Alors que la canicule frappe le sud de la France, les débats enflammés autour du retour à une limitation de vitesse à 90 km/h sur les routes secondaires continuent. Les élus locaux, comme ceux du Tarn, qui ont choisi de rétablir cette vitesse font face à des critiques. Des experts critiquent leur décision mettant en avant des enjeux environnementaux et de sécurité routière.
La question de la limitation de vitesse à 90 km/h sur les routes secondaires continue de susciter des débats passionnés dans plusieurs départements français. Alors que la France, et plus particulièrement le sud de l'Hexagone, subit une forte canicule, les élus locaux ayant décidé de repasser certaines de leurs routes à 90 km/h subissent de nombreuses critiques.
Un retour à 90km/h "injustifiable"
Dans une tribune publiée dans le quotidien Libération, courant du mois d'août, le président de la Fédération nationale d’éducation et de promotion de la santé, le docteur François Baudier estime que cette mesure "injustifiable" alors que les données scientifiques démontrent que la réduction de la vitesse en voiture est une mesure qui réduit rapidement et massivement nos émissions de CO2. "Comment peut-on aujourd’hui s’engager à promouvoir une décision qui concourt au réchauffement climatique notamment lorsque l’on prend connaissance du rapport accablant sur le sujet que le Haut Conseil pour le climat vient de présenter en juin"" dénonce le médecin.
Le département du Tarn est l'un des premiers à avoir décidé en 2018 de repasser plusieurs de ses routes à 90 km/h. "Pour faire gagner du temps" aux habitants des territoires ruraux avait notamment justifié le président du Conseil départemental 81, Christophe Ramond. 5 ans plus tard, l'élu n'a pas changé de point de vue. Il n'hésite d'ailleurs pas à afficher fièrement sur ses réseaux sociaux la réouverture d'une route à 90 km/h comme en juillet dernier.
Le président de la collectivité tarnaise n'hésite pas à jouer la carte des territoires ruraux contre les urbains : "C'est facile de critiquer les usagers de la voiture lorsque l’on a tout, que l'on habite en zone urbaine et que l’on a le métro pour se déplacer. Dans nos territoires ruraux nous ne sommes absolument pas dans cette conception de nos déplacements. Il faut imaginer le territoire de demain."
D'ailleurs, ce proche de Carole Delga est un fervent partisan du projet d'autoroute de l'A69 entre Castres (Tarn) et (Toulouse).
"Trouver le juste équilibre"
Pour le socialiste, il faut avant tout penser "global". Il promeut le retour des 90 km/h tout en vantant sa politique en matière d'environnement. "Faire de la politique, ce n'est pas seulement se focaliser sur un seul aspect. J’ai développé le co-voiturage. J’ai créé 5 aires de co-voiturage entre Albi et Castres. J’ai mis en place un plan vélo avec 2 millions d’euros tous les ans permettant ainsi de relier Albi et Castres. Cette année nous allons planter 40.000 arbres dans notre département. Ce sont des mesures très positives pour lutter contre le réchauffement climatique et contre les émissions de carbone ou autres. Cela me semble être des mesures beaucoup plus intéressantes et pertinentes. Dans nos territoires nous aurons toujours besoin de la voiture. Il faut trouver le bon équilibre. Réduire la vitesse à 80 km/h ne résoudra pas tout et sûrement pas la question du réchauffement climatique. Dans ce cas, il faut aussi mettre la vitesse à 80 km/h sur les autoroutes."
D'ailleurs, ce proche de Carole Delga est un fervent partisan du projet d'autoroute de l'A69 entre Castres (Tarn) et (Toulouse).
Des élus "irresponsables" ?
Un point de vue que ne partage pas Pierre Lagache, vice-président de la Ligue contre la violence routière. Lors d'un entretien sur l'antenne de France Info le 19 août, le militant associatif considère que les élus ayant repassé la "totalité de leur réseau à 90 km/h" sont "des exécutifs irresponsables" en matière de sécurité routière.
Là aussi Christophe Ramond estime que la réduction de la vitesse ne devrait pas être la seule réponse au risque routier : " Nous devons avoir un objectif de zéro mort sur nos routes. Mais ce n’est pas uniquement en abaissant la vitesse que l’on peut y arriver. Il faut une vision globale avec davantage de prévention, notamment en direction des jeunes. J’ai dénoncé plusieurs fois le fait que lorsque l’on passe le permis de conduire, on n’ait pas d’apprentissage comme pour le permis moto d’un évitement ou une conduite sur une route dangereuse. Pour moi cela serait essentiel. Il faut surtout que nos concitoyens respectent le code de la route. Nous on assume nos responsabilités. Lorsqu’il faut mettre un 70 km/h on le fait."
L'élu local met en avant les chiffres de son département : 25 personnes ont été tuées en 2019 contre 20 en 2022 malgré le retour à 90 km/h de 400 km de voiries locales. "Souvent les causes de ces décès sont la fatigue, l’alcoolémie et aussi l’usage de stupéfiants. Il faut de la prévention pour nos jeunes et une répression beaucoup plus forte. Passer de 90 à 80 km/h ce n’est pas l’alpha et l’oméga. Faisons confiance aux élus locaux pour faire un bon choix."
Le 22 août 2023, le Conseil départemental du Tarn a mis en place son plan canicule. Des températures dépassant les 40° sont attendues sur le territoire tarnais dans les prochaines journées.