maçon me dit : ne t'inquiète pas, on va refaire le gros oeuvre. Et on ne les voit plus...Donc on va les chercher mais ils ne viennent pas. C'est toujours remis au lendemain.
Des promesses jamais tenues, pendant que la maison prend l'eau à la moindre pluie et que les aménagements intérieurs se détériorent. Aujourd'hui Sébastien envisage de tout raser.
Une assurance en faillite
Après avoir vainement tenté une solution à l'amiable, le jeune propriétaire se tourne vers les assurances. Mais la situation se complique lorsque Sébastien apprend que l'assurance décennale du maçon, une entreprise néozélandaise basée à Gibraltar est en faillite. Résultat, aucun remboursement possible alors que le crédit engagé par le propriétaire court toujours.
"Ça fait 4 ans que je vis chez les parents. J'en suis parti à l'âge de 16 ans pour revenir à 35 ans...Aujourd'hui, notre vie est entre parenthèses" conclut Sébastien.
Un litige non indemnisable
Et la malchance continue. Quant l'habitant d'Elne se tourne vers le Fonds de garantie des victimes, créé pour suppléer les compagnies d'assurances défaillantes, il pense y avoir droit au titre de victime relevant de la garantie dommages ouvrage ( Art L 242-1 code des assurances). Il a bien le profil mais une condition supplémentaire l'empêche de prétendre à une quelconque indemnisation : ce fonds ne prend en compte les litiges qu'à partir de 2018... la maison a été construite en 2017. Une discrimination de taille pour toutes les victimes antérieures, que le maire d'Elne ne manque pas de souligner.
'"On va interférer auprès du 1er ministre, auprès de l'Assemblée Nationale et des groupes parlementaires constitués pour qu'ils posent les questions au gouvernement" promet Nicolas Garcia.
Pourquoi en 2018 et pas en 2015? On doit modifier l'ordonnance pour faire rentrer dans le droit à l'indemnisation toutes les personnes qui subissent ce genre de préjudice.
La seule compensation que le jeune propriétaire va obtenir, c'est en se tournant vers la justice. Sébastien Fernandez a obtenu en référé, début janvier, 58 000 euros que le maçon devra lui verser. S'il est solvable. Et c'est bien loin des espérances du propriétaire floué pour pouvoir imaginer rebâtir une maison saine où il pourra enfin vivre.
Le reportage à Elne de Nicolas Esturgie et Frédéric Savineau pour France 3 Pays catalan.