Alors que Salah Abdeslam a affirmé mercredi avoir renoncé à la dernière minute à se faire exploser dans un café le soir des attentats, le récit de l’accusé n’a pas convaincu toutes les parties civiles.
"Comment est-ce qu’on peut comprendre que ce soit le moins aguerri de tous qui soit tout seul ? C’est une question qu’il va falloir poser", réagit Me Gérard Chemla, avocat de 140 parties civiles, suite à l'interrogatoire du principal accusé mercredi 14 avril dans le cadre du procès des attentats du 13-Novembre. "On doit noter que, pour la première fois, on a un vrai dialogue avec Salah Abdeslam, qui n’a pas dit grand chose sur le fond quand même", souligne également le conseil.
"Sur la notion du renoncement, ce n’est pas parce qu’il le dit que c’est vrai", souligne Me Gérard Chemla. "Je n’ai pas d’éléments qui me permettent de m’en assurer", indique l’avocat.
"C’est une belle fable, estime de son côté Arthur Dénouveaux, président de l’association Life for Paris. Je pense que les questions des parties civiles et les questions du parquet vont mettre à mal ce récit, qui avait l’air très bien appris."
"Il n’y a pas eu grand-chose de nouveau dans ce qu’il disait, ajoute ce rescapé du Bataclan. Pour quelqu’un qui ne connaît pas le dossier, il arrive parfaitement à détourer se propos pour ne s'incriminer à aucun moment où le dossier l’incrimine, et raconter une histoire."
Salah Abdeslam raconte avoir "renoncé par humanité"
Mercredi, Salah Abdeslam a raconté pour la première fois sa soirée du 13 novembre 2015 dans le détail. L’accusé, qui avait par le passé parfois refusé de répondre aux questions en invoquant son droit au silence, a maintenu avoir "renoncé" à se faire exploser au cours de sa "mission". Il a affirmé avoir fait marche arrière en entrant dans un café du XVIIIe arrondissement, après avoir "regardé les gens" autour de lui.
"Je voyais les gens rigoler, danser, je comprends que j'allais pas le faire", a expliqué l'unique membre encore en vie des commandos terroristes. Le Français de 32 ans a ensuite raconté avoir repris sa voiture, avec laquelle il avait transporté les kamikazes au Stade de France. D’après l’accusé, le véhicule est ensuite "tombé en panne". Il aurait alors erré dans la capitale, en appelant "tout le monde" pour qu'on vienne le chercher.
Puis il a raconté avoir pris un taxi vers le sud de Paris, et s’être débarrassé de sa ceinture explosive à Montrouge. Le tout avant de marcher jusqu'à Châtillon où il sera récupéré par deux "copains" belges, aujourd'hui ses coaccusés. Salah Abdeslam a affirmé n’avoir intégré le projet d'attentats qu'"au dernier moment", le 11 novembre 2015 : selon lui, il ne connaissait pas les détails, juste qu'il devrait se "faire exploser", alors qu’il "devait partir en Syrie" initialement.
Salah Abdeslam a aussi de nouveau soutenu avoir menti à plusieurs proches, en leur racontant qu'il avait failli à sa mission car sa ceinture n'avait pas fonctionné. L’accusé a expliqué avoir eu "honte" de dire la vérité aux autres membres de la cellule terroriste. Il aurait "renoncé par humanité, pas par peur", toujours selon son récit. Son interrogatoire doit reprendre ce jeudi, en deuxième partie d'après-midi.