Du haut de ses 50 mètres, le tripode de l'Insee est un emblème de la ville de Malakoff. La tour est menacée d'une démolition pour accueillir un bâtiment flambant neuf destiné aux ministères sociaux. La municipalité, soutenue par les habitants, a déposé un recours en référé-suspension pour l'arrêt des travaux.
À Malakoff, dans les Hauts-de-Seine, le projet de démolition-reconstruction du tripode de Malakoff – ancien siège de l'Insee entre 1975 et 2018 – divise toujours autant. Selon une information du Parisien, confirmée par la municipalité auprès de France 3 Paris Île-de-France, la ville de Malakoff a déposé un référé-suspension auprès du tribunal administratif de Cergy-Pontoise. Elle demande un arrêt immédiat des travaux qui auraient d'ores et déjà débuté au niveau de la cafétéria du bâtiment. Une audience est prévue le 8 septembre.
"On a été informés assez tard." L'heure était à la stupeur durant l'été, lorsque les élus municipaux de Malakoff ont appris le démarrage de la démolition d'une partie du bâtiment ce lundi 28 août, qui abritait la cafétéria de l'ancien siège de l'Institut national de la statistique et des études économiques (Insee). Aussitôt, une vingtaine d'habitants et d'opposants au projet se sont rassemblés, selon le quotidien, devant le chantier.
"Nous souhaitons que l'État respecte la procédure en produisant une étude environnementale sérieuse, justifiant ou pas son choix de démolir pour reconstruire"
Ville de Malakoffauprès de France 3 Paris Île-de-France
"Après la cafétéria, ce sera la tour… Outre que cette démolition ne va pas dans le sens d’une réhabilitation que nous souhaitons, elle pose une difficulté, car elle nous paraît illégale", témoigne Jean-Christophe Hanoteau, le président de l'association IN C' Malakoff à nos confrères du Parisien.
Contactée par France 3 Paris Île-de-France, la Ville de Malakoff demande une suspension des travaux, soulignant que la décision qui sera prise à l'issue de ce référé-suspension sera évidemment provisoire. La municipalité souhaite de l'État qu'il "respecte la procédure en produisant une étude environnementale sérieuse", avant la démolition du bâtiment existant, "justifiant ou pas son choix de démolir pour reconstruire."
Or, en lieu et place de ce tripode de 32 500 mètres carrés qui doit être démoli, l'État souhaite y installer les personnels de l'administration sanitaire et sociale au sein d'un "second grand site" des ministères sociaux. Ces ministères, ceux du Travail, de la Santé et des Solidarités, sont actuellement répartis sur quatre différents sites au cœur de la capitale.
"Afin de réduire la dépense immobilière, le ministère chargé des comptes publics a demandé aux ministères sociaux de limiter le nombre d’implantations (...) en recherchant une exemplarité énergétique et environnementale", se justifiait alors le secrétariat général des ministères des affaires sociales (SGMAS) dans la déclaration du projet de "nouveau grand site de l'administration centrale" en 2020.
"Le projet de second grand site des ministères sociaux, en ce qu’il est susceptible d’avoir des conséquences environnementales importantes, devrait être précédé d’une enquête publique. Or celle-ci n’aura lieu que fin octobre. Cela nous choque d’un point de vue démocratique car l’État ne tient pas compte de l’avis du public", ajoute Jean-Christophe Hanoteau auprès du Parisien.
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Si elle se réjouit de l'arrivée des ministères sociaux sur sa commune, une réhabilitation du bâtiment existant est plébiscitée par la municipalité malakoffiote, qui dénonce un "refus obstiné de l'État" de réaliser ce projet de démolition-reconstruction "en concertation avec la Ville".
Pour le député insoumis de la 11e circonscription des Hauts-de-Seine Aurélien Saintoul, l'État reste "sourd aux interrogations des élus" et doit "revoir sa copie", avait-il déclaré sur X – anciennement Twitter – en décembre dernier.
"Une aberration architecturale" et "écologique"
"Une aberration urbaine et architecturale, dont la compensation écologique n'est pas démontrée". C'est ainsi que la ville de Malakoff exprimait son refus au projet de l'État sur le domaine foncier de la tour Insee en octobre dernier. La municipalité redoute "une frontière" entre Malakoff et Paris avec le nouveau bâtiment, tandis qu'aujourd'hui, "la vie s'organise autour" du tripode de l'Insee.
Le conseil municipal avait ainsi adopté "un vœu exigeant l’arrêt immédiat du projet et le gel de toute intervention sur la parcelle de l’État", demandant à la Première ministre Élisabeth Borne un "dialogue constructif" pour respecter les demandes "légitimes" de la municipalité et de ses administrés "en faveur de la transition écologique et de son harmonie urbaine".
En avril dernier, élus et habitants opposés au projet s'étaient rassemblés sous les fenêtres du ministère de la Transition écologique dans le 7e arrondissement de Paris pour dénoncer une "aberration écologique", rapportait Dominique Trichet-Allaire, adjointe à la maire de Malakoff, chargée de la Transition écologique, sur X – anciennement Twitter. La maire communiste de Malkoff Jacqueline Belhomme était présente, en compagnie de Carine Petit, maire EELV du 14e arrondissement de Paris.
L'association IN C' Malakoff avait lancé une pétition contre le projet de démolition en mai 2022. Elle rassemble à l'heure actuelle plus de 19 000 signatures. Dénonçant un "gâchis environnemental énorme", l'association estimerait alors que près de "50 000 tonnes de béton" seront transportées sur les routes et "broyées" par près de "mille camions" pour la construction d'un bâtiment aux caractéristiques similaires "lui aussi en béton". "Ils détruisent de la surface de bureaux pour reconstruire exactement la même surface", ajoute la municipalité sur ce projet qu'elle qualifie comme étant "absurde".