Des coiffeuses sans-papiers du quartier de Château d'Eau à Paris et la CGT du commerce, qui les soutient, ont porté plainte début août pour "traite d'êtres humains, travail dissimulé et faillite frauduleuse", a indiqué le syndicat vendredi lors d'une conférence de presse.
Depuis le 24 juillet, une vingtaines de salariées originaires de la Côte d'Ivoire, de la Guinée, du Nigeria ou du Mali, occupent à tour de rôle leur salon au 57, boulevard de Strasbourg, près de la Gare de l'Est. Elles étaient payées "à la tâche" (ce qui est illégal) près de 400 euros par mois en travaillant 7 jours sur 7, de 9H à 23H le soir. Elles se sont mises en grève le 22 mai et ont obtenu début juin, sous la pression de la CGT, des contrats de travail.
Mais, le 8 juillet, l'employeur a déposé le bilan. Salariées et CGT ont alors porté plainte le 6 août pour "traite d'êtres humains, faillite frauduleuse, escroquerie, conditions de travail indignes, abus de vulnérabilité, rétribution inexistante ou insuffisante", selon la CGT.
"On est dans un véritable système d'exploitation organisé de travailleurs vulnérables. Elles travaillent dans des conditions déplorables avec des produits chimiques achetés à bas prix", a déclaré Marilyne Poulain, responsable à la CGT du commerce parisien lors de la conférence de presse organisée dans le salon de coiffure. "C'est une zone de non-droit du travail. Il faut que les services de police enquêtent et assurent la protection de ces salariés", a-t-elle insisté.
Aminata (Guinée, 19 ans), Massandie (de Côte d'Ivoire, 25 ans), Aïcha (du Mali, 42 ans) témoignent toutes des intimidations des nombreux exploitants de salons du quartier. "On nous dit que c'est une cause perdue. Gagner le Smic à Château d'Eau, ce n'est pas possible ! Si nous perdons cette lutte pour obtenir des indemnités et des papiers, cela enverra un très mauvais signal pour les gens qui travaillent ici", a souligné Massandie. "Ils se moquent de nous et nous disent qu'on ne va plus jamais trouver du travail sur le boulevard", a poursuivi Aminata.
Dans l'après-midi, la CGT a écrit une lettre ouverte au Préfet de police de Paris, lui demandant une "protection immédiate" pour les salariés "par l'obtention d'un titre de séjour".
La CGT rappelle que dans la circulaire Besson (février 2009), "il est important que le salarié qui porte plainte puisse avoir accès au travail pour sortir du milieu dans lequel il a subi une exploitation" et "ne pas renouer avec le milieu de la traite ou de la prostitution".