Jean Spiri : "la lutte contre le VIH est une des priorités de Valérie Pécresse"

Jean Spiri vient d'être nommé président du CRIPS, l'organisme de la région chargé de l'information sur le sida. Pour France 3 Ile-de-France, et alors que notre région reste touchée par le VIH, il détaille sa feuille de route et explique l'engagement de Valérie Pécresse sur la question. Entretien.

Jean Spiri a pris la succession de Jean-Luc Roméro-Michel à la tête du CRIPS. Le centre régional d'information et de prévention du sida est un des organismes affiliés au conseil régional d'Ile-de-France. Comme ce dernier, il est donc soumis à l'alternance politique. Jean Spiri, âgé de 33 ans, élu LR de Coubevoie est devenu conseiller régional en décembre dernier. Il appartient à l'aile modérée de son parti, co-fondateur de la tendance "Une droite d'avance".

Pour France 3 Ile-de-France, et alors que la contamination par le sida ne recule pas à Paris et dans la région, il détaille les pistes des nouvelles missions du CRIPS pour tenter d'enrayer la maladie. Son principale objectif : 

Faire de la génération qui naît aujourd’hui la première génération sans sida depuis trente ans dans notre Région"
comme il est écrit sur le site du CRIPS


D'un point de vue plus politique, il répond aux interrogations de ceux qui s'inquiètent de la nomination d'une élue de Sens Commun à la présidence de la commission famille de la région. Il tente de les rassurer en expliquant que "la lutte contre les discriminations est une des priorités de Valérie Pécresse".

Pourquoi avez-vous été choisi par Valérie Pécresse et quelles sont vos compétences sur ces questions-là ?

Jean Spiri : "J’ai été conseiller du ministre de la Santé, il y a dix ans, pendant quelques années. Et quand j’ai travaillé aux côtés de Xavier Bertrand, j’ai eu l’occasion de m’intéresser aux problématiques de lutte contre le sida et aux problématiques de lutte contre les discriminations. J’ai vécu plusieurs déplacements, dont l’un dans un centre pour les malades, qui m’a beaucoup marqué et qui m’ a donné envie de m’investir beaucoup plus dans cette lutte. C’est un sujet sur lequel j’ai beaucoup travaillé. J’ai pris de nombreux contacts avec les associations. C’est un engagement qui ne m’a jamais quitté. Et c’est pour cela que Valérie Pécresse m’a choisi pour prendre la responsabilité de président du CRIPS.

Est ce que c’est facile de succéder à Jean-Luc Roméro, qui comme personne séropositive, incarnait jusque dans sa chair, ce combat contre le sida ?

"C’est particulier. Il faut d’abord rendre hommage à Jean-Luc Romero, qui par son action militante dans la lutte contre le VIH mais aussi dans son action comme président du CRIPS, a beaucoup fait pour faire avancer la prévention, le dépistage et les missions d’information auprès des jeunes. C’est vrai que j’ai la difficile charge de succéder à une grande figure. Moi, j’ai d’autres atouts. J’ai un parcours qui est moins militant c’est vrai mais qui est plus technique. Cela ne m’empêche d’avoir des convictions et une volonté politique qui est très forte et de les exprimer au travers des actions que nous allons mener au CRIPS".

Justement le premier critère pour juger de votre volonté politique va être le budget. En cette période d’économie, le budget du CRIPS va-t-il diminuer ?

"On n’est pas encore à ce moment là des discussions budgétaires. Ce dont on est assuré, c’est que la lutte contre le VIH fait partie des priorités de Valérie Pécresse. Elle l’a exprimé pendant sa campagne dans son programme sur la santé. On a aussi la volonté avec toutes les équipes, de faire mieux mais avec le même budget. Et d’aller chercher des économies. On peut tous faire des économies. On a des questions de locaux, de déménagement potentiel. On a  surtout de nouveaux partenariats à nouer. On a aussi la capacité au CRIPS d’aller chercher de l’argent. C’est un peu mon ambition. A chaque nouvelle action doit  répondre en parallèle un nouveau partenariat. Pour qu’on puisse financer des programmes nouveaux. On fait déjà beaucoup. Mais si on veut lancer des actions nouvelles, il faut aller chercher les financements de manière un peu innovante".

C’est à dire se tourner vers le partenariat privé ?

"Ca peut-être du partenariat avec des fondations du secteur privé ou des acteurs du secteur privé. Mais toujours dans le respect d’une éthique. On est dans le domaine de la santé qui est un domaine très sensible. Pour le CRIPS, qui est une institution publique, l’objectif n’est pas d’aller chercher à tout prix des financements, notamment d’entreprises privées de la santé mais plutôt de chercher à travailler avec les fondations. Je prends l’exemple de l’action qu’a le CRIPS dans les prisons. Il y a de nombreuses fondations qui s’occupent de la santé des détenus ou des conditions de vie en prison. Et aujourd’hui, ces fondations ne sont pas partenaires du CRIPS. Voilà un exemple d’une nouvelle source où nous pourions aller chercher des financements. 

Le CRIPS, il y a quelques années avait un espace d’accueil du public qui s’appelait le Cyber Crips. Ce local a fermé. Nous n’avons plus de local d’accueil du public. Aujourd’hui on aimerait retrouver un bâtiment qui nous permette d’acceuillir non seulement les 50 salariés du CRIPS mais aussi un espace pour recevoir le public car c’est quand même dommage de ne plus en avoir".

Beaucoup reprochent à Valérie Pécresse d'avoir nommé une élue de Sens Commun, émanation de "la Manif pour tous", à la tête de la commission famille de la région. Etes-vous une sorte de contrepoids politique ?

"Le CRIPS dépend de la commission santé. Je le précise au passage. Je crois que la lutte contre les discriminations est une question de santé publique. Ce n’est pas qu’un enjeu de santé publique mais c’est aussi un enjeu de santé publique.

Toute personne qui voudra s’investir au sein la région pour la santé devra avoir à coeur la lutte contre les discriminations.


Ce n’est pas possible autrement. Je ne suis pas un contrepoids. Je ne juge personne. Les uns et les autres doivent faire la preuve de leur engagement dans la lutte contre les discriminations, mais si on veut parler sérieusement et réellement de santé publique, il faut faire de la lutte contre les discriminations une priorité".



Vous serez observé de près sur cette question là ?

Pourquoi ? (rires). Valérie Pécresse a été très claire pendant la campagne sur sa volonté de ne pas baisser les crédits pour les associations de lutte contre le VIH ou les associations de lutte contre les discriminations. Je sais qu’il y a eu le débat sur les associations qui soutiennent des objectifs politiques et elle aura bientôt l’occasion d’en discuter avec les principaux intéressés qu’elle recevra. C’est très important de montrer par les actes que l’on est fidèle à cette ligne de conduite, c’est-à-dire de poursuivre l’engagement de la région et même parfois de l’augmenter dans la lutte contre les discriminations. Je n’ai pas d’inquiétude là-dessus. En revanche, il faut un peu dépolitiser ces questions. On n’est pas sur des questions gauche/droite mais sur des questions républicaines et humaines.

Quelles sont les missions du CRIPS ?

"Les missions du CRIPS à la base ce sont la prévention, l’information et la formation dans deux directions. D’abord la formation dans les lycées et les CFA auprès des jeunes pour bien leur apprendre les moyens de se protéger du VIH. 150.000 jeunes par an. Mais aussi lutter contre les discriminations et parler d’éducation sexuelle. Et puis la formation, ça c’est très important, auprès des professionnels de la santé publique, des travailleurs sociaux et de tous ceux qui interviennent dans ce domaine. Les professionnels de santé ne sont pas aujourd’hui toujours bien formés au parcours de soins des personnes séropositives et à la prévention du VIH. Surtout c’est très important de développer une écoute, de bon réflexes, une approche qui soit non jugeante. Par exemple. Entrer dans une pharmacie et demander un auto-test de dépistage n’est pas toujours évident. Depuis qu’ils sont vendus dans les officines, le CRIPS a lancé des formations auprès des pharmaciens".

  • 57% des étudiants en Ile-de-France n'utilisent pas le préservatif à chaque rapport. La moyenne française est de 43%. Parmi eux, 14% des étudiants et 9% des lycéens ne se protègent jamais.

    enquête de la Smerep, la sécurité sociale des étudiants, réalisée en novembre 2015.

Selon les dernières enquêtes d'opinion, les jeunes utilisent moins le préservatif. Cela vous inquiète-t-il ?

"Inutile de vous dire que ces chiffres sont extrêmement inquiétants. Il y a tout un discours de prévention à recréer. Il faut aller vers de nouvelles populations qui sont de moins en sensibles à ces discours et notamment les jeunes. On va essayer de déployer de nouveaux outils numériques. Il y a eu une application qui a été crée par le CRIPS, il y a quelques mois à destination des jeunes homosexuels. On va essayer de l’améliorer car honnêtement elle est perfectible. On lance le 15 mars une application pour les femmes séropositives qui sont un groupe qui a besoin de communiquer et qui n’est pas toujours considéré par les politiques de prévention et d’accompagnement. On va essayer de développer ces outils numériques, parce que c’est là qu’il faut aller parler aux jeunes de façon évidente".

Un nouveau type de prévention se met en place qui combine le préservatif, des dépistages plus fréquents et aussi la prise d'un médicament antiretroviral, (procédure PREP). Est-ce l'avenir pour lutter contre la contamination par le VIH ?

"La France est en avance, car on est le premier pays en Europe à avoir mis sur le marché ce traitement. Mais ce traitement est ciblé sur des populations à risque. Ce n’est pas un traitement qui se prend de manière anodine. Il est destiné à des personnes qui ont des prises de risque répétées. Mais, il ne faut pas que la prise de ce médicament préventif (la PREP) soit quelquechose de jugeant. On ne montre pas du doigt en disant ta vie sexuelle est débridée, alors tu prends ce médicament. C’est un élément complémentaire de prévention important . Quand on voit les résultats à San Francisco où le nombre de contamination a dimniué de moitié en un an , on se dit que ce médicament bien utilisé et combiné avec les autres éléments de prévention, peut permettre de vraiment changer les choses.

C’est ce qu’il y a de vraiment crucial dans cette période. Elle est à la fois inquiétante car il y a une vraie recrudescence de l’épidémie en France et singulièrement à Paris et dans la région et en même temps on a de nouveaux espoirs d’inverser les courbes de contamination aussi bien par les nouveaux moyens de dépistage que par les nouveaux moyens de prévention. A la fois vigilance extrême car mauvaises courbes et à la fois vrai espoir d’avoir une politique globale plus efficace contre le VIH".


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