PORTRAIT. Législatives 2022 : Marie-Caroline Le Pen, la politique en marche à l'ombre

L'aînée des trois filles Le Pen se présente dans la 6è circonscription des Hauts-de-Seine. Peu connue, longtemps en froid avec la famille suite au schisme mégrétiste, elle est aujourd'hui une militante de l'ombre du Rassemblement national. Les législatives la remettent en lumière. Portrait.

"J'aurais pu être zadiste mais j'ai choisi une autre voie". Marie-Caroline Le Pen se défend, au bout du fil, d'une vie en pilotage automatique, d'un parcours tout tracé et d'une trajectoire à la papa. Elle insiste : rien ne lui a été demandé par son père, "ça ne l'aurait pas enchanté mais j'aurais pu être de gauche, on a été élevé dans la liberté, sans rigidité intellectuelle." Aucune obligation donc de suivre l'idéologie familiale, "on savait qu'on avait raison, c'est tout ! Et que ce qu'on nous reprochait était injuste."  L'aînée des trois filles de Jean-Marie Le Pen et Pierrette Lalanne le souligne, le répète même : elle s'est construite elle-même, est tout allé chercher seule, et sait surtout ce que c'est,"le combat".

La "légende urbaine"

Elle trouvait qu'un entretien d'une demi-heure serait long. Il durera finalement le double. Marie-Caroline Le Pen est bavarde, explique ne jamais s'être battue pour être dans la lumière, "jamais", que sa soeur Marine aura "un grand destin", pas elle, "et puis voilà". Deux trajectoires.

Mais sa candidature ce mois-ci dans la sixième circonscription des Hauts-de-Seine lui vaut forcément quelques articles et caméras, un regain de lumière pourquoi pas, "on me reconnaît ici, c'est ma troisième candidature aux législatives". Les deux premières remontent. C'était il y a une trentaine d'année, en 1993 et 1995, elle se présentait sans succès face à Nicolas Sarkozy. 

Peu connue du public, dans l'ombre depuis des années de sa benjamine Marine, "Caro" comme on la surnomme, a longtemps disparue des radars politiques après son ralliement temporaire à Bruno Mégret en 1998. La brouille a été monumentale dans la famille. "Je n'ai jamais eu de plan de carrière vous savez." Elle se justifie, on ne sait pas, elle réfute en tout cas cette "légende urbaine" qui voudrait qu'elle ait été élevée pour succéder à son père. Alors elle y va et coupe les phrases, reprend en main son récit, "loin des fantasmes de journalistes."

Elle raconte donc sa vérité : son enfance peu protégée, harcelée à l'école, "pas simple le nom Le Pen", et la mort vue de près dans l'attentat "au domicile", puis à Saint-Cloud le manoir Montretout, son passage éclair au Figaro sous le nom de Duick, "clin d'oeil à Tabarly", ou bien sa soeur Yann, "un temps G.O au Club Med". On parle d'elle, elle parle du parti. On parle du passé, elle parle d'aujourd'hui. Elle tient la barre de l'interview, on l'admet, mais on décide de la lui laisser. Pour voir, écouter.

Tout y passe, ou presque : sa nièce Marion, la Trinité-sur-mer, "son port d'attache", Jordan Bardella qui "non" n'est pas son "beau-fils", "ils ne sont pas mariés", et cette macroniste de Constance Le Grip dans la circo, on en parle, "alors qu'elle était LR avant, il lui passe quoi par la tête ?" Nous, on ne change pas, ce sont des mercenaires politiques" ces gens. Le mariage gay, elle a fait la manif pour tous oui, mais bon..."maintenant il y a plus grave", sinon le Stade de France, quel scandale..."on va où, là ?" 

Sur la défensive quand même. "On faisait ce qu'on voulait, je vous dis". Elle y revient à cette lignée Le Pen dont elle aurait pu s'affranchir sans mal si ça avait été son "choix""On a du mérite d'avoir suivi cette voie vous savez, rien ne nous a été donné tout cuit dans la bouche. Tout le contraire d'une dynastie".

"Arguments de CM2" et plafond de verre

Sa circonscription lui est défavorable, Marie-Caroline Le Pen le sait, elle va "sûrement perdre". "Mais le but d'une élection n'est pas forcément d'être élue", précise-t-elle. Et puis "la politique permet de rester jeune", plaisante t-elle. Son rire est le même que celui de sa soeur. Franc, fort. Son timbre de voix aussi est reconnaissable bien que plus feutrée.

On lui avait pourtant proposé un territoire plus propice à la victoire pour ces législatives, mais elle a refusé. On lui lit alors un bout d'article d'un confrère qui s'interroge " Marie-Caroline Le Pen a-t-elle peur d'être élue ?". Bonne question. "La blague", coupe t-elle de suite, "Marie-Caroline n'a peur de rien !". 

"Catholique, nationaliste et moderne", selon ses dires, on lui demande ce que signifie "moderne" au juste. "Moderne, c'est le RN", répond-elle, laconique. On ne la relance pas. Après un silence, elle finit par développer d'elle-même. "Un parti dont le président a 26 ans et qui a une femme à sa tête..." Alors, on insiste, on lui redemande : "moderne", ça signifie quoi, pour elle. Marie-Caroline Le Pen tergiverse sur sa réponse, rechigne à la formuler, tourne sa langue dans sa bouche. "Je suis de mon temps et je ne regarde jamais en arrière".

Elle en vient à ce "plafond de verre" dont on parle pour sa soeur, ça elle ne le comprend pas. "Pourquoi la gauche et les LR font ça, un 'barrage', c'est quoi le truc ?" On l'aide un peu et on lui glisse : "le racisme", "le facisme"Elle s'époumone, nous répond "manoeuvres politiques !". Le racisme, non, elle n'a "jamais entendu personne faire barrage pour ça". "C'est une invention, un argument complètement minable. 'Fasciste', 'raciste', des trucs de CM2 ça. En quoi, on est raciste ? On ne parle plus de 'préférence nationale' mais de 'priorité nationale', c'est plus subtil". Subtil, oui.

Wokisme et bonne foi

Marie-Caroline Le Pen parle de la bonne foi à avoir en analyse politique, et de sa foi à elle qui l'anime toujours. Non il y a forcément d'autres raisons pour ces "barrages". "Ou alors, on nous veut pas au pouvoir, point barre". Elle se marre. Rire jaune. Elle enchaîne, passe en revue tout ce qui ne va pas. Darmanin reconduit, Zemmour qui divise, et Pap Ndiaye, ce "wokisme racialiste, on s'y arrête ?". La gauche, Les LR, tout le monde y passe. "Il se passe quoi là ?", ponctue-t-elle entre chaque cible. 

Mais Marie-Caroline Le Pen prend plaisir à la faire cette campagne, il ne faut pas croire, peu importe le résultat d'ailleurs, ça requinque. Et puis, vu les constats pas folichons et "les arguments piteux en face", elle nous le dit avant de raccrocher, c'est l'heure du déjeuner, faut y aller : "On finira bien par y arriver, vous savez".

 

Dans la 6è circonscription des Hauts-de-Seine, se présentent : 

  • RECONQUÊTE : Franck Keller
  • RASSEMBLEMENT NATIONAL : Marie-Caroline Le Pen
  • LES RÉPUBLICAINS : Patrick Pessis
  • DIVERS DROITE : Benoît AGUELON
  • ENSEMBLE : Constance Le Grip (députée sortante)
  • DISSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE EN MARCHE ! : Fayza Basini
  • DIVERS CENTRE : Frank Tapiro
  • DIVERS CENTRE : Adama Traoré
  • UNION DES DÉMOCRATES MUSULMANS FRANÇAIS : Bilèle Khadour
  • DIVERS ECOLOGISTES : Denis Marie Marchiset
  • NOUVELLE UNION POPULAIRE ÉCOLOGIQUE ET SOCIALE  : Julie Barbaux
  • LUTTE OUVRIÈRE : Françoise MARCEL 

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