Ils sont cinq. Et pourtant ils deviendront quatre et un. Le fleuve qui les unissait, cette Garonne de leur enfance, va les diviser. Pierre choisira l’exil, loin, très loin, au Japon. Un éloignement géographique volontaire pour tenter de soigner les blessures émotionnelles. Une nouvelle vie à bâtir, sur des fondations de soit-disant orphelin. Un mensonge qu’il tisse au quotidien face à sa compagne enceinte, Claire (Charlotte Matzneff), rencontrée au pays du soleil levant. Un mensonge, promesse de bonheur retrouvé, mais un songe qui ment.Il faut croire au mensonge quand il est nécessaire.
Le passé refait en effet surface sans prévenir, un beau matin. Pierre est alors sommé par sa compagne de s’expliquer. "J'ai une famille, une famille avant toi, en France, avant de vivre au Japon." Celui qui se prétendait orphelin ouvre alors pour elle le livre des souvenirs de la famille Ortiz. Le récit épique contient en son cœur une tragédie, qui va bien au-delà de ce que pouvait imaginer Pierre.Chez les Ortiz, inventer est le sport familial. On invente comme on respire ou bien on ment comme on respire.
Dans cette nouvelle création, plébicitée à Avignon cet été, Jean-Philippe Daguerre place le thème des secrets de famille au cœur de sa mise en scène. Le spectateur est en permanence convié à un voyage dans le temps et dans l’espace pour tenter de dénouer les fils de l’histoire des Ortiz. Un subtil choix scénographique parvient à nous embarquer dans la mémoire de Pierre, un monde à la fois « mélancolique et loufoque ».Off d'Avignon 2019 : après "Adieu Mr Haffman", Jean-Philippe Daguerre touche au coeur avec "La Famille Ortiz" @offavignon @TheatreActuel https://t.co/YYQrEpjy9z pic.twitter.com/nnyY9j4FWn
— Culturebox (@Culturebox) July 5, 2019
Le père ne quitte pas son costume rose de trorero à pompons, la mère sa blouse blanche d'infirmière avec coiffe, les jumeaux, leur marinière bleue et rouge avec culotte courte de petit garçon. Cette histoire de famille se veut toutefois fable, comme l'affirme Jean-Philippe Daguerre : « Il y a bien longtemps que cette histoire influencée par des éléments réels ayant touché ma vie, et celle de gens très proches, trotte dans ma tête. J’ai choisi un univers de conte contemporain pour la raconter, ne voulant pas tomber dans une chronique sociale naturaliste que j’ai toujours du mal à vouloir traiter lorsque j’écris du théâtre. »Ils sont toujours habillés comme ça ?
Le thème universel du secret de famille se double en effet d’une réflexion sur le courage et son pendant, la lâcheté. L’un ne se pense pas sans l’autre. L’un ne s’expérimente pas sans l’autre. C’est ce que le personnage de la mère transmet à ses trois enfants, et plus particulièrement à l’aîné, Pierre. Une leçon qui lui permettra in fine de faire sien le vers de Victor Hugo : « Mon père, ce héros au sourire si doux » (« Après la Bataille », La Légende des siècles).

La Famille Ortiz s'agrandit au Théâtre Rive Gauche à Paris
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© Fabienne Rappeneau
La Famille Ortiz - mise en scène de Jean-Philippe Daguerre
A noter : France 3 Paris Île-de-France est partenaire de ce spectacleà voir du mardi au samedi à 21h - matinée le dimanche à 15h
Théâtre Rive Gauche
6 rue de la Gaîté Paris 14e