"Ecœurés de travailler à l’hôpital", des soignants témoignent de la violence de leurs patients et celle des institutions

Lundi 22 mai, un homme a poignardé 2 soignantes à l’hôpital de Reims. L’une d’elle, infirmière, est morte. Cette agression ravive de douloureux souvenirs à Montauban (Tarn-et-Garonne) où le 29 mars, un agent de la fonction publique hospitalière a été attaqué au couteau. La colère des soignants de plus en plus victimes des patients mais aussi de leur institution n'arrive pas à s'apaiser.

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Depuis plusieurs années, les soignants alertent sur leurs conditions de travail et sur les violences dont ils sont de plus en plus victimes.

Ce lundi 22 mai, deux soignantes à l’hôpital de Reims ont été victime d’une attaque au couteau de la part d’un patient. L’une d’elle, infirmière, n’a pas survécu. Un drame qui ravive de douloureux souvenirs à Montauban (Tarn-et-Garonne). 

Une agression similaire à Montauban en mars

Le 29 mars dernier, un jeune homme a lui aussi poignardé plusieurs soignants du centre hospitalier. Cet homme de 26 ans était hospitalisé au sein de l’hôpital psychiatrique de Montauban. Il a fait 3 blessés, dont une femme grièvement. 

Aujourd’hui, les jours de cet agent hospitalier ne sont plus en danger mais ses collègues soignants restent sous le choc. D’autant plus, qu’après cette dramatique agression, la vie a repris son cours, sans presque aucun changement.

“Rien n’a été mis en place, nous attendons toujours”, s’indigne Serge Leguenauf, délégué FO Santé. Le syndicat a demandé la sécurisation du parking des soignants, l’installation de caméras et de sas de sécurité dans certains secteurs sensibles du centre hospitalier. Nous demandons depuis des mois des moyens financiers pour pouvoir mener ces dossiers. Nous avons le sentiment de ne pas être écoutés. 

L’ARS ne nous répond pas, on a aucune réponse alors que ça fait des années qu’on alerte sur ces dangers. Nous avons l’impression d’être des numéros, des pions, pas des êtres humains. A l’heure actuelle, on est écoeuré de travailler à l’hôpital.

Serge Leguenauf, délégué FO Santé

Un écoeurement partagé les soignants, d’autant plus que depuis l’agression, leur conditions de travail se sont encore dégradées. “Depuis, 20 lits de plus en psychiatrie ont été fermés”, déplore Agnès Seguela, déléguée départementale FO Santé. “10 lits de plus vont fermer fin juin, par manque de personnel, autant infirmier que de psychiatre. La conséquence directe ? C’est que les urgences psy, qui sont juste en face, se retrouvent avec des patients qui attendent des heures et des heures. Et qui ensuite, restent donc 10 ou 15 jours dans des services complètement inadaptés.”

Les répercussions peuvent alors être dramatiques car en cas de décompensation psychique, le temps est primordial. “Avant, les patients qui décompensaient étaient vus par un psychiatre aux urgences. Mais maintenant, à cause du manque de psychiatre, ces patients ne sont pas vus le soir. Ils doivent attendre toute la nuit et parfois même jusqu’à 10h le lendemain matin. C’est ce genre de situation qui génère les passages à l’acte.”

De la violence des patients à la violence institutionnelle

Patricia Lanco-Saint-Guily est médecin généraliste à Toulouse. Il y a 8 ans, elle a été séquestrée pendant 4 heures dans son cabinet par une patiente exigeant une ordonnance de stupéfiants. Elle a été libérée par la BAC. 

Pour le docteur Lanco-Saint-Guily, ces agressions de personnels soignants ne sont pas nouvelles aux urgences. Mais de plus en plus nombreuses, elles sont révélatrices du déclin du système de santé français. “De moins en moins de gens travaillent dans les services de soins parce que ces carrières n’attirent plus, elles sont mal payées”, analyse la médecin. “Les services d’urgences sont extrêmement mis à mal par l’afflux constant de patients et la prise en charge s’allonge et se dégrade, c’est aussi ce qui explique ces drames.” 

Une situation également vécue dans les cabinets médicaux. “Nos conditions de travail se sont tellement dégradées qu’on n’en peut plus, on est tous à bout. La moitié des médecins sont en burn-out”, s’indigne Patricia Lanco-Saint-Guily. “Mais il n’y a pas le courage politique pour l’assumer. Nous savons que les gens sont déjà en train de mourir. Moi, je vois déjà des morts dans ma patientèle parce qu’ils ne peuvent pas être pris en charge correctement à l’hôpital, ou parce qu’ils ne peuvent pas être pris en charge correctement par mes collègues spécialistes. Parce que pour aller voir tel spécialiste, il y a 6 mois de délai, les soignants sont tous surbookés.”

Une situation qu’elle apparente à de la maltraitance institutionnelle. “Elle terrorise les jeunes médecins qui ne veulent plus s’installer”, ajoute-t-elle. “Ils nous sous-paient, ils récupèrent sans arrêt et toujours davantage des sommes sans nous expliquer pourquoi. Je suis horrifiée de ce qu’on fait subir à une profession qui a fait beaucoup d'études et rend un grand service à la population.” 

Suite à son agression, la plainte du docteur Lanco-Saint-Guily n’a jamais abouti. Contrairement à celle de la patiente agresseuse. 

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