Sécheresse : "les agriculteurs devront changer de culture", en Catalogne, quatre régions en situation critique à cause du manque d'eau

La sécheresse s'aggrave en Catalogne. Les réserves d'eau ont passé le seuil critique en dessous des 30%. Barcelone n'est pas épargnée. La capitale de la région connait l'épisode de sécheresse le plus important des ces deux derniers siècles.

Cette année, la neige a manqué. Le sous-sol est sec, à cause du manque de pluie. Les usines de désalinisation du Prat et de Tordera tournent à plein régime pour fournir en eau potable l'aire métropolitaine de Barcelone et le gouvernement de la Generalitat a déjà investit plus de 13 millions d'euros en 2022 pour doubler la capacité d'utilisation des eaux usées recyclées. Objectif : atteindre les 100 hm3/an. Mais le constat est sans appel, il n'y a pas d'eau.

Face à cette situation exceptionnelle, l'Agence Catalane de l'eau (ACA) a décidé d'activer la phase de "sécheresse exceptionnelle", en prenant de nouvelles dispositions quant aux restrictions d'eau. Quatre régions sont directement concernées soit six millions d'habitants dans 224 communes (en orange sur la carte).

Sécheresse exceptionnelle, un coup dur pour l'agriculture

En Empordà, la saison des semences aurait déjà dû commencer mais pour l’instant c’est impossible. Onze communes sont déjà en alerte exceptionnelle. 

La couche supérieure est sèche. S’il ne pleut pas, on ne pourra rien planter.

Carles Cruset, agriculteur à Pals

Jusqu'alors, Carles Cruset cultivait 200 hectares de maïs, une céréale très gourmande en eau. Trop.     « On se demande si on ne va pas semer du tournesol, car ça demande moins d’eau, mais la rentabilité est faible. » Ses revenus pourraient baisser de 70%, et encore s’il peut arroser… Car pour l’instant, les canaux sont à sec et on ne connait pas encore la quantité d’eau à partager.

 

On devrait avoir la moitié ou même moins. Il n’y aura pas assez d’eau pour toutes les exploitations. Les agriculteurs devront changer de culture, abandonner des parcelles qui ne pourront pas être arrosées. On essayera de répartir au mieux… 

Josep Maria Parals, syndicat de l'eau à Pals 

A Pals, la culture du riz en danger

Tradition séculaire, la culture du riz de Pals remonte au 15e siècle. Le riz a été introduit par les Arabes dans la région de Valence, puis a été acclimaté dans la vallée du Ter. Après une longue interruption pour des raisons sanitaires (les marais provoquaient alors beaucoup de maladies), la culture du riz de Pals a été réintroduite au début du XXème siècle. Une culture aujourd'hui en péril. Actuellement, 714 hectares de riz sont cultivés sous l’appellation "riz de Pals", par 22 producteurs, dans la vallée du Ter autour de Pals. Avec un rendement moyen d’environ six tonnes l'hectares, les champs de riz sont noyés au printemps, juste un peu avant le repiquage des plants.

Mais à quinze jours des semences, les restrictions annoncées ne permettront pas de préserver l'ensemble des cultures. Selon Josep Pericay, le Président du groupement de défense du riz de Pals, seul "50% de la superficie cultivable pourra être irriguée". Si nous sommes face à une catastrophe écologique, c'est une catastrophe économique qui se profile pour beaucoup d'agriculteurs car certains n'ont pas le choix. Cette terre marécageuse, comme le signifie son nom latin "Palus", est très salée. Rien n’y pousse à part le riz. 

Le riz est notre modus vivendi. Mon arrière-grand-père en faisait déjà. Le riz est lié à notre territoire. Ce qui arrive est inédit. On s'attend maintenant à une restriction totale de l'eau. Jamais nous n'aurions imaginé cela, c’est très inquiétant.

Albert Grassot, cultivateur de riz à Pals

La technologie au service de l'économie d'eau

Si la culture du riz est menacée, d’autres devraient mieux résister. Dans la région de Gérone, par exemple, des champs de pommiers sont équipés d’un système intelligent conçu par l’institut de recherches agronomiques (IRTA) de Verges.

On mesure la quantité d’eau dans le sol et dans le goutte-à-goutte. Les données sont ensuite collectées via internet puis stockées sur le cloud. 

Francesc Camps, chercheur à l'IRTA 

L’arrosage est ainsi ajusté en fonction de la météo, ce qui permet d’économiser 20% d’eau.

 

Une des solutions en agriculture irriguée, c’est la modernisation de l’irrigation. Il y a encore beaucoup de canaux à ciel ouvert, peu efficaces dans le transport et dans la distribution de l’eau. 

Francesc Camps, Chercheur à l'IRTA

Arrosage au goutte-à-goutte ou par aspersion, rénovation des canaux d'irrigations et des réseaux d'eau potable, réutilisation des eaux usées… Des solutions existent, d'autres viendront et se généraliseront pour améliorer la gestion de l'eau à l'avenir. 

Article écrit en collaboration avec Júlia Taurinyà.

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