Mardi 22 avril, Nicolas Dupont-Aignan a présenté sa stratégie de campagne pour les élections européennes de 2014. Dans la même journée, il a allumé l'UMP Alain Lamassoure et Marine Le Pen, les ciblant comme principaux adversaires. Mais doit-il choisir l'un des deux pour assurer un résultat ?
Comment exister entre le Front national, chéri des sondages et une UMP de plus en plus tentée par l'euro-scepticisme ?
"Lamassoure est le monstre de l'Union européenne"
C'est le défi que doit relever Nicolas Dupont-Aignan. Ce mardi matin, il présentait les listes Debout la République pour les élections européennes du 25 mai prochain. Il avait donné rendez-vous à la presse à son QG de campagne qu'il a installé rue de Lille. Non très loin de l'adresse qui fut celle du siège du RPR à une lointaine époque.
Vous savez, cette période où il y avait encore des gaullistes historiques dans les murs et des convictions européennes plus ou moins affirmées. C'est aux électeurs de droite nostalgiques de ce temps que s'adresse Nicolas Dupont-Aigan. "Un retour aux sources", promet Dominique Jamet, le candidat de DLR en Ile-de-France. "Nous leur offrons une alternative, une possibilité de ne pas voter pour le parti qu'ils désapprouvent sans se trahir eux-mêmes", ajoute-t-il.
Le député de l'Essonne tape donc sur Alain Lamassoure, la tête de liste UMP en Ile-de-France dont l' "europhilie" est vivement critiquée par Henri Guaino et plus en sourdine par d'autres élus UMP. "Je comprends pourquoi Guaino ne veut pas voter pour Lamassoure, hein. Quand on voit ce qu'a voté Lamassoure... Lamassoure, il a voté le traité transatlantique, la remise en cause des retraites, l'augmentation du budget. Tout ce qu'il y a de pire, il l'a voté", déclare Nicolas Dupont-Aignan en égrénant un listing de tous les votes de ses adversaires au Parlement européen, son arme de guerre pour la campagne. "Monsieur Lamassoure c'est le monstre de l'Union européenne", conclut-t-il.
Le semaine passée, il lançait un appel au député des Yvelines pour venir le rejoindre. Pas de nouvelles depuis. "On n'a pas besoin de se contacter pour se voir, on se croise tous les jours à l'Assemblée nationale". Nicolas Dupont-Aignan ne désespère pas d'obtenir un soutien public même s'il sait que "Guaino votera pour lui dans le secret de l'isoloir". "Il a déjà fait un grand pas en disant qu'il ne voterait pas pour la liste Lamassoure", juge le président de Debout la République, heureux de voir un espace politique se libérer.
"Marine Le Pen perd son sang-froid"
Car sur sa droite, Nicolas Dupont-Aignan en manque cruellement d'espace. Les agenda peuvent parfois être cruels. Au même moment que la rencontre avec la presse, Marine Le Pen présentait ses têtes de listes pour les élections européennes. Un rendez-vous pertubé par une manifestation des Femen. Alors qu'en septembre 2012, il lui tendait la main dans un coup de sonde resté sans lendemain, aujourd'hui il la cible comme adversaire.
Lors de cette conférence de presse, la présidente du FN, qui se dispute avec Nicolas Dupont-Aignan les faveurs de Nigel Farage, le souverainiste anglais,
déplore que le leader de l'UKIP ait déclaré "que l'antisémitisme est inscrit dans l'ADN du FN". "J'ai essayé désespérément de trouver la raison qui le pousse à ces déclarations somme toute assez nouvelles, car par le passé il avait plutôt eu à notre égard un comportement courtois. Est-ce que peut-être nos assistantes sont moins jolies que celles de Nicolas Dupont-Aignan ? Ca pourrait être une raison", a-t-elle suggéré. Allusion possible à la tête de liste du député de l'Essonne dans la circonscription Est, Laure Ferrari, qui a été l'assistante parlementaire de M. Farage au Parlement européen.
Aussitôt dans un communiqué Nicolas Dupont-Aignan accuse Marine Le Pen "de perdre son sang-froid". "L'attaque de Marine Le Pen contre l'une de nos têtes de liste, qu'elle ose salir relève clairement des vieilles méthodes de l'extrême-droite", écrit-il. Reflexe protecteur de chef de troupe mais aussi stratégie politique de se poser en adversaire principal du FN ? "Je n'attaque pas Marine Le Pen, mais j'ai voulu répondre. Si on me cherche, on me trouve...Elle ne supporte q'un autre patriotisme existe,ça me choque ", explique-t-il à France3 Paris. "Les Français sortiront de l'Union Européenne avec des gens raisonnables", confiait-il aux journalistes un peu plus tôt. Bref, l'angle de différenciation avec le FN est trouvé. Pas sur le fond souverainiste mais sur la forme "d'un patriotisme modéré, serein, rassembleur et constructif".
Le choix de Dominique Jamet comme tête de liste en Ile-de-France correspond à ce profil. Ancien chevénementiste, comme Florian Philipot, et co-fondateur du site Boulevard Voltaire avec Robert Ménard. Mais contrairement au nouveau maire de Béziers, il na pas cédé aux sirènes du Rassemblement Bleu Marine. "Nous sommes le dernier rempart avant le Front national. Si nous n'existions pas, il y a certainement des gens qui diraient qu'il n'y a plus rien et que l'UMP et le PS, on n'en veut plus. Et bien là, il y a quelquechose qui les arrêtera sur cette route", explique Dominique Jamet qui concède néanmoins que "l'Ile-de-France n'est pas la région la plus anti européenne du pays".
Question de survie
"Ni système, ni extrême", résume son slogan de campagne. Mais, toujours le même serait-on tenté d'ajouter. Si la cohérence idéologique est sans doute une vertu, est-elle efficace politiquement ? Debout la République entame un second cycle de son existence. Le parti a été créé en 2008 et a concouru pour une première fois à des élections lors des européennes de 2009. Depuis il a participé à toutes les élections avec plus ou moins de bonheur s'installant dans le paysage politique mais à l'arrière-plan. Son score aux dernières législatives lui assure néanmoins un financement public. 500.000 euros par an qui lui offrent une petite sécurité.
Scores de Nicolas Dupont-Aignan et de Debout la République aux dernières élections en Ile-de-France
Mais Nicolas Dupont-Aignan sait bien que pour ce deuxième round électoral, il n'aura plus l'indulgence des premières fois et qu'il lui faut progresser. "De 2009 à 2012, c'était des campagnes de notoriété pour se faire connaître avec en point d'orgue la candidature à la présidentielle. Maintenant, il s'agit d'agir et de peser". Il fixe comme objectif d'avoir un élu dans chacune des huits circonscriptions de l'Hexagone. Une ambition un peu haute puisqu'il lui faudrait dépasser au moins les 5% à chaque fois. Un score qu'il na jamais obtenu jusqu'à présent. "Les temps sont mûrs. L'opinion est majoritairement réticente à l'Union européenne. Nous sommes dans la situation de l'URSS juste avant la chute du mur. Le système est en train de s'écrouler ", espère-t-il mettant en avant son certificat d'origine en souverainisme.
Et sinon, en cas de résultats décevants ? "On me reproche de ne pas faire plus de 2% au bout de trois ans d'existence. C'est déjà exceptionnel ce qu'on a fait. Regardez les scores de René Dumont et de Jean-Marie Le Pen en 1974. Les Verts et le FN ont mis 20 ans à s'installer", fait-il remarquer. "Normalement un mec qui sort du système, il ne survit pas", ajoute-t-il.
"Chaque élection européenne réserve son lot de surprise", promet Nicolas Dupont-Aignan, se rêvant comme un nouveau Philippe de Villiers, dont en 1999, la liste souverainiste avait devancé celle du RPR conduite par Nicolas Sarkozy. Mais à l'époque, le FN n'avait obtenu que 5% des voix.
Ajout. Mercredi 23 avril 20 h.
Nicolas Dupont-Aignan a mis en ligne ce soir une vidéo sur Dailymotion intitulée "les
La tête de liste UMP en Ile-de-France est plus que jamais la tête de turc du député de l'Essonne qui montre clairement que c'est parmi les eurosceptiques de l'UMP qu'il espère prendre des voix plutôt que du côté du FN.
Demain, jeudi 25 avril, Dominique Jamet qui conduit la liste Debout la République en Ile-de-France fera un discours devant le siège de l'UMP au moment même où Jean-François Copé tiendra une conférence de presse à l'interieur pour présenter les 8 têtes de liste de son parti aux européennes.