Dérives dans les centres de santé COSEM : une enquête ouverte par le Parquet de Paris, des salariés en colère

Le Parquet a ouvert une enquête sur la gestion de cette association regroupant une quinzaine de centre de santé en France dont 9 en région parisienne.

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La sanction est tombée comme un couperet. Un membre de la direction du Cosem s'est vue annoncer oralement sa mise à pied à titre conservatoire ce jeudi matin, lors de sa prise de fonction. Des membres du comité de direction et des élus du Comité Social d’Entreprise ont cosigné une lettre ouverte en forme de réquisitoire contre la gestion de Daniel Dimermanas, le directeur général du Cosem, et sa famille.

"Pour moi, ça constitue une mesure de représailles compte tenu des faits que nous avons révélés auprès du procureur. Les salariés se retrouvent avec un Directeur général qui fait l'objet d'accusations extrêmement graves, mais qui incarne désormais la fonction de DRH et de directeur financier. C'est une action qui lui permet d'avoir le terrain libre. Je pense que c'est aussi une position extrêmement terrorisante pour les salariés. Quel est le message ? 'Vous parlez, je vous élimine'".  

Membre de la direction du Cosem mise à pied

"Vous avez pillé le Cosem (…). Nous vous suggérons deux actions indispensables pour aider le Cosem : payer vos dettes qui s’élèvent à plusieurs dizaines de millions d’euros et quitter la gouvernance". Sur quatre pages dactylographiées sont répertoriées point par point les dérives de la gestion de ce groupe de santé de 1400 salariés, conventionné secteur 1 et financé par des fonds publics : "dépenses astronomiques" en "séjours de luxe" et "frais de bouches", "népotisme", détournement des budgets "formation" au profit de la famille et surtout, l’instauration "d’un business-model" sur l’immobilier au profit de la famille, bien loin de la vocation médicale à destination d'une patientèle modeste du groupe associatif.

Un préjudice de 37 millions d'euros

Les signataires demandent aux autorités de bénéficier de la protection du statut de "lanceurs d’alerte", qui les protègent contre toute forme de représailles de leur supérieur.

"Le but de cette action, c’est de mettre fin à cette hémorragie, que les actifs reviennent au Cosem. On a fait le choix de médiatiser en prenant le risque qu’il utilise le délai entre le signalement et l’intervention de la justice pour maquiller les comptes... C’est ce qu’ils sont en train de faire. On dit aux autorités 'maintenant, prenez vos responsabilités' !".

Jerome Marsault, directeur financier et co-signataire de la lettre ouverte

Dans une lettre adressée au Procureur de la République, Jérôme Marsault précise que des demandes lui ont été faites pour "rédiger des documents antidatés" afin de créer un vice de forme "parce que les droits d’enregistrements d’environ 1,4 million d’euros n’ont pas été acquittés par leurs sociétés holdings personnelles familiales", précise-t-il. Nous avons pu consulter ces demandes et échanges de mails. En outre, il "confirme l’exactitude des informations relayées par la presse ces dernières semaines". Le directeur financier estime que l'ampleur du préjudice pour le Cosem s'élève au moins à 37 millions d'euros. 

Enquête préliminaire du Parquet de Paris

Un témoignage capital qui vient confirmer les révélations faites par la cellule Investigation de Radio France et du journal Le Monde. Dans l’enquête, on découvre notamment les étonnantes cessions immobilières de Daniel Dimermanas. Il aurait cédé à ces fils une partie de l'imposant patrimoine immobilier parisien estimé à 28 millions d’euros, en contractant un "crédit vendeur in fine à échéance de 10 ans". Le procédé est simple : l’acheteur rembourse son bien d’un seul coup au bout de dix ans. Aucune garantie n’a été demandée en échange. Le Cosem devient donc locataire de biens immobiliers qu’il possédait.

Suite aux signalements de la Caisse d’Assurance Maladie de Paris et des élus du CSE, le Parquet de Paris a ouvert une enquête ce mardi. La Brigade de la Répression de la Délinquance Economique est en charge des investigations. "En tant qu'avocat des lanceurs d'alerte, je me félicite que le parquet ait ouvert une enquête préliminaire", a déclaré Maitre Jérôme Karsenti. "J'espère pour les salariés que cette enquête sera rapide afin que ces centres de santé Cosem, ayant une histoire ancienne, puissent être sauvés des pratiques prévaricatrices de leurs dirigeants", a-t-il accusé.

Face à ces nouvelles révélations, le directeur général a répondu par un communiqué de presse lapidaire : "Après la campagne diffamatoire, de dénigrement et désinformation, l'ouverture de cette enquête préliminaire ne nous étonne pas. Nous sommes sereins. Nos Conseils ont déjà pris contact avec le Procureur de la République afin d'apporter toutes les réponses utiles." 

Une loi pour contrôler les centres de santé

Les signataires de cette lettre ouverte s'interrogent sur le système de contrôle et les dérives financières des centres de santé. "C’est le problème d’un centre de santé, c’est une affaire judiciaire certes, mais c’est aussi une vraie affaire politique, notamment concernant l’abus de la Sécurité sociale. Il y a des gestionnaires qui viennent et qui vivent sur le dos de la Sécu et qui ont compris qu’on peut y faire du business", résume un cadre.

Hasard du calendrier, le Sénat a adopté définitivement mardi un texte encadrant plus strictement les centres de santé. Il rend obligatoire un agrément préalable des ARS pour ceux qui assurent des soins dentaires ou ophtalmologiques. La proposition de loi de la députée Fadila Khattabi (Renaissance) fait suite notamment au scandale Dentexia (des centres dentaires low cost) et Proxidentaire. Des dizaines de patients avaient dénoncé des mauvais traitements, des mutilations et des abus financiers.

Source : avec AFP

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