Faute de "solution consensuelle", Emmanuel Macron a décidé de renoncer au déplacement prévu des boîtes des bouquinistes installées sur les quais de la Seine en vue de la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques de l’été prochain à Paris.
"Constatant qu'aucune solution consensuelle et rassurante n'a pu être identifiée avec ces acteurs", le chef de l'Etat "a demandé au ministre de l'Intérieur et au préfet de police de Paris que l'ensemble des bouquinistes soient préservés, et qu'aucun d'entre eux ne soit contraint d'être déplacé", a fait savoir mardi l'Elysée. Selon son entourage, le chef de l'Etat leur manifeste ainsi "son attention considérant qu'il s'agit d'un patrimoine vivant de la capitale". "On est tous très heureux et on remercie le président, qui a compris que nous étions l'âme de Paris", s'est réjoui le président de l'Association culturelle des bouquinistes de Paris, Jérôme Callais.
Emmanuel Macron "a demandé à ce que le dispositif de sécurité soit adapté en conséquence, les espaces concernés sur les quais hauts n'étant dès lors plus susceptibles d'accueillir du public pendant la cérémonie" d'ouverture des JO, le 26 juillet sur la Seine, selon l'Elysée. Cette décision à venir avait déjà été prise en compte dans la jauge de la cérémonie, revue à la baisse fin janvier à environ 300 000 spectateurs, a assuré une source proche du dossier. Le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin "reviendra sur l'ensemble du dispositif de sécurisation de la cérémonie d'ouverture à la fin mars, une fois achevé l'ensemble des concertations avec les élus locaux et parties prenantes", a précisé cette source.
"L'âme de Paris"
"Notre résistance a porté ses fruits", a exulté Albert Abid, bouquiniste depuis dix ans au quai de la Tournelle. Pour lui, "déplacer ces boîtes, c'était toucher à une mémoire vivante de Paris". "Je suis trop contente (...) au-delà des considérations techniques, on ne touche pas aux livres, ça finit toujours mal pour les peuples !", s'est exclamée Laura Galidie, 42 ans, bouquiniste et comédienne près du Pont des Arts, jointe par l'AFP. "On a aussi un rôle humain avec les gens que l'on renseigne, c'était dommage d'enlever ça".
<VIDEO. Les bouquinistes, un monument parisien
"Je remercie le président de la République d'avoir entendu les arguments des #bouquinistes et leurs demandes en vue des #JOP2024", a écrit sur X (ex-Twitter) la ministre de la Culture Rachida Dati, candidate à la succession de la maire de la capitale Anne Hidalgo.
Je remercie le Président de la République d'avoir entendu les arguments des #bouquinistes et leurs demandes en vue des #JOP2024, soutenues depuis l’origine par l’ensemble des élus de @gpechangerparis, en particulier @BirabenAnne, @jp_lecoq et @aurelien_veron.… pic.twitter.com/dzDbY8jDNp
— Rachida Dati ن (@datirachida) February 13, 2024
Fin juillet 2023, les bouquinistes avaient été informés que, pour des raisons de sécurité, plusieurs centaines de leurs boîtes de livres installées sur les quais devraient être temporairement déplacées quelques jours avant la cérémonie d'ouverture. Cette annonce a causé des semaines de bataille entre autorités, notamment la préfecture de police et la mairie, et bouquinistes, qui plaidaient pour que leurs boîtes restent en place.
L'Association culturelle des bouquinistes de Paris avait décidé en janvier d'intenter une "action en justice au tribunal administratif". Ils entendaient demander le "non-enlèvement" des boîtes ou, "en dernier recours", une indemnisation et un "traitement digne et respectueux" de leurs petites librairies à ciel ouvert, inscrites au patrimoine culturel immatériel français, première étape d'une éventuelle reconnaissance au patrimoine mondial de l'Unesco.
"On va tous dormir normalement après sept mois de cauchemar"
s'est félicité le président de l'Association culturelle des bouquinistes de Paris
Face à leur fronde, la préfecture de police avait fait un pas vers les bouquinistes en acceptant "de sacrifier certaines zones, qui ne seront donc pas ouvertes au public" pour la cérémonie d'ouverture.
Avec cette proposition, 428 boîtes au lieu de 604 devaient être démontées, "soit moins de la moitié (47 %)" des 932 arrimées aux quais de Seine, selon la préfecture.
Malgré cette concession, la situation était dans l'impasse : "nous étions sur notre position et la préfecture sur la sienne", a expliqué mardi M. Callais. "Nos arguments ont été entendus et cette décision met un terme à une procédure judiciaire qui aurait été inutile", a indiqué Me Matthieu Chirez, avocat des bouquinistes, dans une déclaration à l'AFP. "On va tous dormir normalement après sept mois de cauchemar", s'est félicité M. Callais.