Après trois jours d'horreur, l'heure du deuil et des questions dans une France traumatisée

L'heure du deuil après trois jours de sang et d'angoisse causés par trois jihadistes, de Charlie Hebdo à une épicerie juive de Paris: c'est une France soulagée mais traumatisée et traversée par de nombreuses interrogations qui s'apprête à manifester en masse à la mémoire des victimes.

Société
De la vie quotidienne aux grands enjeux, découvrez les sujets qui font la société locale, comme la justice, l’éducation, la santé et la famille.
France Télévisions utilise votre adresse e-mail afin de vous envoyer la newsletter "Société". Vous pouvez vous désinscrire à tout moment via le lien en bas de cette newsletter. Notre politique de confidentialité

Journalistes, policiers, employés, clients d'une enseigne casher: depuis l'attaque mercredi contre le journal satirique, qui a bouleversé le monde, le bilan est de 20 morts dont les trois assaillants. La compagne du preneur d'otage de l'épicerie casher, Hayat Boumediene, est quant à elle "toujours recherchée" dans l'enquête sur la fusillade mortelle de jeudi matin à Montrouge (Hauts-de-Seine).

Ce bilan, pour des actes terroristes en France, est sans précédent depuis au moins un demi-siècle et laisse un pays en proie à un profond traumatisme et à de nombreuses interrogations sur son dispositif de sécurité. Ces tueurs "sont des gamins de France" qui ont été "fanatisés ici", constate amèrement Libération. "Justice est faite" pour Le Figaro, qui estime cependant, comme l'a dit François Hollande vendredi soir, que "ce dénouement ne marque pas (...) la fin de la guerre engagée contre notre pays par des fanatiques".

Dans une vidéo diffusée vendredi soir, un responsable religieux d'Al-Qaïda dans la péninsule arabique (Aqpa), dont se sont réclamés les assassins de Charlie Hebdo, a d'ailleurs menacé la France de nouvelles attaques, sans toutefois revendiquer celles des trois derniers jours au nom de l'organisation. Après ce dénouement sanglant, place au deuil et aux démonstrations de force démocratiques. Dès samedi, des manifestations sont prévues à Lyon, Marseille, Nice, Toulouse, Lille, Lyon, Nantes mais aussi à Just-le-Martel (Haute-Vienne) où se tient un salon international du dessin de presse et d'humour.

Dimanche, surtout, une manifestation monstre (RDV 15h à République pour rallier Nation), en présence du président Hollande et de dirigeants étrangers, en premier lieu européens (Merkel, Cameron, Renzi, Rajoy, Tusk), devrait faire entendre la détermination de tout un pays à défendre ses valeurs en rendant hommage aux victimes.

'Il y a eu des failles'

François Hollande a appelé tous les Français à "se lever" dimanche, dans la capitale comme dans les grandes villes du pays, pour "porter ces valeurs de démocratie, de liberté, de pluralisme auxquelles nous sommes tous attachés". Son Premier ministre, Manuel Valls, a promis la mise en place de "moyens de sécurité massifs" à cette occasion.

Le chef de l'Etat a présidé une nouvelle réunion de crise samedi matin à l'Elysée pour faire le point sur les opérations des derniers jours et aborder les mesures de sécurité à venir, notamment pour la manifestation de dimanche.

Si les principaux protagonistes sont morts, une montagne de travail attend les enquêteurs pour déterminer d'éventuelles complicités. D'importants travaux d'analyse de téléphonie, de pièces saisies lors de perquisitions, d'éventuels flux financiers sont en cours. Le débat ne manquera pas d'investir le champ politique, ces attaques plaçant la France devant de nombreuses interrogations sur son dispositif de sécurité.

"Quand il y a 17 morts, c'est qu'il y a eu des failles", a déclaré Manuel Valls, rappelant les "centaines d'individus qui partent en Syrie et en Irak" où ils sont
"formés au terrorisme". La traque des auteurs de l'attentat contre Charlie Hebdo s'est achevée dans le sang vendredi: les deux frères Kouachi et un de leur acolyte, Amedy Coulibaly, se revendiquant pour les premiers d'Al-Qaïda et pour le troisième du groupe Etat islamique, ont été tués, ainsi que quatre otages dans un magasin juif de la capitale.

Un blessé grave de l'attentat contre "Charlie" reste entre la vie et la mort, a précisé le procureur. Les membres survivants de la rédaction sortiront mercredi
un numéro tiré à un million d'exemplaires: "Ce n'est pas la connerie qui va gagner", a promis le chroniqueur Patrick Pelloux.

François Hollande a salué "le courage, la bravoure, l'efficacité" des forces de l'ordre, tout en dénonçant la prise d'otages dans l'épicerie casher, menée par Amedy Coulibaly, comme "un acte antisémite effroyable".

Des liens "constants et soutenus" ont été établis entre les compagnes de Chérif Kouachi et Amédy Coulibaly, qui ont échangé "plus de 500 appels en 2014", a précisé le procureur de Paris François Molins. Amedy Coulibaly, délinquant multirécidiviste déjà condamné dans une affaire d'extrémisme islamiste, avait rencontré Chérif Kouachi en détention, où il s'est radicalisé.

La filière des Buttes-Chaumont

Il est également soupçonné d'être l'auteur d'une fusillade mortelle jeudi matin à Montrouge, près de Paris, tuant une policière municipale et blessant un employé. Le procureur a précisé que son ADN avait été recueilli sur une cagoule laissée sur place.

Dans des appels à BFMTV, Chérif Kouachi a eu le temps de dire qu'il avait été envoyé par Al-Qaïda au Yémen et Amedy Coulibaly s'est revendiqué du groupe Etat islamique (EI, actif en Irak et Syrie) et a dit s'être "synchronisé" avec les Kouachi pour les attaques.

Les deux hommes avaient été impliqués en 2010 dans l'enquête sur une tentative d'évasion de Smaïn Aït Ali Belkacem, ancien du Groupe islamique armé algérien (GIA), condamné pour un attentat dans le RER à Paris en 1995. Kouachi avait bénéficié d'un non-lieu. Coulibaly avait été condamné à cinq ans de prison en décembre 2013, peine qu'il a achevé de purger en mai compte tenu des remises de peine.

Les frères Kouachi, nés à Paris de parents algériens, étaient traqués depuis leur identification quelques heures après l'attentat contre Charlie Hebdo, qui a fait 12 morts. Tous deux étaient inscrits "depuis des années" sur la liste noire américaine du terrorisme. Chérif était bien connu des services français: surnommé Abou Issen, il avait fait partie de la "filière des Buttes-Chaumont" pour envoyer des jihadistes en Irak, où lui-même entendait se rendre en 2005 avant d'être interpellé. Il avait été condamné pour ces faits en 2008 à trois ans de prison, dont 18 mois avec sursis.

Selon plusieurs sources françaises et américaine, Saïd s'était rendu au Yémen en 2011 pour s'entraîner avec Al-Qaïda au maniement des armes. Son frère Chérif a également dit à BFM-TV qu'il s'était rendu dans cette place forte de l'islamisme radical.

Lors de l'attentat contre Charlie Hebdo, régulièrement menacé depuis la publication de caricatures de Mahomet en 2006, les assaillants ont crié "on a vengé le prophète". Des caricaturistes connus de tous ont trouvé la mort dans cette attaque, notamment Wolinski et Cabu, entraînant une journée de deuil national jeudi et de nombreuses manifestations spontanées marquées par le slogan "Je suis Charlie".

Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
Veuillez choisir une région
France Télévisions utilise votre adresse e-mail pour vous envoyer la newsletter de votre région. Vous pouvez vous désabonner à tout moment via le lien en bas de ces newsletters. Notre politique de confidentialité
Je veux en savoir plus sur
le sujet
Veuillez choisir une région
en region
Veuillez choisir une région
sélectionner une région ou un sujet pour confirmer
Toute l'information