Refusée régulièrement dans des transports en commun ou des taxis parce qu'elle se présente avec un chien d'assistance, une jeune femme atteinte d'un handicap invisible témoigne. Alors que la loi impose aux transporteurs publics et privés une prise en charge des personnes en situation de handicap et de leur chien.
La scène s'est déroulée à Paris il y a déjà plusieurs mois. Ce jour-là, porte de Pantin, Lilou Niang décide de prendre le bus avec son chien d'assistance Octave. La jeune femme souffre de ce qu'on appelle un handicap invisible. Et son chien, un grand caniche alors en formation de chien d'assistance, l'accompagne dans ses déplacements.
"Le bus était là. Les gens étaient déjà installés à l'intérieur, la porte était fermée. Donc, j'ai demandé à rentrer dans le bus et la conductrice m'a dit : 'Madame le chien, ça ne sera pas possible'. J'explique alors que j'ai les cartes nécessaires - certificat d’identification du chien et attestation d'invalidité - pour prouver que j'ai le droit de prendre ce bus."
Lilou rentre dans le bus, s'assoit à une place prioritaire, son chien à côté d'elle. "À ce moment-là, il s'est passé quelque chose d'un peu violent, elle a bloqué les portes du bus pour les laisser ouvertes et a dit : "On ne partira pas tant que cette personne est dans le bus (... ) Il y a eu plusieurs débats parmi les passages, il y a ceux qui ont dit que c'était scandaleux de mettre tous les gens en retard comme ça, et d'autres qui m'ont dit : Madame, descendez, ils vont appeler la police."
Appelés par la conductrice, des agents de la sûreté de la RATP interviennent. La passagère et son chien d'assistance sont contrôlés. Les agents constatent que tout en règle et persuadent la conductrice de redémarrer son véhicule.
"Toute cette intervention a été clairement inutile. En plus dans le bus, il y avait les règles affichées qui stipulent que les chiens d'assistance et les chiens guides sont autorisés. Moi, je n'étais pas très bien. Je tremblais énormément. En fait, ce qui s'est passé, c'est comme une agression !"
Lilou Niang a filmé une partie de cette scène, pour tenter de sensibiliser, dit-elle, l'opinion publique. Elle a posté sa vidéo sur les réseaux sociaux. Et l'a republiée dernièrement estimant "que rien ne bouge, que la loi n'est pas appliquée (... ) je souhaite donner de la visibilité à ce type de problème, c'est juste pour montrer ce qu'on vit. Des refus comme ça, j'en ai filmés et j'ai en plein mon téléphone" explique-t-elle. La jeune femme déplore également que les taxis ou les UBER refusent régulièrement de l'embarquer, elle et son chien d'assistance.
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Ce que dit la loi
Selon la loi de février 2005, l'accès aux transports, aux lieux ouverts au public, ainsi qu'à ceux permettant une activité professionnelle, formatrice ou éducative est autorisé aux chiens guides d'aveugle ou d'assistance.
La notion de handicap invisible dont souffrent des personnes atteintes, par exemple d'autisme, d'épilepsie ou encore de troubles psychiatriques et qui ont besoin de chiens d'assistance, est encore trop méconnue, selon Lilou Niang. "Si on n'a pas une paire de lunettes noires, les gens ne comprennent pas cette notion de handicap qui peut être invisible."
Suite à sa mésaventure il y a un an, la jeune femme s'est tournée vers la RAPT qui affiche sur son site internet plusieurs pages consacrées à l'accessibilité des personnes en situation de handicap.
Le groupe, qui n'a pour l'instant pas donné suite à notre demande d'interview, y rappelle les conditions requises pour voyager sur son réseau en compagnie d'un chien guide ou d'assistance. Notamment, la présentation de justificatifs : "une carte d’invalidité, de priorité, d’éducateur, de Famille d’accueil ou le certificat d’identification du chien".
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Lilou Niang a donc déposé une réclamation sur une plate-forme qui lui a retourné un mail formaté en accusé réception. "Je n'ai pas eu, on va dire, humainement quelqu'un", résume-t-elle. Sauf récemment, sans doute à cause de la vidéo republiée dernièrement sur les réseaux sociaux. "Un cadre de la RATP a souhaité m'inviter pour que je sensibilise des gens de son équipe. Du coup, je pense que je vais lui répondre que j'accepte pour mieux faire connaître le chien d'assistance."