Yann a été suspendu en octobre 2021 de l'unité psychiatrique où il exerçait dans les Hauts-de-Seine n'étant pas vacciné contre le Covid-19. Il est soulagé par la réintégration des personnels soignants non vaccinés.
C'est une bonne nouvelle qui attendait Yann dans sa boîte aux lettres : un courrier recommandé pour un entretien avec la direction des ressources humaines de l'unité psychiatrique où il travaillait avant sa suspension en octobre 2021. "Je suis content que cette suspension s’arrête. J'étais dans un flou permanent pendant presque deux ans, sans revenus, sans sécurité, donc cela me rassure. Mais je ne suis pas totalement satisfait, car il va falloir digérer cette mise à l’écart après 20 ans de bons et loyaux services dans la structure."
En effet les personnels soignants non vaccinés au covid-19, suspendus de leur fonction depuis août 2021, vont pouvoir retourner au travail. Le gouvernement a publié ce dimanche le décret au Journal officiel.
Un retour après dix-neuf mois de suspension
Le jeune homme a été suspendu pendant dix-neuf mois de l'établissement hospitalier* dans le lequel il travaillait comme infirmier. Mais il craint de ne pas retrouver un poste équivalent à celui qu'il occupait avant la crise sanitaire.
Selon lui, les personnes qui l'ont remplacé durant son absence ont été embauchées en CDI sur son poste : "J'ai été en quelque sorte comme éjecté, et il n'y a pas de place en psychomotricité. Je ne sais pas quelle affectation va m’être proposée. Normalement la direction est censée me proposer un poste à compétence équivalente et dans un même périmètre géographique."
Yann dit avoir mal vécu sa suspension et la manière dont la mesure a été appliquée par la direction de son établissement. Il affirme que certains de ses collègues suspendus n'étaient pas forcément contre la vaccination, tout comme lui : "Certains collègues étaient vaccinés mais n'ont pas apprécié l'obligation de fournir la preuve de leur schéma vaccinal complet."
Quelques milliers de personnels soignants suspendus, sans rémunération
L'obligation de se vacciner a été requise auprès de 2,7 millions de personnes, soignants mais aussi personnels des hôpitaux et des maisons de retraite, ambulanciers, aides à domicile ou encore pompiers. Faute d'attester d'un schéma vaccinal complet (deux, puis trois doses), quelques milliers ont depuis été suspendus, sans rémunération. En mars, le ministère de la Santé estimait ainsi qu'"autour de 0,3%" des agents hospitaliers avaient été suspendus pour avoir refusé l'obligation vaccinale.
La décision de réintégrer à partir de mi-mai le personnel soignant non vacciné fait suite à l'avis favorable de la Haute autorité de santé (HAS) donné fin mars à la levée de l'obligation vaccinale contre le Covid pour les soignants et les autres professionnels concernés.
Ce décret de réintégration ne rassure pourtant pas Yann. "Si ça reste un décret, on n’est pas à l’abri d’être suspendu à nouveau dans quelques mois. D’un point de vue général, être sous la menace d’une telle mesure, n’est pas facile à vivre", assure-t-il.
Des petits boulots et la manche
Nous avions rencontré le jeune soignant en juin 2022, huit mois après sa suspension. Sans ressources, il vivait alors de petits boulots et faisait la manche. "J'ai arrêté de faire la manche et les petits boulots depuis hier. Ça a été une période compliquée, j'ai eu des moments de colère puis je me ressaisissais. Je ne me sentais pas du tout considéré. Il y a une forme de déshumanisation", avoue-t-il.
À quelques jours de son retour au travail, Yann se réjouit mais appréhende le regard de certains de ses collègues envers les personnels suspendus.
*Par soucis de confidentialité, Yann n'a pas souhaité communiquer le nom de l'établissement dans lequel il travaillait.