Le gouvernement a annoncé ce 8 novembre le lancement d'enquêtes sur les pratiques illicites en France concernant les adoptions internationales. Un progrès, selon Véronique et Jean-Noël Piaser, victimes d'un trafic d'enfants au Sri-Lanka et qui tentent depuis 4 ans de faire la lumière sur ses rouages.
Une "mission d'inspection" sur les pratiques illicites en matière d'adoption internationale va être lancée. Le gouvernement l'a annoncé le 8 novembre. Selon un communiqué, la ministre des Affaires étrangères, Catherine Colonna, le ministre de la Justice, Eric Dupond-Moretti et la secrétaire d'État chargée de l'enfance, Charlotte Caubel ont saisi l'inspection générale des affaires étrangères (IGAE), l'inspection générale de la Justice (IGF) et l'inspection générale des affaires sociales (Igas) sur les pratiques illicites en matière d'adoption internationale.
Le résultat de ces enquêtes "est attendu dans six mois". L'objectif est "d'identifier les pratiques illicites qui ont eu lieu par le passé pour éviter qu'elles ne se reproduisent" et "d'apporter une réponse aux demandes des adoptés", précise le communiqué relayé par l'AFP.
Positionnement de l'ONU
Des associations d'enfants adoptés "ont fait valoir que les adoptions organisées par le passé avaient pu l'être de manière irrégulière voir illégale", antérieurement à la mise en oeuvre de la convention de La Haye de 1993 et à la création de l'Agence Française de l'Adoption en 2005.
Véronique Piaser-Moyen a dénoncé ces trafics d'enfants dans un livre paru à la rentrée "Ma fille, je ne savais pas...". Depuis 4 ans, date à laquelle elle et son mari Jean-Noël, ont découvert que leur fille adoptée au Sri-Lanka dans les années 80 avait été volée à sa famille, le couple se bat pour faire reconnaître ces adoptions illégales que l'État français avait à l'époque entérinées.
Crime contre l'humanité
"C’est avec joie que nous apprenons cette nouvelle, réagit Véronique Piaser-Moyen. C'est un travail collectif que nous avons mené avec les adoptés depuis plusieurs années. L'ONU, dans une déclaration du 29 septembre dernier, nous a aussi aidés en estimant que certaines adoptions illicites pouvaient relever de crime contre l’humanité. Elle a demandé aux États de mener des enquêtes et c'est sans doute décisif".
"Nous avions franchi une première marche avec la proposition de résolution de la députée Valérie Rabault, poursuit Jean-Noël Piaser. Cette mission d’enquête est une deuxième marche, mais combien en reste-t-il pour obtenir une reconnaissance des trafics d’êtres humains dans le cadre de l’adoption internationale pour tous les pays ?".
6 mois pour faire la lumière
Le couple accueille néanmoins avec une certaine réserve cette annonce "car ce gouvernement et notamment le ministère de l’Europe et des Affaires étrangères ont toujours été dans un déni complet face à ce problème. Cette mission d’inspection confiée seulement à des institutions gouvernementales pourrait suivre les dénégations du gouvernement et manquer d’objectivité".
Le délai d'instruction de 6 mois paraît court pour enquêter, réunir les témoignages et les preuves en France et dans les pays concernés. Les Piaser attendent donc le résultat de cette enquête qui devrait être rendue publique si la procédure est transparente le 8 avril 2023.
L'adoption internationale s'est développée de manière importante dans les années 1950 pour culminer en 2005, avec l'arrivée en France de plus de 4.000 enfants venus de l'étranger, selon les données du gouvernement. Depuis, le nombre d'adoptions a connu une chute importante, passant de 4.136 en 2005 à 421 en 2019.