Démission du recteur de Paris, "désavoué" par Amélie Oudéa-Castéra

Le recteur Christophe Kerrero, qui "ne pouvait pas continuer à porter la carte scolaire après que la ministre Oudéa-Castéra l'a désavoué sans l'en prévenir" selon une source proche du rectorat, a annoncé ce vendredi sa démission. Une décision rarissime.

C’est l'un des plus hauts cadres de l'Education nationale. Christophe Kerrero, le recteur de Paris, démissionne sur fond de désaccord avec Amélie Oudéa-Castéra, après le choix du ministère de l'Education nationale d'un "moratoire" sur une partie de sa réforme des classes prépas, destinée à introduire davantage de mixité sociale.

"Je quitte aujourd'hui mes fonctions de recteur de l'académie de Paris, quand notre école est en proie au doute, et que la situation exige pourtant la mobilisation de chacun de ses acteurs", écrit-il ce vendredi, dans une lettre aux personnels de l'académie. 

Suspendu mercredi par la ministère, le projet du rectorat vise à fermer plusieurs classes préparatoires à la rentrée 2024 pour en ouvrir trois autres à vocation "plus sociale" : l'une au lycée Henri-IV pour des futurs professeurs des écoles et deux pour des lycéens professionnels. Selon une source proche du rectorat, le recteur "ne pouvait pas continuer à porter la carte scolaire après que la ministre Oudéa-Castéra l'a désavoué sans l'en prévenir dans une instance qui est le Conseil supérieur de l'éducation".

L'annonce intervient alors les spéculations vont toujours bon train sur le maintien à son poste d'Amélie Oudéa-Castéra, à quelques jours de nouvelles nominations pour compléter le gouvernement. La démission de Christophe Kerrero survient après une série de polémiques visant la nouvelle ministre de l'Education nationale, auteure de déclarations controversées sur l'école publique.

Amélie Oudéa-Castéra "prend acte"

Interrogée ce vendredi matin sur TF1, avant l'annonce du recteur, la ministre a assuré ne pas "song(er) à démissionner". Elle a ensuite "pris acte" de la "démission" du recteur dans un message sur X. Elle y salue "son parcours exemplaire et son engagement en faveur de la mixité sociale". "Nous poursuivrons, comme je m'y suis engagée, l'ensemble des chantiers qu'il a impulsés en faveur de l'égalité des chances", affirme la ministre. 

"Toutes les mesures de soutien des élèves en termes de promotion et de mixité sociale prises par le recteur de Paris sont soutenues et financées", assure l'entourage de la ministre. "Le rectorat de Paris avait envisagé trois fermetures de classes pour financer ces initiatives. La ministre assume son choix de lancer un moratoire sur ces fermetures, et de soutenir ainsi plus fortement encore le projet social du rectorat et l'offre existante", complète cette source.

"Que la ministre tranche dans le sujet de la carte nationale des classes prépas, cela fait partie de ses prérogatives, mais cela aurait pu être amené autrement", réagit auprès de l'AFP Sophie Vénétitay, secrétaire générale du Snes-FSU pour les collèges et lycées.

"Un acte très rare"

Jean-Rémi Girard, du Snalc, confirme : "Nous souhaitions qu'il n'y ait pas de fermeture de ces classes prépas, mais je suis certain que des marges budgétaires étaient possibles à trouver pour ouvrir celles que proposaient M. Kerrero, qui en plus se tournaient vers les lycéens professionnels". "La démission est un acte très rare à ce poste. On comprend que s'il s'est senti désavoué, il s'en aille. Ça nous paraît même sain pour un haut fonctionnaire de faire ça", estime Jean-Rémi Girard.

Nouveau coup dur pour Amélie Oudéa-Castéra ? "C'est certainement une pierre de plus dans le jardin pour la ministre. Une démission de recteur, c'est très fort", ajoute Sophie Vénétitay. "Si on lit en creux le message du recteur, on note aussi un désaccord de fond sur les questions de mixité sociale et réussite des élèves. Les classes prépas ont été la goutte d'eau", selon elle.

Le rectorat avait décidé de fermer trois classes préparatoires aux grandes écoles (CPGE) : une prépa aux écoles de commerce (prépa ECG) au lycée Jacques Decour, dans le 9e arrondissement, une classe de première année littéraire (hypokâgne) au lycée Lamartine, situé également dans le 9e arrondissement, et une de deuxième année littéraire (khâgne) au lycée Chaptal, dans le 8e arrondissement. Ces annonces avaient mobilisé enseignants et élèves, avec notamment une pétition "contre la fragilisation des parcours littéraires".

Ancien directeur de Jean-Michel Blanquer, Christophe Kerrero était recteur de l'académie de Paris depuis juillet 2020.

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