"Le jambon de Paris fait à Paris, ça a du sens", pour le dernier producteur de la capitale

Dans son atelier du XIe arrondissement de Paris, Yves Le Guel cultive un savoir-faire en voie de disparition : le vrai jambon de Paris. Tables de chefs étoilés, sandwicheries parisiennes ou chez certains épiciers, il est loin d'être inaccessible.

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Le jambon de Paris, travaillé de façon artisanale, a bien failli disparaître. Mais il reste un irréductible producteur, qui a cru à ce produit à une époque où le tout industriel avait pris le pas. Il y a 15 ans, Yves Le Guel a racheté la dernière salaison de Paris, située rue de Charonne, dans le XIe arrondissement.

Impossible de la reconnaître en passant devant, elle n'a pas pignon sur rue. Les locaux se situent au rez-de-chaussée, derrière un banal immeuble d'habitation. Ici, 19 personnes s'activent chaque matin de la semaine, aux heures où seul le boulanger est levé, pour fabriquer ce produit rentré dans la consommation courante.

"Le jambon est un produit dont on a besoin régulièrement. Avec les enfants, le jambon coquillettes, c'est très bon, c'est rapide, c'est nourrissant et peu calorique. Le sandwich, quand vous n'avez pas le temps, vous le prenez sur le zinc avec un petit ballon de rouge, et voilà, c'est très parisien", explique Yves Le Guel avec son accent de la capitale.

Reconversion

S'il est l'un des derniers artisans de la région à garder ce savoir-faire, cela n'allait pas forcément de soi. Car M. Le Guel ne vient pas du tout du métier. Il a commencé dans le secteur de l'imprimerie avant de se lancer dans l'alimentaire.

"J'ai voulu changer de métier. Je cherchais une entreprise et je suis tombé sur celle-là. Le patron avait 70 ans, il cherchait quelqu'un pour reprendre. Ensuite, je me suis formé avec le personnel qui était présent, on était trois. On a avancé tranquillement, on s'est fait connaître et on a commencé à grandir", poursuit-il.

Désormais, jusqu'à 160 jambons sont produits chaque semaine (son jambon, le Prince de Paris, est vendu aux professionnels comme des restaurants ou épiceries). Entre la livraison d'une cuisse de porc (du blanc de l'ouest) et le produit fini, il faut 8 jours. Si une régularité dans le processus a été instaurée, la fabrication reste artisanale. La cuisse est d'abord désossée "à l'os coulée", c’est-à-dire que le jambon reste toujours entier, il n'y a pas d'assemblage de différents animaux.

Recette ancestrale

Chaque jambon est ainsi traité aux petits oignons. "On injecte de la saumure dans l'artère fémorale qui va aller dans les veines et les petits vaisseaux et se diffuser dans tous les muscles. Cela fait une salaison, en règle générale, parfaite", explique Danièle, présent depuis 40 ans et lui aussi, gardien de la tradition.

Long et fastidieux, ce procédé est rarement utilisé de nos jours. Mais il donne un goût prononcé à la pièce. "Quand ils sortent de cuisson, on a des jambons où le bouillon sort et enveloppe le tout, et finit par former une gelée. Cela prend du temps, les industriels ne le font pas", abonde M. Le Guel.

Pour autant, son Prince de Paris, marqué d'une tour Eiffel, n'a pas d'AOP : "Herta a déposé le nom, mais à la base c'était une recette", ajoute-t-il. Le terme serait apparu au XVIIIe siècle et le Trésor de la langue française rédigé par le CNRS en donne cette définition : "Jambon de Paris : jambon cuit peu salé et non fumé, présenté en bloc désossé qui se vend en tranches. Synonyme. Jambon blanc." Concernant son origine, certains l'attribuent à la proximité de fermes qui fabriquaient du jambon pour la royauté et qui auraient élaborées la recette de ce jambon cuit. Mais à l'époque, il pouvait être issu d'autres animaux comme de cerfs ou de porcs sauvages.

Les tranches lisses signe de jambon industriel

Si la technique a beaucoup évolué, la recette reste très traditionnelle. En revanche, la conservation est devenue un enjeu majeur et le Prince de Paris n'échappe pas à la règle, il contient des sels nitrités.  

"On en met très peu, les doses minimales. C'est important pour la sécurité alimentaire. Sinon il y a un risque de maladies, comme le botulisme que l'on ne peut pas soigner. Tant que l'on n'a pas trouvé des produits de substitution sans risque pour les consommateurs, j'en utilise", assume M. Le Guel.

Selon lui, les produits dits sans nitrites ne le sont pas vraiment : "Ce sont des produits où il y a des nitrates dans les bouillons. Cela revient exactement au même".

Alors, un dernier conseil avant de manger son casse-croûte : comment reconnaître un bon jambon de Paris ? "Il faut une tranche qui ne se tient pas bien et il retrouver la fibre de la viande sinon, si elle est toute lisse, cela veut dire qu'elle a été travaillée mécaniquement", prévient-il tout en conseillant une recette très simple : les endives au jambon avec une tranche un peu plus épaisse.

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