Comment les boulangeries-pâtisseries se préparent-elles à l'Épiphanie?

Qui dit "Épiphanie", dit "galette des rois". Depuis plusieurs siècles, manger cette pâtisserie est devenu une tradition quand vient le 6 janvier. Une tradition qui nécessite toutefois une bonne organisation en amont.

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Il est presque midi, ce mercredi 5 janvier 2022. Une agréable odeur de pâte feuilletée beurrée et de frangipane envahit les narines de ceux qui entrent dans la boulangerie-pâtisserie "Le temps et le pain" (XIVème arrondissement). Dans la vitrine et sur le présentoir à l’intérieur de la boulangerie-pâtisserie, une vingtaine de galettes des rois est exposée.

Tablier blanc ajusté, casquette marron sur la tête, sans oublier le masque chirurgical, le directeur de l’établissement Alexis Borychowski s’occupe de la vente pendant que le reste de l’équipe travaille aux fourneaux. Une cliente rentre. "Je voudrais une galette. Il m’en faut une pour cinq personnes s’il vous plait", demande-t-elle. Deux choix s’offrent à elle : la désormais bien connue galette dite "parisienne" — avec de la frangipane — ou une galette aux noisettes, de forme carrée. C’est cette dernière qui est choisie.

Comme la plupart des boulangeries de la région, "Le temps et le pain" prépare ses fournées de galettes en prévision de l'Épiphanie, ce jeudi 6 janvier. Une fête durant laquelle — comme le veut la tradition — on se partage une galette généralement en famille ou entre amis. Cette appellation fait référence aux Rois mages qui apportèrent des cadeaux pour la naissance du Christ, né quelques jours plus tôt (dans la tradition chrétienne). Ancien informaticien, Alexis Borychowski confie que l’Épiphanie "représente surtout l’enfance : la période où on essaye d’avoir la fève, où l'on désigne le roi. On revient des années en arrière. Il y a de la nostalgie. Et je suis fier aujourd'hui de pouvoir faire ces galettes".

"On ne se repose pas"

Et l’Épiphanie, comme les fêtes de fin d’année, représente une période importante dans le secteur de la boulangerie-pâtisserie. "C’est une période cruciale durant laquelle il ne faut surtout pas se tromper", explique le directeur de l’établissement. "Après la préparation des fêtes de fin d’année, on enchaîne tout de suite sur les galettes pour l’Épiphanie. On n’a pas de répit. C’est une charge de travail immense. On ne se repose pas". Il ajoute que "les fêtes de fin d’année est une période où l'on a envie de faire plaisir à la clientèle".

C’est comme pour les feux d’artifices. Il y a beaucoup de préparation et une chorégraphie derrière.

Alexis Borychowski

En termes de chiffres d’affaires aussi, cette période est importante. Cela implique nécessairement une bonne organisation en amont, parfois très en avance. "On a commencé à travailler sur les recettes des buches et des entremets de fin d’année au mois de septembre 2021. Pareil pour les galettes. On planifie, on s’organise, on définit la proposition pâtissière. C’est comme pour les feux d’artifices. Il y a beaucoup de préparation et une chorégraphie derrière. Et à la fin on donne tout !", explique Alexis Borychowski.

"Cuire, cuire, cuire"

En coulisses, les boulanger(e)s, tourier(e)s et pâtissier(e)s se relayent pour préparer les galettes. Car ce ne sont pas moins de 70 à 80 galettes que la boulangerie-pâtisserie souhaite réaliser par jour. Elles se préparent en sous-sol. La température y est légèrement inférieure par rapport au niveau supérieur. Chiara et Clément, tous deux boulangers-pâtissiers mettent la main à la pâte, au sens propre comme au sens figuré.

"Le temps et le pain" vend ses galettes à ses clients avec un peu d’avance par rapport à la date prévue de l’Épiphanie, le 6 janvier. Celles-ci sont en vente depuis le mardi 4. Mais "on s’adapte. Chaque année ne se ressemble pas. S’il faut en faire plus on en fera plus", martèle Alexis Borychowski. "On sait que le 6 janvier, il va falloir cuire, cuire, cuire. Les grosses journées seront aussi le samedi et le dimanche", dit-il. "La préparation qui se fait en amont de la pâte feuilletée prend plusieurs jours. Avant d’arriver au produit final, de faire le disque et incorporer la crème à l’intérieur, il y a toute une partie qui est assez longue", explique-t-il, précisant que durant tout le processus de préparation, "si on se loupe sur une étape, tout s'effondre comme un château de cartes".

Créativité et nouveauté

"Le temps et le pain" mise également sur deux de ses principes clés pour la préparation de ses produits, y compris des galettes : le "fait maison" et la créativité. C’est pourquoi deux types de galettes sont proposés pour l’Épiphanie. En 2022, il y a la traditionnelle galette à la frangipane à la laquelle, selon Alexis Borychowski, "il est impossible de déroger", et une nouveauté, la galette aux noisettes. "Elle est plus festive, plus surprenante. Il y a des noisettes sur le dessus. Et à l’intérieur, c’est une frangipane à la noisette. Elle va apporter du croquant et du croustillant à la pâte feuilletée", explique-t-il.

Cette année, pour les fêtes de fin d’année et l’Épiphanie, la  boulangerie-pâtisserie a également fait appel à un chef pâtissier, Grégory Doyen, qui a conçu la gamme de produits (buches, galettes, pâtisseries…). "Chaque année, on fait du nouveau et on essaye de faire participer des chefs prestigieux pour nous définir notre carte", explique le directeur de l'établssement.

Pénurie de beurre

En plus de la Covid-19, les boulangers-pâtissiers doivent faire face à un autre problème : la pénurie de beurre, dont le prix a également augmenté. "Le temps et le pain" en a souffert. "Le feuilletage d’une pâte se prépare au moins une semaine à deux semaines en avance. Notre fournisseur n’était plus en capacité de nous procurer du beurre. On a dû aller piocher chez d’autres grossistes", confie Alexis Borychowski. Même problème pour les fèves du fait de "problèmes logistiques", et les noisettes. Ces pénuries n’ont pas eu de grosses répercussions sur les préparations prévues. Mais, "on a dû dépenser plus d’argent pour faire nos galettes cette année", regrette-t-il.

Fête des Saturnales

Mais d’ailleurs, pourquoi mange-t-on une galette le jour de l’Épiphanie ? Il s'agit certes d'une fête religieuse chrétienne. Mais l’origine de la galette des rois est, elle, païenne. Elle date de la Rome antique. Lors de la fête des Saturnales — fête marquant le jour du solstice d’hiver — les rôles étaient inversés entre les maîtres et esclaves l’espace d’une journée.

Et pour désigner le "Prince des Saturnales", les Romains utilisaient alors un gâteau rond dans lequel était glissée une fève. Cette tradition a, au fil du temps, évolué et coïncidé avec la fête de l’Épiphanie.

Cette année, le prix de la meilleure galette parisienne a été attribué à une pâtisserie de Clamart dans les Hauts-de-Seine : la maison Dumont. 

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