Quel cirque sur la scène du Rond-Point avec Les Ronaldo, de père en fils

Comédie clownesque conçue et interprétée à 4 mains par un père et son fils, ce nouveau spectacle est aux antipodes du petit cirque à l’ancienne entre pop-corn et paillettes, comme le pratiquait leur famille jusque dans les années 90. Une veine tendre à la recherche d’une nouvelle voie artistique.

Vous entrez dans la salle, et pendant que vous prenez place au milieu des autres spectateurs, un homme est sur scène et prend un bain. Dépêchez-vous, il vous attend. Certes, il est bien occupé, notamment à écouter un enregistrement sonore, mais il vous attend. Parce qu’il vous voit, vous entend. Et se montre impatient de communiquer avec vous. De quoi se montre-t-il en joie de vous parler ? Et bien de lui !

Cet homme, d’une cinquantaine d’années, exerce le beau métier de clown. Il est la sixième génération. Fier de cette ascendance, et de la manière dont il a repris le flambeau, il vous en fera part dès que vous serez commodément installé dans votre fauteuil.

Des circassiens depuis 7 générations

Le dialogue pourrait ne pas avoir de fin, ce clown ne se lasse pas d’évoquer son art. Mais un second personnage fait son entrée sur scène : son fils. Un jeune adulte qu’il n’a pas revu depuis un certain temps, et qui vient lui annoncer qu’il poursuit la saga familiale. Septième génération d’artiste de cirque donc.

Pas facile toutefois d’annoncer à son père qu’on vient prendre sa succession - et un peu sa place aussi. Pas facile pour ce père de se confronter au corps d’un plus jeune que lui qui lui ressemble tellement. Cet autre lui-même lui fait prendre conscience du temps qui passe et qui ne permet peut-être plus les exploits physiques d’autrefois.

Débute alors, sur fond de rivalité et de nostalgie, un ballet entre ce père et ce fils. Chacun d’eux va pouvoir, en vous prenant à témoin, vous révéler tout son art. Ils enchaînent alors des numéros en solo ou bien en duos. Et c’est parti pour plus d’une heure de rires, de sourires, de moments de peur aussi - et surtout d’ébahissements devant tant de maîtrise artistique.

Un cirque flamand à l'histoire familiale flamboyante

"Mon père m'a si souvent parlé de mon arrière-grand-père qui avait dû fermer son théâtre ambulant en bois après le krach boursier de 1930. La guerre qui a suivi a définitivement sonné le glas de l'impressionnante caravane théâtrale. Oh, mon père revenait si souvent sur notre chronique familiale et pourtant, j'avais presque oublié que de tels événements pouvaient effectivement se produire", confie Danny Ronaldo, le père âgé, dans la présentation du spectacle.

« Sono io ? » ( C’est bien moi ? ) se demande Danny en regardant son fils. Il précise que le 13 mars 2020, juste avant la première, soudain les portes se sont fermées partout – au propre comme au figuré. "Je n'avais pas imaginé une seconde qu'un jour viendrait où il ne serait plus permis, nulle part dans le monde, de présenter un spectacle."

Les racines de Circus Ronaldo remontent loin dans le temps. Danny (54 ans) et Pepijn (25 ans) appartiennent respectivement à la sixième et à la septième génération d’artistes circassiens. Ils présentent ici un hommage à ce passé. Sous nos yeux, nous revient en mémoire alors toute la tradition des clowns d'origine italienne, des frères Fratellini à Achille Zavatta, comme celle du duo comique entre le clown blanc et l'Auguste.

Un visage familier avec un air de famille

Pourtant même si le titre est italien  - et même si le père s'exprime dans un langage à la croisée de la langue de Dante et d'un sabir propre au personnage du dessin animé italien La Linéa - aucun des deux artistes n'est transalpin. Dany, le père, précise qu'il utilise "une langue de son invention : une sorte de gromelot aux intonations italiennes, à la fois burlesque et universelle."

Et il explique : "Il n’y a pas de sang italien dans cette histoire mais un amour pour la comédie italienne". Car dans cette famille, tout a commencé  en 1842, à Gand, en Belgique, lorsqu’un jeune gamin, celui de la première génération, décide de quitter les siens pour rejoindre une jeune femme et sa troupe de Commedia dell’Arte.

Tout juste sorti de l'École internationale de théâtre Lassaad (Belgique), Pepijn, le fils, partage pour la première fois la scène avec son père. Et il nous bouleverse immédiatement par son jeu, emprunt d'amour filial. D'une grande sensibilité, ce spectacle est une façon de renouer avec leurs origines et la Commedia dell’Arte, dans lesquels on retrouve des masques, des costumes et l’esprit italien. Déjà dans le précédent spectacle, la Cucina dell’Arte par exemple, le père, Dany, jonglait avec une pâte à pizza !

L'âme d'objets inanimés

Ce nouveau spectacle, ils le jouent sur la scène du Rond-Point à Paris de la même façon que sous leur chapiteau. Ils ont mis en place toute une scénographie épurée, entre du linge qui sèche, comme dans une chambre de bonne parisienne, avec un piano droit, une baignoire, une lampe… Fidèles au principe du Cirque Ronaldo, comme des êtres à part entière, ils jouent sur l'inconscient grâce au concept de « tsukomogami », l'exploitation de l'âme de matériaux usés. Ces quelques objets permettent aussi de convoquer les souvenirs, comme cette boîte qui contient un vieux chapeau de clown et surtout les instruments de musiques chers au musicien italien Nino Rota : un trombone, un soubassophone (un tuba-contrebasse), des trompettes, même des violons mécaniques. Toute cette ménagerie instrumentale contribue fortement à l’atmosphère du spectacle ; elle permet de rappeler les bulles de souvenirs, entre réalisme magique et émotions premières.

Qu'est-ce qui est réel ? Qu'est ce qui ne l'est pas ? Réponse avec ce spectacle à ne pas manquer, au théâtre du Rond-Point jusqu’au 16 juin prochain. Pour les adultes qui veulent redevenir enfants. Et pour les enfants - qui sont toujours le meilleur des publics.

Sono Io ? - Circus Ronaldo jusqu'au 16 juin au Théâtre du Rond-Point (Paris 8e)

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