Crime antisémite ou crime crapuleux ? Deux mois après le meurtre de Mireille Knoll, tuée au couteau puis brûlée dans son appartement du XIe arrondissement de Paris, le mobile religieux semble de plus en plus friable. L'un des deux mis en examen, Alex C. étant revenu sur ses premières déclarations.
C'est sur la base des déclarations d'un des deux mis en examen, Alex C., que le mobile antisémite avait été retenu dans le meurtre de Mireille Knoll. Lors de sa garde à vue le 26 mars, le cambrioleur multirécidiviste de 22 ans avait accusé son complice, Yacine M. de s'être rendu chez la vieille dame de 85 ans parce qu'elle était de confession juive.
Depuis, devant le juge d'instruction, Alex C. est revenu sur ses déclarations, prétendant que c'est la rancoeur de Yacine envers l'octogénaire qui aurait conduit au meurtre.
Un incendie à l'origine de la découverte du corps
Le 23 mars, le corps de Mireille Knoll, 85 ans, est retrouvé en partie carbonisé dans son appartement du 11e arrondissement où elle vit seule. Très vite, les policiers s'orientent vers la piste criminelle, après la découverte de plusieurs départs de feu dans l'appartement, puis de traces de coups de couteau sur le corps de la victime. Un premier suspect, Yacine M, connu des services de police pour une affaire de viol et d'agression sexuelle est interpellé dans la foulée. C'est un voisin qui avait l'habitude de rendre visite à la victime et était passé dans son appartement dans la journée selon le fils de Mme Knoll.
Deux jours plus tard, un second suspect, Alex C., 22 ans, connu pour des vols avec violences, est arrêté. Et livre aux enquêteurs sa version des faits.
Un contentieux à l'origine
Alex explique qu'il se rend chez Mireille Knoll à la demande de Yacine, rencontré lors d'un séjour en prison, pour la voler. Car selon son ami, la vieille dame a de l'argent, "les juifs ont une bonne situation". Il fait état de conversation entre Yacine et Mireille Knoll qui s'enveniment sur la seconde guerre mondiale et la guerre d'Algérie. Alex raconte également avoir entendu Yacine profèrer un "Allah Akbar" avant de tuer l'octogénaire. Des éléments qui vont conduire les juges à mettre les deux hommes en examen pour "homicide à raison de l'appartenance religieuse de la victime." Mais cette version, livrée en garde à vue et "sous le choc", Alex la nuance désormais.
Entendu le 13 avril par un juge d'instruction, Alex va esquisser la piste d'un contentieux entre Mireille Knoll et Yacine. Ce dernier reprochant à la retraitée de l'avoir empêché d'assister aux obsèques de sa soeur parce qu'il était en prison pour l'agression sexuelle d'une mineure hébergée chez Mireille Knoll.
Une nouvelle version à laquelle ne croit pas l'avocat de la famille Knoll, Gilles-William Goldnadel.
"Ce ne serait donc pas antisémite mais crapuleux. Comme s'il fallait choisir entre ces deux motifs. J'ai plus tendance à créditer la spontanéité des premières déclarations que ce revirement du complice plusieurs semaines après. De plus, Alex maintient que Yacine a crié Allah Akbar. Cela signe l'assassinat pour motif religieux. C'est un petit antisémitisme crapuleux, bas de gamme, pas intellectuel."
Parole contre parole
Sur la base de ces nouvelles confidences, Yacine doit être entendu par un juge cet après-midi. Une audition dont la famille de la victime n'attend rien. "C'est parole contre parole. Ce sont deux types qui s'accusent mutuellement, selon Gilles-William Goldnadel. Mes clients ne s'attendent pas à obtenir la vérité scientifique puisqu'il n'y a pas de témoin. Le couteau a été lavé, les preuves brûlées. Il n'y aura malheureusement pas de vérité judiciaire."
Dans une lettre adressée à la juge d’instruction le 18 avril, Alex a demandé une confrontation avec Yacine. "Chacun rejetant la culpabilité sur l'autre, cette confrontation est nécessaire, selon l'avocat d'Alex, Maitre Karim Laouafi. Mon client continue de dire que c'est Yacine qui a pris la décision de tuer Mme Knoll même s'il endosse sa responsabilité de ne pas lui avoir porté assistance ou ne pas avoir appelé la police." Des analyses ADN sont attendues pour savoir qui des deux a porté les coups mortels.