Entre abus, discours rigide sur l'homosexualité et problèmes économiques : l'école d'évangélisation Jeunesse-Lumière ferme ses portes

L'école d'évangélisation Jeunesse-Lumière basé à Pratlong (Tarn) a officiellement fermé ses portes après 40 ans d'existence. La formation dispensée était basée sur la spiritualité. Mais un homme qui y a subi des thérapies de conversion dans les années 1980 dénonce la rigidité du discours sur l'homosexualité, toujours d'actualité aujourd'hui.

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L'annonce a été officialisée dans un communiqué publié par l'Église catholique du Tarn : après un an de pause, l'école d'évangélisation Jeunesse-Lumière ferme définitivement ses portes à Pratlong (Tarn). L'archevêque Legrez avance notamment que "l'état des bâtiments nécessiterait plus d'un million d'euros de travaux" et souligne "l'absence de jeunes candidats".

Son fondateur secoué par des soupçons d'abus sexuel

Une fermeture qui marque la fin de plus de 40 ans d'éducation spirituelle, marquée par des épisodes controversés comme des thérapies de conversion et exorcismes envers un homme dans les années 1980.

L'école est fondée par le prêtre catholique Daniel-Ange en 1984. Elle s'installe dans le Tarn en 1987 et propose un enseignement ancré dans la foi destinée à des jeunes âgés de 18 à 30 ans. L'objectif : répondre aux défis du monde à partir de l'évangélisation.

L'école forme près de 700 jeunes pendant près de 40 ans, originaires d'une cinquantaine de pays. Mais ces dernières années, Daniel-Ange, l'un de ces fondateurs, est secoué par des soupçons d'abus sexuel, qu'il nie catégoriquement. Autre révélation : l'un de ses élèves de l'époque, Jean-Michel Dunand, évoque des thérapies de conversation et des exorcismes subies en raison de son homosexualité.

Dans une publication sur les réseaux sociaux, Clément Hubert, Président de l’association Diacre Christian Poirier et "serviteur de l’école" souligne que "l’archevêque d’Albi a toujours affirmé qu’aucun fait répréhensible ne motivait sa demande" de fermetureet de préciser : "Cependant, n’ayant toujours pas de «prêtre idoine» pour le service à Jeunesse-Lumière l’an prochain, et suite à l’état des lieux des bâtiments de Pratlong demandé par Mgr Legrez, celui-ci a décidé que Jeunesse- Lumière ne pouvait pas réouvrir en ce lieu. Sur ce dernier point le maître d’œuvre travaillant pour le diocèse a estimé que les lieux étaient vétustes et qu’une «bonne rénovation» nécessiterait plusieurs millions d’euros. C’est une page importante de l’histoire de l’ école qui se tourne, non sans un pincement au cœur.

"Un discours qui n'a pas changé" à propos de l'homosexualité

Ces thérapies de conversion, qui visent à modifier l'orientation sexuelle ou l'identité de genre d'une personne, ont officiellement été interdites par une loi promulguée fin janvier 2022. Dans l'église, la parole des victimes d'abus sexuels se libère mais le discours sur l'homosexualité lui, n'a pas changé selon Jean-Michel Dunand.

Contacté, cet homme qui se bat pour que l'on considère l'homosexualité dans l'église, n'est pas étonné de cette fermeture, ayant constaté "des dysfonctionnements pédagogiques". Il se souvient parfaitement de l'éducation prônée par Jeunesse-Lumière. "C'est une espèce de théologie que je qualifierais de hors-sol, qui n'a fait que se développer. On nous propulsait dans un ciel esthétique qui déconnecte du réel. Il suffit de peu pour que ça fragilise ".

Sans pour autant renier la formation qu'il a eue, en ayant "beaucoup reçu et en vivant encore aujourd'hui des choses positives", il dénonce le discours figé, qui n'a pas évolué sur l'homosexualité depuis sa propre formation il y a 40 ans. 

"Il n'a pas changé d'une virgule : l'homosexualité n'est pas dans le plan de Dieu. Les conséquences sont les mêmes : il faut en sortir, en guérir, se délivrer. Cela ne peut pas évoluer tant que le discours ne change pas" regrette-t-il.

"Il y a sans doute eu des jeunes mis en danger par ce système"

Jean-Michel Danand pointe surtout l'attitude de Daniel-Ange, qui à l'image du discours n'aurait pas évolué. "Il y a quatre ans, Daniel-Ange, a refusé la présence d'un prêtre à Jeunesse-Lumière en raison de sa réflexion sur l'homosexualité", se souvient-il. Le fondateur n'est plus à la direction de l'école depuis plusieurs années, "mais il n’avait pas vraiment quitté la barre du bateau", estime Jean-Michel Danand.

Même si ce dernier n'a plus d'information sur Jeunesse-Lumière depuis de nombreuses années, il s'inquiète du sort de jeunes ayant fréquenté l'école qui s'interrogent sur leurs genres ou qui sont homosexuels. "Il y a eu, sans aucun doute, des jeunes mis en danger par ce système. Vous pouvez imaginer comment ce discours a pu les mettre dans l’inconfort."

Cette fermeture est une forme de soulagement pour Jean-Michel Danand, même s'il l'avoue : "je n’ai pas attendu sa fermeture pour faire un travail de libération". Dans le communiqué publié par l'Église catholique du Tarn, l'archevêque Legrez sous-entend que Jeunesse-Lumière pourrait rouvrir ailleurs dans d'autres conditions. 

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