Le Festival du livre de Paris ouvre ses portes ce jeudi au Grand Palais Éphémère. L'occasion de retrouver les grands éditeurs qui boudaient ce rendez-vous et d'en découvrir de nouveaux comme la maison d'édition Dalva. Rencontre avec sa créatrice.
Pendant presque 40 ans, les maisons d'édition et les amoureux de la littérature se retrouvaient au Salon du livre à la Porte de Versailles. Ce rendez-vous change de nom, le Festival du livre de Paris, de lieu, le Grand palais Ephémère et de direction avec désormais à sa tête, le Syndicat national de l'édition.
Une première pour les éditions Dalva
Pour la petite maison d'édition Dalva qui va vivre son premier salon, c'est un renouveau qui va faire du bien à tout le monde. "C'est la première participation pour les éditions Dalva et c'est une grande joie forcément. D'autant que c'est dans un nouveau lieu magnifique, le Palais éphémère près de la Tour Eiffel ", se réjouit Juliette Ponce, la créatrice de la maison d'édition Dalva.
L'ex-directrice éditoriale de littérature étrangère de Buchet/Chastel a longtemps participé aux précédentes éditions située au parc des expositions. Pour elle, faire connaître sa maison d'édition à la ligne résolument féminine et qui ne publie que dix livres par an est une opportunité pour rencontrer le public et pourquoi pas, de futures autrices.
C'était une demande très forte de la part des maisons d'éditions de rendre ce salon gratuit.
Juliette Ponce, créatrice de la maison d'édition Dalva
Autre élément qui enchante Juliette Ponce, c'est la gratuité de ce rendez-vous. Elle fait partie de ceux qui l'ont souvent suggéré. "C'était une demande très forte de la part des maisons d'éditions de rendre ce salon gratuit car ils trouvaient que c'était pas très juste de faire payer l'entrée pour des personnes qui viennent acheter des livres ou échanger avec des auteurs", explique la Directrice artistique Marie-Madeleine Rigopoulos.
"C'est très simple pour y accéder il suffit de s'inscrire sur le site du festival du livre, précise-t-elle, et même s'il risque d'y avoir du monde et un temps d'attente, même les non-inscrits peuvent tenter leur chance et venir", ajoute-t-elle.
Crise du covid salvatrice ?
La Covid a non seulement donné envie à Juliette Ponce de se lancer dans son aventure, mais cela a permis aussi à ce rendez-vous de profiter de cet arrêt pour se repenser autrement. Une crise de la quarantaine qui va permettre de revitaliser ce rendez-vous et de retrouver le sens de la fête, avec une programmation riche et une itinérance du festival à travers Paris. Plusieurs lieux accueillent différentes manifestations, "hors les murs", et si vous souhaitez être guidé et embarquer dans un voyage à travers Paris, les flâneries littéraires sont toujours au rendez-vous et constitueront un des fils rouges de ces trois journées.
L'organisation, reprise en main par le Syndicat national de l'édition a profité de l'arrêt de cette manifestation pendant deux ans, crise Covid oblige, pour remettre ce rendez-vous au centre de Paris, lui offrir une nouvelle visibilité et un retour aux sources.
Le premier Salon avait été organisée au Grand Palais en 1981. "Nous avions comme objectif essentiel de remettre le livre au cœur de Paris et la pandémie a rendu cela, possible", explique Marie-Madeleine Rigopoulos, la Directrice artistique du festival. "Notre souhait est de pouvoir inaugurer le Grand Palais, une fois les travaux terminés et restés définitivement dans cet endroit magnifique" ponctue-t-elle.
Une invitation au voyage et à la découverte
Pour cette édition, où l'Inde est à l'honneur, les visiteurs déambuleront dans un espace tel qu'il est. La scénographie est particulièrement épurée, car le choix a été de rester dans l'aspect brut du Palais Éphémère. "On a voulu que le visiteur se promène dans un espace très naturel d'où la présence du bois. La sensation de promenade doit accompagner les visiteurs et l'élégance de la scénographie procure, cela", explique Marie-Madeleine Rigopoulos. "Nous sommes très heureux d'accueillir l'Inde et sa très grande délégations, ces auteurs en tous genres. C'était une promesse qu'on s'était faite, il y a trois ans", confie Marie-Madeleine qui n'hésite pas à rappeler que d'autres pays étrangers sont aussi présents et à découvrir.
La promenade est le maître-mot de ce salon qui conduira jusqu'à Juliette Ponce, car Dalva c'est une double découverte. C'est non seulement une toute jeune et nouvelle maison d'édition, mais c'est aussi une maison engagée, car elle édite uniquement des autrices.
Des autrices pour Dalva
C'est en mai 2021 qu'elle a vu le jour. Juliette Ponce, décide de se lancer après le premier confinement. "Comme tout le monde, le confinement m'a fait cogiter ", dit-elle en riant. "A la fin du confinement, je me suis demandé quelle vie je voulais vraiment ? Et bien, je voulais celle que j'ai maintenant. J'ai une toute petite structure, mais c'est super, comme je suis tout, de A à Z et je vois sereinement l'évolution de mes bébés", confie-t-elle.
Avec son amie Marie-Anne Lacoma et Jeanne en renfort, toutes les trois, elles représentent les éditions Dalva. Pour elles, il faut que les lignes bougent. " Pourquoi devrions-nous éditer uniquement des livres écrits par des femmes uniquement autour de thèmes rattachés aux femmes ? Pourquoi leur attribuer les thèmes de la petite enfance, la maternité et pas des thèmes comme les sciences, le climat, la géopolitique ? "
C'est ainsi que naît Dalva, dont le nom fait référence à l'héroïne du roman du titre éponyme de Jim Harrison, se positionne donc comme une maison "engagée". Juliette Ponce souhaite offrir aux autrices, un espace uniquement pour elles, qu'elle considère comme des sources d'inspiration. "J'ai une sensibilité particulière pour celles qui abordent la nature et le climat ", ajoute-t-elle.
Je me suis aperçue un jour que j'avais plus lu de livres écrits par des hommes que par des femmes.
Juliette Ponce, Dalva
Une sensibilité héritée de ses années d'étudiante en ethnologie et de ses voyages auprès des femmes Chiapas, pour les besoins de sa thèse. C'est là, qu'elle s'aperçoit que les femmes n'ont pas le droit de prendre la parole dans un cadre public et officiel, alors qu'elles sont talentueuses et douées de savoir-faire riches et variés. Mais ce patriarcat, elle le retrouve aussi quand elle se lance dans l'édition. "Je me suis aperçue un jour que j'avais plus lu de livres écrits par des hommes que par des femmes. Je pense que c'est une vision de la société qui doit changer. Dès l'école à vrai dire, au collège comme au lycée les classiques, restent les mêmes choix. Mes enfants sont en train d'étudier au collège ce que j'ai moi-même étudié. À part peut-être un professeur qui fera découvrir la princesse de Clèves de Madame de La Fayette ou un roman de Marguerite Duras, la plupart du temps, on étudie des œuvres masculines."
J'avais envie d'éditer autrement, de créer une maison d'édition à taille humaine où l'on publie peu.
Juliette Ponce, Dalva
C'est dans cet esprit que les éditions Dalva sont nées. Pas du tout dans un but féministe, mais dans le but de permettre à des femmes d'avoir un espace où elles peuvent soumettre des thématiques auxquelles on ne les associe pas toujours. "Oui, une femme peut parler du climat comme un homme et ses propos seront aussi forts et si des hommes lisent les livres des éditions Dalva j'en serai la première ravie", confie Julliette Ponce qui est prête à côtoyer des grandes maisons comme Gallimard, numéro trois français avec son groupe Madrigall, qui fait aussi son grand retour dans ce Festival. Cela n'intimide pas Juliette. "J'avais envie d'éditer autrement, de créer une maison d'édition à taille humaine où l'on publie peu, soit dix titres par an", explique-t-elle. Elle est ravie d'être aussi présente aux côtés d'autres grands comme Média-Participations, Actes Sud ou Albin Michel.
Une édition très attendue et qui devraient accueillir déjà beaucoup de visiteurs en sachant qu'il faut réserver son billet sur Internet même si l'entrée est gratuite, car le site n'accueille que 5.500 visiteurs à la fois, et beaucoup d'événements sont déjà complets : dédicaces, rencontres avec des stars de la littératures et tables rondes.
À l'occasion du 75e anniversaire de l'indépendance de l'Inde, une trentaine d'écrivains indiens se joindront à eux. Hasard du calendrier, le dernier jour du festival tombe avec le second tour de la présidentielle. "Ça sera l'occasion de venir nous voir après avoir voté et nous fermons nos portes à 18 h pour permettre à tout le monde d'être chez soi et de découvrir qui sera notre prochain président à 20 h " conclut Marie-Madeleine Rigopoulos.
Le Festival du livre se tient jusqu'au dimanche 24 avril au Grand Palais Ephémère à Paris.