L'équipe du professeur Laurent Lantieri, à l'hôpital Georges Pompidou à Paris, a révélé avoir effectué pour la deuxième fois une greffe totale du visage sur Jérôme Hamon, déja greffé par la même équipe en 2010. Une première mondiale
Il est devenu "l'homme aux trois visages", un cas unique au monde à ce jour. Jérôme Hamon, à qui le professeur Laurent Lantieri avait déja greffé un visage en 2010, a subi une nouvelle greffe, à la mi-janvier 2018, après avoir rencontré un problème imprévu.Le professeur Laurent Lantieri et son équipe, déja spécialistes mondiaux d'une opération extrêmement complexe et rare, réussissent ainsi une première mondiale absolue : aucun autre homme n'a jamais ainsi subi deux fois cette greffe. Aucun autre homme n'a ainsi eu trois visages différents dans sa vie !
Refaire un parcours extrêmement difficile
Toujours hospitalisé trois mois après son opération à Paris, Jérôme Hamon est apparu mardi 17 avril, le visage encore lisse et immobile, qui n'a pas encore épousé les traits de son crâne. Cela devrait venir peu à peu, à condition que soit bien suivi le traitement immunodépresseur empêchant un nouveau rejet.
Et bien sûr, la première question qui vient, en face d'un tel cas, c'est celle de son acceptation de sa nouvelle apparence, de sa nouvelle identité qu'il doit à nouveau assumer. L'étape est difficile en soi, pour tout greffé du visage. Mais dans l'histoire de Jérôme, c'est la deuxième fois qu'il doit prendre sur lui et franchir cette épreuve.
"Je me sens très bien", a dit le greffé, âgé de 43 ans, trois mois après son opération dans la nuit du 15 au 16 janvier, lors d'une rencontre avec des médias la semaine dernière. "J'ai un nouveau visage, certes, mais c'est mon visage" dit Jérôme Hamon dans les colonnes du Parisien.
Maladie génétique déformante
Depuis sa naissance, Jérôme Hamon, 41 ans, est atteint de neurofibromatose de type 1 (maladie de von Recklinghausen), une maladie génétique qui a déformé son visage.
En 2010, à l'hôpital Henri Mondor de Créteil, le professeur Laurent Lantieri l'opère et lui greffe un visage complet. Il y a alors très peu de temps que l'on pratique de telles greffes dans le monde.
C'est en France, en 2005, que le professeur Bernard Duvauchelle, du centre hospitalier d'Amiens, pratique, en collaboration avec le professeur Jean-Michel Dubernard, de Lyon, pour la première fois au monde, une greffe du visage.
L'opération de 2010 se déroule parfaitement. Mais la même année, à l'occasion d'un banal rhume, Jérôme Hamon est soigné par un antibiotique incompatible avec son traitement immunodépresseur. En 2016 il commence à montrer des signes de rejet chronique, et le visage se dégrade.
2 mois sans visage
À l'été 2017 il est hospitalisé, et en novembre, son visage greffé, qui présente des zones de nécrose, doit lui être retiré.
Jérôme Hamon restera deux mois "sans visage" en réanimation à Pompidou, le temps que l'Agence de la biomédecine signale un donneur compatible. Des moments difficiles à vivre, avec un faciès d'écorché vif. "Toute l'équipe en réanimation a été époustouflée par le courage de Jérôme, sa volonté, sa force de caractère dans une situation tragique. Parce qu'il est alors dans l'attente, et que jamais il ne s'est plaint. Il était même plutôt de bonne humeur", raconte Bernard Cholley, anesthésiste-réanimateur.
Le donneur de visage sera un jeune homme de 22 ans, décédé à plusieurs centaines de kilomètres de Paris. Le Professeur Lantieri l'apprend un dimanche soir, le 14 janvier. Jérôme Hamon est entré au bloc opératoire le lundi 15 janvier 2018, à la mi-journée. Le patient ressortira du bloc le mardi 16 en fin de matinée, au terme d'une opération hors normes.
"L'opération répond à une question qui était de l'ordre de la recherche: est-ce qu'on peut refaire une greffe du visage? Oui, on peut retransplanter, et voilà ce qu'on obtient", explique le Professeur Laurent Lantieri.
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