Covid-19: "Malgré la réintégration des soignants non-vaccinés suspendus, les tribunaux n'ont pas fini d'être saisis"

La Haute Autorité de Santé avait donné un avis favorable à la réintégration des personnels soignants non-vaccinés. Elle a été suivie aujourd'hui par l'Assemblée Nationale contre l'avis du gouvernement. L'obligation vaccinale des personnels soignants a été abrogée. Nous republions l'entretien que nous avait accordé Me Tarek Koraitem. L'avocat au barreau de Versailles est un ardent défenseur des personnels suspendus.

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" C’est une nouvelle inespérée, elle va au delà du projet au rabais proposé par le ministre de la santé avec son décret." Joint par téléphone, Me Tarek Koraitem ne cache pas sa satisfaction, lui pour qui la réintégration des personnels suspendus est un cheval de bataille. "Il faut rester prudent, il faut que cette loi aille au bout de processus législatif et soit votée par le Sénat. Les employeurs en revanche s'exposent toujours à des procédures pour verser les arriérés de salaire. C'est à l'Etat d’assumer les conséquence d’une loi scélarate à l'encontre de certains soignants, adoptée en 2021 sans débat parlementaire. Les tribunaux n’ont pas fini d’être saisis pour indémniser les agents de la fonction publique, en réparation du préjudice causé du fait de la loi."

En août 2021, l'avocat Tarek Koraitem apprend comme la France entière l'instauration d'un passe sanitaire, et dans son département natal des Yvelines de la mise en œuvre d'un arrêté préfectoral obligeant la présentation d'un QR-code dans les centres commerciaux. "Devoir présenter un QR-code pour aller acheter un pack d'eau, des pâtes ou du dentifrice. J'ai trouvé cette mesure liberticide".  Avec un de ses confrères, Me Yoann Sybille, il obtient la suspension de cet arrêté. "Les personnels suspendus se sont naturellement tournés vers moi pour me demander de l'aide afin d'essayer d'être réintégrés car ils considéraient ces mesures attentatoires à leurs libertés fondamentales. La première est le libre choix des soins qui est le BA-BA en démocratie".

Me Koraitem, on vous sent irrité quand on résume la question des suspendus aux seuls soignants? 

Effectivement, il ne faut pas résumer cela aux soignants suspendus, cela concerne toutes les professions qui ont été soumises à l'obligation vaccinale: les pompiers mais aussi la technicienne de surface qui de temps en temps va faire le ménage dans un hôpital, la secrétaire de bureau qui n'a jamais fait un jour d'étude de médecine mais qui travaille dans une clinique etc etc... Cela concerne essentiellement une catégorie de la population, des femmes d'un certain âge, avec des revenus très peu élevés et qui se sont retrouvées du jour au lendemain sans salaire pour avoir fait valoir une question de conscience.

Moi je ne suis ni pour ou contre la vaccination, je suis pour le libre-choix des individus quel que soit le motif d'un refus de vaccination.

Tarek Koraitem

Cela a concerné à la fois des agents de la fonction publique qui ont relevé des tribunaux administratifs et cela a concerné également des salariés du secteur privé qui relevait de la compétence des Prud'hommes. C'est un combat sur deux fronts juridiques.

 

Quels sont les arguments que vous mettez en avant pour plaider la réintégration des suspendus ? 

Devant le tribunal administratif, et c'est un argument qui a été validé par le Conseil d'Etat, c'est que les soignants qui étaient en arrêt maladie ou en congés ne pouvaient pas être suspendus. On a eu initialement des institutions comme l'AP-HP par exemple qui ont fait du zèle, qui n'ont pas hésité à suspendre des gens qui ne travaillaient pas et dont l'administration a suspendu le versement des salaires. Pour le secteur privé, l'argument principal a été l'obligation de reclassement du salarié suspendu et l'exécution de bonne foi du contrat de travail par l'employeur. 

Il faut comprendre que cette loi a été appliquée avec un zèle et une brutalité inouïes.

Tarek Koraitem

J'ai le cas d'une femme qui travaille pour un groupe hospitalier privé, qui n'est absolument pas infirmière ou soignante, elle travaille dans un bureau pour des tâches administratives. Le bureau est situé dans un immeuble bourgeois de Paris où vivent des familles et pourtant elle a été suspendue au motif qu'elle n'était pas vaccinée... alors qu'elle croise tous les jours dans l'immeuble des gens qui ne sont pas vaccinés! C'est une loi sans queue ni tête! Il y a des situations vraiment ubuesques.

Pourquoi êtes-vous aussi investi sur le sujet alors que vous êtes pénaliste et non pas avocat spécialiste du droit du travail ?

Le mépris dont les soignants ont fait l'objet m'a touché. Il était tout à fait possible de leur dire "on comprend que vous ayez des réticences, on va vous réorienter vers un autre emploi et trouver une solution". Ce qui m'a également choqué c'est la catégorie de population visée: les personnes qui sont venues me voir ne sont pas des millionnaires ou des bourgeois mais vraiment les plus faibles de la population. En général des femmes d'un certain âge qui ont exercé ce métier d'infirmière, de secrétaire ou d'agent d'accueil pendant parfois 20 ou 30 ans et qui ont été traitées avec brutalité.

Enfin, la manière dont certains conseils des Prud'hommes les ont traitées en les déboutant en dehors de l'application de toute règle de droit, et en plus en ayant l'audace de les condamner au dépend, c'est à dire leur faire payer les frais d'avocat de la partie adverse alors qu'ils n'ont plus de salaires. Ce sont des méthodes coercitives pour obliger les gens soit à crever au bord de la route, soit à se faire vacciner. Pourtant on ne parle pas de criminels, on ne parle pas de délinquants mais de personnes qui ont voué leur vie à sauver des vies comme les pompiers ou à soulager les douleurs des uns et des autres pour les infirmières. Les traiter de cette façon-là est scandaleuse.

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