Les "Composteurs du 107" regroupent 75 foyers sur les 560 occupant l'immeuble du 107 rue de Reuilly dans le 12ème arrondissement. Y sont produites chaque année huit tonnes de déchets, soit 3m3 d'un compost.
Il cueille une aubergine juste mûre, nourrie au "compost urbain", dans le jardin partagé qu'il a installé au pied de son immeuble parisien et la glisse précieusement dans la poche de sa veste croisée. Ex-cadre, passé "maître" dans l'art du compost, Jean-Jacques Fasquel a quitté les boutiques et la clientèle "bobo" d'une zone commerciale de la banlieue de Paris, pour se reconvertir dans le déchet et enseigner aux citadins l'art de transformer leurs ordures en ressources.
"Maître-composteur, c'est le maître-queux des déchets. J'ai suivi une formation pour maîtriser la composition des bacs de récupération, le processus chimique de décomposition, le rythme de dégradation des déchets et enseigner les bons gestes", résume-t-il.
Cette nouvelle vocation, Jean-Jacques Fasquel l'a trouvée au fond de sa poubelle : "J'ai décidé de changer de vie le jour où je me suis rendu compte qu'un tiers de ma poubelle était remplie de déchets organiques", dit-il.
A mi-chemin entre le chimiste et le jardinier, ce prof' écolo aux drôles de lunettes sans cercles n'a rien d'un ayatollah de la grande cause verte, mais tient plutôt du voisin sympa au tutoiement facile : "Ca, c'est l'effet compost, on vit tout de suite mieux ensemble", dit-il.
Pionnier du "compost urbain", collectivités et bailleurs font désormais appel aux leçons du maître pour mettre en place des systèmes identiques de proximité de traitement des déchets organiques : "Les déchets recyclés, c'est ça en moins à leur charge", explique-t-il.
Comme de la cuisine
"Si vous avez peur de vous salir les mains, il y a de l'eau et des gants", rassure Jean-Jacques Fasquel en entamant son cours, tout en plongeant à pleines mains dans le compost avant d'y planter son nez.
"Ca, c'est le millésime d'avril : ça sent la forêt, on a déjà quelque chose de joli, une belle couleur noire, une granulosité fine", décrit le maître.
Dans le bac suivant, les apprentis-composteurs vérifient la présence de macro-organismes : vers de terre, "des digesteurs, beaucoup plus petits que les vers de terre ordinaires", mille-pattes et cloportes, "le seul mollusque terrestre", précise le spécialiste, pinçant un spécimen entre ses doigts terreux.
"Le compost, c'est comme la cuisine", explique Jean-Jacques Fasquel: un mélange subtil de matière azotée (entendre épluchures de fruits, légumes, marc de café) et carbonée (feuilles sèches), saupoudré si possible d'un soupçon de calcium (coquilles d'oeufs), à mélanger régulièrement d'un bon tour de bras, environ une fois par mois. Six à huit mois plus tard, c'est prêt.
Dans un espace de vie restreint à celui d'un appartement, l'opération suppose que l'on s'y mette à plusieurs
Les "Composteurs du 107" regroupent 75 foyers sur les 560 occupant l'immeuble du 107 rue de Reuilly dans le 12ème arrondissement. Y sont produites chaque année huit tonnes de déchets, soit 3m3 d'un compost qui nourrira plants de tomates, pieds de thym, basilic ou citronnelle dans le jardin ou sur les balcons.
"Un Français jette en moyenne 50 kg par an de matière organique compostable", dit Jean-Jacques Fasquel. "L'élimination d'une tonne de déchets dans une décharge entraîne l'émission de 1.900 kg équivalent carbone, et seulement 2.5 kg avec le compostage", ajoute-t-il.