Dès le XVIIIème siècle, certains hommes politiques imaginent déjà la mise en place d’un système dans le but d'économiser de l’énergie.
Cette nuit, vous avez dormi une heure de moins. À 2h du matin, il était en fait 3h. La nuit de samedi à dimanche a officiellement fait passer nos horloges à l’heure d’été. Celle-ci restera en application jusqu’au 31 octobre prochain. Vous pourrez donc profiter d’une heure de jour en plus jusqu’à cette date.
Celles et ceux qui disposent de smartphones avec les réglages horaires automatiques seront épargné(e)s par les changements manuels à effectuer. Pensez donc à régler vos montres et horloges si ce n’est pas déjà le cas. Ce changement d’horaire avance par ailleurs d’une heure le couvre-feu actuellement fixé en Île-de-France.
Un peu d’histoire
Mais qu’est-ce que l’heure d’été ? C’est une mesure instaurée par le président Valéry Giscard d’Estaing le 28 mars 1976. Le monde avait connu quelques années auparavant, en 1973-1974, le premier "choc pétrolier", cette hausse spectaculaire de l’augmentation des prix des hydrocarbures. L’objectif du gouvernement était alors clair : faire des économies d’énergie en s’adaptant mieux à l’éclairage naturel selon la période (été ou hiver). Le "choc pétrolier" a dans le même temps poussé les gouvernements à repenser leur stratégie énergétiques afin de moins dépendre de ces ressources. Le passage à l’heure d’été, de même que l’accélération du programme électronucléaire français, sont des mesures prises dans ce sens.
En réalité, l’heure d’été a une histoire beaucoup plus ancienne. Elle avait déjà été imaginée par Benjamin Franklin, l’un des pères fondateurs des États-Unis et son premier ambassadeur en France, au XVIIIème siècle. En France, elle voit le jour dès 1916, sous l’impulsion du député et sénateur André Honnorat afin d’économiser l’énergie du pays, alors en pleine Première Guerre mondiale. Elle a été abandonnée après la Seconde Guerre mondiale, puis remis au bout du jour par Valéry Giscard d’Estaing.
Effets négatifs sur la santé
L’heure d’été n’a pas que du bon. Beaucoup s’interrogent sur les effets de ce changement d’horaire sur la santé. Troubles du sommeil, de l’appétit, de l’humeur, ou encore risques d’accidents cardiovasculaires…certaines études montrent que le passage d’une heure à l’autre, deux fois par an, a des conséquences sur le corps humain. On force en effet notre horloge biologique à avancer d’une heure.
Selon une étude américaine présentée lors de la session annuelle de l'American College of Cardiology à Washington en 2016 et publiée dans la revue Open Heart, passer à l'heure d'été, et donc perdre une heure de sommeil, augmenterait de 25% le risque d'être frappé par une attaque cardiaque le lundi suivant le changement d’heure. Une étude suédoise, publiée six ans plus tôt dans la revue New England Journal of Medicine, évoque de son côté une hausse du risque de 5%. Le changement d’heure engendrerait également des problèmes en termes de sécurité routière. Plusieurs études montrent une augmentation des accidents de la route les jours qui suivent le changement d’heure, et notamment des accidents impliquant des piétons.
Suppression du changement d'heure
Les effets négatifs sur la santé et les effets jugés peu concluant du changement d'heure sur l'économie d'énergie ont poussé les États européens à réagir. Depuis 1998, le changement d'heure est harmonisé dans toute l'Europe. Et en mars 2019, les députés européens s’étaient prononcés en grande majorité pour une suppression des heures d'été et d'hiver en 2021. Ils s'étaient alors basés sur une grande consultation effectuée en ligne par la Commission européenne en 2018, où des millions d’européens s’étaient exprimés. Sur 4,6 millions de votes reçus, 84% avait indiqué vouloir supprimer le changement d’heure. En France, les citoyens se sont aussi prononcés lors d’une consultation organisée en ligne par la commission des Affaires européennes de l'Assemblée nationale. Plus de deux millions ont donné leur avis. 59 % souhaitaient rester à l'heure d'été, et 37%, rester à l’heure d’hiver.
Nous aurions donc dû avoir droit à notre dernière heure d’été cette année. Mais cela ne sera pas pour tout de suite. Le dossier bloque au niveau européen, notamment pour des questions d’harmonisation. Entre ceux qui veulent et ceux qui ne veulent pas supprimer le changement d'heure, le but est d’éviter d’avoir un méli-mélo de fuseaux horaires différents sur le Vieux continent. Ajoutons à cela la crise sanitaire qui a relégué la question loin derrière les priorités des États. La question de savoir si « cette nuit, on gagne ou on perd une heure de sommeil ? » n’a donc pas fini de remplir nos discussions.