Conflits d'intérêt, dirigeants aux rémunérations non contrôlées, contrats signés sans mise en concurrence, emprunts toxiques contractés sur les marchés financiers : la gestion de certains bailleurs sociaux est épinglée dans des rapports rendus publics par une association de consommateurs.
L'association de consommateurs CLCV (Consommation, Logement, Cadre de Vie) a rendu public mercredi 17 septembre 2014 un bilan édifiant de 51 rapports signés par la Mission interministérielle de logement social (Miilos), chargée du contrôle des bailleurs sociaux, datant de 2013, non publiés mais dont elle a pu obtenir communication. Il en ressort que "la gouvernance des bailleurs est très perfectible", dans la mesure, notamment, où "les conseils d'administration, et ainsi les représentants des locataires à ce conseil ne sont pas suffisamment informés et associés aux décisions", relève l'association.
Un certain nombre de dérives ont ainsi été constatées par la Miilos : "dans certains organismes HLM, des emprunts sont contractés avec imprudence sur les marchés financiers, des conflits d'intérêt ne sont pas prévenus, des mises en concurrence ne sont pas effectuées et les rémunérations des dirigeants sont déplafonnées sans contrôle". Certaines pratiques, certes "minoritaires", tempère la CLCV, nuisent directement aux locataires de HLM : les plafonds de loyer (à l'OPH Eure par exemple) et les niveaux d'augmentation de loyer (OPH Malakoff) ne sont pas respectés, certains logements ne sont pas aux normes y compris en matière de sécurité (OPH Clichy habitat). D'autres bailleurs sont "très en retard sur l'éradication de l'amiante", tels l'OPH de Seine-Saint-Denis.
Aussi la Miilos pointe régulièrement "les rémunérations de dirigeants des bailleurs sociaux, car les sommes distribuées sont parfois disproportionnées et parce que les règles de gouvernance sont trop souvent contournées". En outre des conflits d'intérêt naissent souvent du cumul des mandats sociaux assumés par ces dirigeants, au sein de filiales ayant des activités transversales. Une pratique pointée au sein de 10 bailleurs sociaux dont "le groupe Batigère, où certains administrateurs cumulent jusqu'à 27 mandats". Aussi 17 organismes ont été épinglés l'an dernier par la Miilos pour n'avoir "pas respecté les règles de mise en concurrence ou de transparence des contrats". Ainsi, "le bailleur parisien RIVP (régie immobilière de la Ville de Paris) n'observe pas les règles de la commande publique pour de nombreuses prestations".
Enfin, pour gérer leur dette, des bailleurs en "nombre substantiel"(dont la SA HLM Batigère Nord Est en Lorraine, Neolia dans le Doubs, OPH Lyon Habitat) ont eu recours à "emprunts toxiques", souscrits auprès de Dexia ou de la Caisse d'Epargne. Si ces emprunts à risques ne concernent qu'une "faible part" de l'encours de la dette de ces organismes HLM, ils devraient toutefois se traduire par des pertes conséquentes, dit la CLCV. L'association souhaite ainsi qu'une "disposition règlementaire prohibe la gestion active de la dette dans le champ du logement social". Car les HLM, ont déjà accès aux fonds déposés sur le livret A pour leur financement, à des taux très bas, plaide l'association de consommateurs qui compte plus de 400 administrateurs locataires au sein des organismes HLM.
La CLCV a mis en ligne sur son site l'intégralité des 67 rapports de la Miilos dont elle a obtenu communication.